@prefix vivo: . @prefix edm: . @prefix ns0: . @prefix dcterms: . @prefix skos: . vivo:departmentOrSchool "Arts, Faculty of"@en, "French, Hispanic, and Italian Studies, Department of"@en ; edm:dataProvider "DSpace"@en ; ns0:degreeCampus "UBCV"@en ; dcterms:creator "Chung, Mimi Irene"@en ; dcterms:issued "2010-02-01T18:02:43Z"@en, "1975"@en ; vivo:relatedDegree "Master of Arts - MA"@en ; ns0:degreeGrantor "University of British Columbia"@en ; dcterms:description """La Mise à mort de Louis Aragon nous a offert un sujet dont l’amplitude dépasse les dimensions de ce mémoire. Celui-ci n'est qu'une modeste tentative pour mieux comprendre l'au-teur à travers l’élaboration de son oeuvre. Les problèmes que posent aujourd'hui la création romanesque et les jeux de l’écriture ne sont nullement notions nouvelles en littérature, moins encore pour un Aragon qui en fait, depuis les années vingt, la matière de ses réflexions. La Mise à mort, de 1965, avec toute son actualité critique, est le fruit de cette longue expérience d'écrivain. Notre étude supposera connu ce cheminement d'Aragon; son intérêt devrait tenir plutôt à la valeur analytique du point de vue adopté: dans un effort plus méthodique qu'inspiré, notre propos est en effet d'éclairer La Mise à mort par l’application d'une analyse structurale qu'une pareille oeuvre semble provoquer d'elle-même. Cette analyse sera, à proprement parler, grammaticale et structurale puisque, basée d'abord sur une étude du-langage, elle découvre la présence d'une grammaire du récit qui, s'érigeant en une première structure - celle de la phrase-récit - renferme pour l'examen de tout le roman une possibilité d'expansion au moyen d'autres structures, que les fonctions (cardinales et catalyses) de Roland Barthes aideront à préciser. Une Introduction sommaire propose une première situation de La Mise à mort parmi les orientations de la littérature française contemporaine. Les deux premiers chapitres renferment l’élaboration théorique de notre approche grammaticale et structurale: le premier intitulé "Le récit et le miroir" justifie le rôle de l'écriture dans la création romanesque et dévoile les jeux de miroir qu'elle institue entre fiction et narration, les deux facettes du récit littéraire; le second sous le titre "Pour une grammaire du récit dans La Mise à mort" établit un premier rapprochement entre le récit et le langage, et présente la coincidence entre l'aspect structural et l'aspect grammatical de l'analyse sous forme d'un procès en puissance qui trouvera son élaboration dans les chapitres qui suivent. L'analyse détaillée du roman se déroulera alors dans ces chapitres III et IV grâce à l'éclairage des fonctions cardinales et catalyses de Barthes. C'est dans ces chapitres aussi que s’épanouiront en même temps le point de rue adopté et la compréhension de l'oeuvre. Le chapitre V reprendra ce qui n'a pas été dit des trois contes qui figurent dans le roman et y jouent un rôle important. Notre Conclusion relèvera la pertinence de cette étude par une comparaison finale entre le récit et le langage qui mettra sous une lumière nouvelle l'art de la création romanesque et pour l'auteur et pour nous, lecteurs."""@en ; edm:aggregatedCHO "https://circle.library.ubc.ca/rest/handle/2429/19477?expand=metadata"@en ; skos:note "LA CREATION ROMANESQUE ET LE PROBLEMS DE L'ECRITURE DAKS LA MISE A MORT DE LOUIS ARAGON by MIMI IRENE CHUNG HONG HING B.A., U n i v e r s i t y of B r i t i s h Columbia, 1973 A THESIS SUBMITTED IN PARTIAL FULFILMENT OF THE REQUIREMENTS FOR THE DEGREE OF MS TER OF ARTS i n the Department of French We accept t h i s t h e s i s as conforming to the re q u i r e d standard THE UNIVERSITY OF BRITISH COLUMBIA September, 1975 In presenting t h i s t h e s i s in p a r t i a l f u l f i l m e n t of the requ i remen t s fc an advanced degree at the U n i v e r s i t y of B r i t i s h Columbia, I agree tha the L i b r a r y s h a l l make i t f r e e l y a v a i l a b l e f o r reference and study. I f u r t h e r agree that permission for extensive copying of t h i s t h e s i s f o r s c h o l a r l y purposes may be granted by the Head of my Department or by h i s r e p r e s e n t a t i v e s . It i s understood that copying or p u b l i c a t i o n of t h i s t h e s i s f o r f i n a n c i a l gain s h a l l not be allowed without my w r i t t e n permission. Department of |-Rt£fV Ct-/ The U n i v e r s i t y of B r i t i s h Columbia 2075 Wesbrook P l a c e Vancouver, Canada V6T 1W5 Date 6e.ph ABSTRACT La Mise a mort de Louis Aragon nous a o f f e r t un sujet dont 1*amplitude dSpasse l e s dimensions de ce memoire. C e l u i -c i n'est qu'une modeste tentative pour mieux comprendre l'au-teur a travers 1 * Elaboration de son oeuvre. Les problemes que posent aujourd'hui l a creation romanesque et l e s jeux de l ' S c r i t u r e ne sont nullement notions nouvelles en l i t t e r a t u r e , moins encore pour un Aragon qui en f a i t , depuis l e s ann§es v i n g j , l a matiere de ses r e f l e x i o n s . La Mise a mort, de 1965. avec toute son a c t u a l i t y c r i t i q u e , est l e f r u i t de cette longue experience d'e\"crivain. Notre Stude supposera connu ce cheminement d'Aragon; son in t e r e t devrait t e n i r plutot a l a valeur analytique du point de vue adopts: dans un e f f o r t plus mSthodique qu'inspire, notre pro-pos est en e f f e t d ' e c l a i r e r La Mise a mort par 1'application d'une analyse structurale qu'une p a r e i l l e oeuvre semble pro-voquer d'elle-meme. Cette analyse sera, a proprement parler, (i ) • ( i i ) grammaticale et structurale puisque, base*e d'abord sur une e*tude du-langage, elle dScouvre l a presence d'une grammaire du rScit qui, s'Srigeant en une premiere structure - celle de l a phrase-re*cit - renferme pour l'examen de tout le roman une possibility d'expansion au moyen d'autres structures,que les fonctions (cardinales et catalyses) de Roland Barthes aideront a pre*ciser. Une Introduction sommaire propose une premiere situa-tion de La Mise a mort parmi les orientations de l a l i t t e r a -ture francaise contemporaine. Les deux premiers chapitres renferment 1 * Elaboration the*orique de notre approche gramma-ticale et structurale: le premier intitule* \"Le re*cit et le miroir\" j u s t i f i e le role de l'ecriture dans l a creation romanesque et devoile les jeux de miroir qu'elle institue entre f i c t i o n et narration, les deux facettes du re*cit litte*-raire; le second sous le t i t r e \"Pour une grammaire du re*cit dans La Mise a mort\" Stablit un premier rapprochement entre le re*cit et le langage, et pre*sente l a coincidence entre 1'aspect•structural et l'aspect grammatical de 1'analyse sous forme d'un proces en puissance qui trouvera son Elaboration dans les chapitres qui suivent. L'analyse de*taille*e du roman se deroulera alors dans ces chapitres III et IV grace a l'Sclairage des fonctions cardinales et catalyses de Barthes. C'est dans ces chapitres aussi que s*Spanouiront en meme temps le point de rue adopts et l a comprehension de l'oeuvre. ( i i i ) Le chapitre V reprendra ce qui n'a pas Ste\" d i t des t r o i s contes qui figurent dans l e roman et y jouent un role im-portant . Notre Conclusion relevera l a pertinence de cette e\"tude par une comparaison f i n a l e entre l e r S c i t et l e langage qui mettra sous une lumiere nouvelle l ' a r t de l a creation roma-nesque et pour l'auteur et pour nous, lecteurs. TABLE DES MATIERES INTRODUCTION 1 CHAPITRE I : LE RECIT ET LE MIROIR 8 CHAPITRE II : POUR UNE GRAMMAIRE DU RECIT DANS LA MISE A MORT 2k CHAPITRE III : LES FONCTIONS CARDINALES DANS LA MISE A MORT kk 1. La fonction cardinale ou l e noyau kS 2. L i s t e des fonetions cardinales dans La Mise a mort 50 3 . La sequence dans La Mise a mort 6k k. Presentation en termes de c h i f f r e s des 3 sequences de La Mise a mort 65 5 . La nomination des sequences 67 6 . La micro-sequence dans La Mise a mort 69 7 . Analyse de l a sequence 1: \"Emetteur-recepteur\" 70 8 . Analyse de l a sequence 2 : \"Je raconte\" 75 9 . Resume de 1 'analyse de l a sequence 2 88 1 0 . Analyse de l a sequence 3 : \"Je suis raconte\" 89 1 1 . Resume de 1 'analyse de l a sequence 3 97 (iv) (v) CHAPITRE IV : LES FONCTIONS CATALYSES DANS LA MISE A MORT 103 1 . La fonetion catalyse 10k 2 . Les niveaux du r E c i t ou l e rapport \"raconte'v=5 \"une h i s t o i r e \" 111 3 . Les personnages ou l e rapport \".Te\"< ; \"une h i s t o i r e \" 123 k. Temps et espace 138 CHAPITRE V : L ' IMPORTANCE DES TROIS CONTES . 150 CONCLUSION 165 BIBLIOGRAPHIE I76 INTRODUCTION B i e n que d a t a n t de l ' e n f a n c e du n o u v e a u roman, l a t e n d a n c e chez l e s r o m a n c i e r s e t c r i t i q u e s c o n t e m p o r a i n s f r a n c a i s a m e t t r e en l u m i e r e l e s p h a s e s de l a c r e a t i o n d'un roman e t l e s d i f f i c u l t y d'un s c r i p t e u r ^ aux p r i s e s a v e c s o n S c r i t u r e r e s t e a c t u e l l e . L e Nouveau Roman a v i e i l l i e t f a i t p l a c e a une g e n e r a -2 t i o n romanesque q u i , p o r t S e s u r une v o i e s g m i o l o g i q u e , aime a r e f a i r e l e c h e m i n p a r c o u r u de l ' S c r i t u r e a f i n d'en s o n d e r l e s m y s t d r e s p a s s e s i n a p e r c u s . R o l a n d B a r t h e s r a t t a c h e l ' S c r i t u r e a une p e r p S t u e l l e i n t e r r o g a t i o n , de d i m e n s i o n c o s m i q u e : \"En s ' e n f e r m a n t dans l e 'Comment e * c r i r e ? ', l ' S c r i v a i n f i n i t p a r r e t r o u v e r l a q u e s t i o n o u v e r t e , p a r e x c e l l e n c e : • P o u r q u o i l e monde?'/ 'Quel e s t l e s e n s des c h o s e s ? ' E n somme, c ' e s t au moment mime ou l e t r a v a i l de l ' e \" c r i v a i n d e v i e n t s a p r o p r e f i n , q u ' i l r e t r o u v e un c a r a c t e r e me\"dia-t e u r . . . \" 3 (1) 2 \"L'aventure d'une Ecriture\", formule cElebre de Jean Ricardou*, se dEfinit de plus en plus dans sa \" l i t t E r a l i t E \" quand les mots d'un texte s'alignent en phrases pour devenir des personnages sur l'espace blanc du papier, et quand le scripteur-^, comme ses personnages, tend a ne devenir qu'un pronom grammatical. II n'y a plus de theme ni de sujet impo-ses par un auteur: c e l u i - c i , malgrE ses procEdEs l i t t E r a i r e s , n'est plus le maitre tout-puissant de son oeuvre. Le texte qui nait sous sa plume est par lui-meme \"actif\": \"Un texte est actif quand i l est capable de s'engendrer de lui-meme en crEant entre ses mots, entre ses Elements, un rEseau complexe de rapports.\"\" D'ou, l'existence d'un texte qui non seulement se s u f f i t a lui-meme, mais se complait dans cette autonomie: le nEo-nouveau roman'. R.M. AlbEres dans MEtamorphoses du roman a dEja rEsumE 1'attitude des romanciers et thEoriciens de Tel o Quel envers \"l'Ecriture romanesque\" qui, pour eux, \"n'est pas l a description d'un 'objet' (histoire, les personnages) par un 'sujet' (le romancier ou le personnage qui dit 'Je'), mais une perpEtuelle approximation et une perpEtuelle lutte entre 9 le sujet et l'objet...\" Pourquoi traiter de ces problemes actuels dans La Mise a mort? Parce que ce roman s'ajuste au cadre actuel de l a littErature frangaise. La Mise a mort, Ecrit en 196^, f a i t Echo aux prEoccupations actuelles de l a littErature et de l a critique: i l en est un des plus remarquables miroirs. 3 E t p o u r q u o i parmi t o u t e s l e s oeuvres de L o u i s Aragon, en c h o i s i r L a Mis e a mort q u i , p o u r t a n t , se v o i t precede\" de poemes e t de romans du c y c l e \"Le Monde Reel\", t o u s d i g n e s d'un r e g a r d c r i t i q u e ? ' P a r c e que l e t e x t e o f f r e p l u s qu'une s i m p l e h i s t o i r e t r a d i t i o n n e l l e \" ^ 0 . 11 e s t etonnant que c e r t a i n s c r i t i q u e s s o i e n t mime parvenus a e x p l i q u e r ce roman en termes d'une h i s t o i r e d'un homme d e c h i r e e n t r e deux p e r s o n n a l i t e s e t a l a r a t t a c h e r a l ' i t i n e r a i r e a r a g o n i e n , quand un sem b l a b l e theme a deja f a i t s on a p p a r i t i o n dans Les Beaux q u a r t i e r s , roman e c r i t en 19J6-, quand, au c o n t r a i r e , i l e s t c l a i r que ce mime theme r e a p p a r a i t dans L a Mis e a mort non p o i n t t e l q u ' i l a ete presente d'abord, mais sous une forme p l u s complexe q u i m&ne a d e c o u v r i r a u t r e chose dans l e roman. Aragon lui-meme e s t c o n s c i e n t du f a i t que ce roman renferme son p r o p r e commen-t a i r e e t e c r i t dans l ' a p r e s - d i r e a L a M i s e a mort: \"Le v r a i e s t que t o u t e p r e f a c e a L a Mise a mort dans son p r i n c i p e meme e s t une a b s u r d i t e . Ce roman e s t a lui-meme s a p r e f a c e , j e veux d i r e , p e r p e t u e l l e m e n t d'une page s u r 1 ' a u t r e . \" 1 1 12 B. L e c h e r b o n n i e r , c i t a n t Aragon , d e p l i e t o u t un even-t a i l de p o s s i b i l i t e s s ' o f f r a n t comme s u j e t s du roman. S i l ' o n d o i t p a r l e r de s u j e t , que c e l u i - c i s o i t d e f i n i sous une forme p l u r i e l l e . A u s s i , c h o i s i r l a c r e a t i o n romanesque e t l e p r o -blems de l ' e c r i t u r e comme s u j e t de c e t t e th§se n ' i m p l i q u e n u l l e m e n t que ce s u j e t s o i t l e s e u l digne d ' i n t e r e t dans l e roman; c ' e s t , p l u t o t , m a n i f e s t e r l a presence de l ' e c r i t u r e de fa§on p l u s a n a l y t i q u e qu'on ne l ' a f a i t a u p a r a v a n t . Le texte lui-meme demande une approche critique d i f f E -rente de celles appliquEes aux romans antErieurs d'Aragon. La rEalitE qu'Aragon a tente\" de reprEsenter dans ses romans du cycle- \"Monde REel\" se trouve redEfinie. En Etablissant un jeu de miroirs a 1'intErieur de son roman, Aragon cherche a capter le vrai monde rEel a travers le processus de 1'Ecri-ture. Comme le dit R.M-. AlbEres, \"la rEalitE ne serait pas un etre regardant ni un objet regardE, mais ce qui leur sert de mEdiation: 1.*expres-sion. En peinture, le tableau. En littErature, le texte et le langage.\"13 L'approche qui conviendrait done, serait celle qui traitera de ce genre de rEalitE, et du probleme de 1'Ecriture comme, avant tout, de celui de l a communication. Pour cela, 1'approche structurale participera aussi un peu de l a linguis-tique. Mais on se demande, aprS's rEflexion, s i une approche peut etre vraiment dEfinie a p r i o r i . Ne s e r a i t - i l pas plus valable de permettre a 1'approche elle-meme de s'affirmer en temps voulu et par le processus meme de sa propre Elaboration? On n'hEsite pas, par contre, a en nommer les sources•d'influen-ce. La premiere remonte a Roland Barthes qui, dans un essai thEorique 1^, a proposE une mEthode d'analyse structurale du rEcit. A 1'Etude formelle de notre roman correspondent des termes empruntEs a cet essai de Barthes. Mais a cotE de 15 Barthes, se dressent aussi imposants Tzvetan Todorov , Roman Jakobson1^ et Jean Ricardou 1^ et d'autres encore dont les 5 textes th£oriques auraient pu etre l a source d ' i n s p i r a t i o n pour La Mise a mort s i -ce roman n'avait vu l e jour avant eux. En e f f e t , on verra que l e s points de vue de cette c r i t i q u e d i t e \"moderne\" ou \"nouvelle\" Spousent l a forme du roman d'Aragon qui, pourtant,- n'est pas mentionne\" dans les ouvrages de cette nouvelle c r i t i q u e . Doit-on dire alors, q uec'est par l a pratique d'une Scriture automatique chez Aragon que La Mise a mort a su capter l a d i r e c t i o n d'une c r i t i q u e qui est de plusieurs anne\"es sa cadette? Ce s e r a i t peut-etre pousser trop l o i n l e s conjectures. Ne\"anmoins, i l reste c l a i r qu'aujourd'hui, litte\"rature et c r i t i q u e sont des \"vases com-municants\" et se modifient, l'une e\"tant l a r e f l e x i o n de 1'autre. On t i e n t finalement a a v e r t i r que notre approche c r i -tique n'est pas une adaptation exacte de t e l l e ou t e l l e me\"thode c r i t i q u e , mais plutot un amalgame des principes e\"la-bore\"s par certains - u t i l i s e s i c i comme points de depart pour une tentative personnelle - et une u t i l i s a t i o n de termes qui r£pondraient aux besoins de 1*analyse d'une oeuvre p a r t i -c u l i e r e , i c i , de La Mise a mort. Cette analyse visera/moins a un besoin d ' o r i g i n a l i t y qu'a un de\"sir de mieux comprendre ce texte qui est d'une semantique foisonnante et vertigineuse a l a premiere lecture de survol. 6 NOTES Scripteur: terme dSsignant c e l u i qui £crit, mais differemment du terme \"auteur\" p u i s q u ' i l prSconise une l u t t e entre c e l u i qui e c r i t et son texte, et non une maitrise abso-lue chez 1'esprit cre\"ateur. 2 Voie semiologique: tendance a considgrer l e l a n -gage comme base premiere de l a creation romanesque. L'adjec-t i f \"semiologique\" est de \"semiologie\" qui est 1'etude des systemes de signes parmi lesquels figure l e langage. Synonyme de \"semiologie\": \"semiotique\". 3 y Roland Barthes, Essais c r i t i q u e s . C o l l . Tel Quel (Paris: S e u i l , 19'6k) , p. V±9~. 14, Jean Ricardou, Pour une theorie du nouveau- roman (Paris: S e u i l , 1971), p. 3 2 . Scripteur: v o i r note n° 1. Jacqueline P i a t i e r , \" J . Ricardou et ses generateurs\", Critiques de notre temps et l e nouveau roman, Les (Paris: Gamier, 1972), p. I69. 7 Le neo-nouveau roman: l e roman, d'apres certains romanciers contemporains, qui a depasse l e stade du \"Nouveau roman\" (d'ou, l e prgfixe \"Neo\") dans I n v o l u t i o n romanesque. Ce genre de roman denonce sa propre creation et l a i s s e entre-v o i r l a puissance^du langage devant lequel 1'auteur n'est que partiellement \"maitre™ de son oeuvre. En plus du remaniement des concepts romanesques, t e l s 1'intrigue, l e personnage, l e neo-nouveau roman exploite l'espace qui l u i est propre, c'est-a-dire l'espace textuel, pour f a i r e surgir des rapports sub-t i l s et poetiques entre les mots et l e s phrases. Citons, parmi l e s precurseurs du neo-nouveau roman: Philippe S o l l e r s pour ses Drames et Nombres, Jean-Louis Baudry pour Personnes dont parle Jean Ricardou dans Pour une theorie du nouveau roman ou une demarcation est f a i t e entre l e nouveau roman et l e nouveau mouvement lance par un groupe d'ecrivains et de c r i t i q u e s d'avant-garde appeie \"Tel Quel\". Ce groupe se veut revolutionnaire aux niveaux de l ' e c r i t u r e et de l a v i e . Publications de \"Tel Quel\": l a revue Tel Quel et une c o l l e c -t i o n \"Tel Quel\" dans les Editions du S e u i l . 8 7 ^ Tel Quel: v o i r note ' 9 R.M. AlbEres, Metamorphoses du roman (Paris; Ed. A. Michel, 1 9 7 2 ) , p. 2 2 5 . H i s t o i r e t r a d i t i o n n e l l e : une h i s t o i r e est d i t e t r a d i t i o n n e l l e quand e l l e s u i t une certaine t r a d i t i o n roma-nesque qui exige que l e s romans aient toujours une intrigue riche et dEfinie - avec un commencement, un dEveloppement et une f i n -, des personnages gonflEs de t r a i t s psychologiques qui sont census reprEsenter des personnes dans l a vie r E e l l e . On oppose souvent, quelques f o i s a t o r t , l e s romans contem-porains aux romans du XlXeme si&cle: ceux-ci, pour avoir racontE l ' h i s t o i r e d'une ou de plusieurs vies se voient a t t r i -buer l'Epithete \" t r a d i t i o n n e l s \" . 1 1 Louis Aragon, La Mise a mort (Paris: Laffont, 1 9 7 0 ) , ORC, v. 3*1., p. 2 3 3 . 1 p Bernard Lecherbonnier, Presence l i t t E r a i r e : Aragon (Paris: Bordas, 1 9 7 1 ) . p. 1 7 2 . 1 ^ Op. c i t . , p. 2 ^ 6 . Roland Barthes, \"Introduction a l'analyse structu-r a l e des r E c i t s , \" Communications, 8, 1 9 6 6 , pp. 1 - 2 7 . Tzvetan Todorov, PoEtique de l a prose (Paris: S e u i l , 1 9 7 1 ) . Roman Jakobson, Essais de l i n g u i s t i q u e gEnErale, I, (Paris: Ed. Minuit, 1 9 6 3 ) . ^ Jean Ricardou, Problemes du nouveau roman (Paris: S e u i l , 1 9 6 7 ) . Pour une thEorie du nouveau roman (Paris: S e u i l , 1 9 7 1 ) • CHAPITRE I Le REcit et l e miroir Les deux premiers chapitres de cette thdse auront comme matiere une Elaboration de principes gEnEraux concernant l e roman, suivie ensuite d'une app l i c a t i o n introductrice au roman de Louis Aragon: La Mise a mort. Ce chapitre en question t r a i t e r a , comme l e suggere son t i t r e , de diffErentes phases de 1 ' i n s t a l l a t i o n du miroir dans l e roman qui aboutiront a une symEtrie parf a i t e dans l e renvoi 1 2 d'images entre l a f i c t i o n et l a narration , l e s deux modes du r E c i t , dans l e nEo-nouveau roman. La Mise a mort^ roman tout a f a i t moderne, contient en e f f e t ce jeu de miroirs entre f i c t i o n et narration, jeu qui sera lEgerement esquissE i c i , mais r e p r i s plus tard dans une analyse plus d E t a i l l E e . On verra aussi comment d'un point de vue l i n g u i s t i q u e , l e proble-me du rEalisme dans l e roman se r e d E f i n i t pour confirmer 1'im-portance de 1'Ecriture dans l a creation romanesque. Fond et forme: v o i l a l e s deux aspects du r E c i t sur lesquels l a c r i t i q u e francaise a fondE 1'Etude d'une oeuvre l i t t E r a i r e . Cette tendance dichotomique dans l a c r i t i q u e l i t -8 9 teraire (qui s'est constitute en genre au XlXeme s i e c l e ) a examiner d'abord, l e fond d'un recit (c'est-a-dire, 1'intrigue, le s themes, l e s sentiments, l a philosophie), et ensuite, sa forme ( l a structure, l e st y l e , l e s figures etc.) a preValu jusqu'a nos jours. Malgre\" l a presence d'oeuvres l i t t e * r a i r e s ou l ' S c r i v a i n dtmasque son jeu et c e l u i du langage^, l a c r i -tique, p a r f o i s , semble continuer a ignorer que l e sentiment d'impuissance ressenti chez un Mallarme\" a dire les choses, l o i n d'etre o r i g i n a l , n'est qu'une forme evolute du duel eternel entre 1'homme et l e langage. Du cote- romanesque, l a pratique de l ' e c r i t u r e chez un Balzac ou un Zola qui a f f i -chaient leurs intentions \" r e a l i s t e s \" , tendait a l ' a s s e r v i s -sement de cette ecriture a l a representation du monde. II s u f f i t de reprendre l e s traces d'Ernest Renan, de Sainte Beuve ou de Taine pour confirmer ce point, puisque cette c r i t i q u e d i t e alors \" s c i e n t i f i q u e \" se vo u l a i t miroir de l a l i t t e r a t u r e . Avec l e nouveau roman et l a nouvelle c r i t i q u e , fond et forme s'estompent pour proposer une nouvelle d e f i n i t i o n des elements du r e c i t . En e f f e t , l a nouvelle c r i t i q u e de tendance s t r u c t u r a l i s t e a distingue deux modes du r e c i t : l a f i c t i o n et l a narration. Tzvetan Todorov e c r i t dans \"Les Categories du r e c i t l i t t e r a i r e \" : \"Au niveau l e plus general, 1'oeuvre l i t t e r a i r e a deux aspects: e l l e est en meme temps une h i s t o i r e et un discours.\"^ A quoi Roland Barthes f a i t echo, tout en prenant cons-10 cience du role grandissant de 1'Ecriture dans le rEcit: \"...un texte moderne, faiblement signifiant sur le plan de 1'anecdote, ne retrouve une grande force de sens que sur le plan de 1'Ecriture.\"5 Cette division en deux plans qui constitue le' fondement d'une critique tournEe de plus en plus vers 1'Ecriture, trouve un dEveloppement plus complexe du point de vue des thEoriciens de \"Tel Quel\". Fiction et narration, en effet, vont instituer un.jeu entre elles auquel participera de moins en mo-ins l r a u -teur. Celui-ci sera en face d'un texte qui va engendrer un sens autre que celui de 1'auteur. N'Etant plus le maxtre abso-lu de ce qu'il Ecrit, 1'auteur, ou plus exactement le scrip-teur^, se trouvera alors en lutte constante avec son Ecriture. Mais essayons de retracer maintenant avec l'aide de deux termes linguistiques, le role grandissant du miroir dans le rEcit. On sait qu'en linguistique, le signe repose sur 1'oppo-sition insEparable du signifiant et du signifiE: c e l u i - c i Etant le contenu sEmantique du signe et celui-la sa prEsence rnatErielle. La critique traditionnelle du roman rEaliste du XIX§me siecle semble baser ses points de vue sur une opposition de l a f i c t i o n et de l a narration semblable §. celle entre signi-fiant et signifiE. La narration comme signifiant renvoie a un signifiE qui est l a f i c t i o n . C'est ce que dEmontre le schEma suivant: 11 Schema I Signifiant — -> SignifiE Narration — Fiction Ainsi, tres souvent, on analyse un roman de Balzac comme s i c e l u i - c i , presence omnisciente, exercait une Ecriture trans-parente; le lecteur est pris par les pEripEties de 1*histoire qui semble etre I'intEret principal pour l u i . Le signifiant qui est l a narration, cS'de alors le pas au signifiE (la f i c t i o n ) . Bien qu'on soit conscient de l a prEsence de 1'auteur, celui-ci ne met pas en question son activitE scripturale. Avec le nouveau roman, l a critique reprend conscience de 1'importance de l a narration. Un auteur peut-il vraiment s'effacer et etre totalement objectif devant son oeuvre? Si le roman est 1'ahoutissement de l'acte d'Ecrire, qu'il rEvele alors pour le lecteur et l a f i n et le moyen de cet acte. En effet, le nouveau romancier, un Rohhe-Grillet, par exemple, f a i t l a part a l a narration dans ses romans construits sur des procEdEs et des structures quiirEvelent 1'effort et le travail chez 1'auteur. De meme, l a critique, en analysant le nouveau roman, trouvera mati§re sur l a facon dont le roman est Ecrit. En d'autres mots, l a narration-signifiant devient pour l a c r i -tique, une part du signifiE: l a narration f a i t alors partie de l a f i c t i o n . Ainsi, La Jalousie de Robbe-Grillet est un traitement structural du dEveloppement d'un sentiment chez un 12 etre existant par son regard: pour comprendre 1*evolution de l a jalousie, l a c r i t i q u e doit surtout se rendre compte de l a structuration quasi-geometrique du roman. Le schema II s e r v i r a a S c l a i r c i r l e dSdoublement de l a narration en s i g n i f i a n t et s i g n i f i e d Schema II S i g n i f i a n t — —> S i g n i f i e Narration — —> Fiction-Narration-Dans ce schema II , on v o i t dSja l e miroir i n s t a l l ^ dans l e r e c i t : l a narration en un sens, se r e f l e t e quoique de facon boiteuse, dans l e s i g n i f i e . R.M. Albtres en signalant l e role du miroir dans l e roman e c r i t : \"Un e f f e t d'optique, un jeu de miroirs ou de prismes, c'est 1'idSe, l a tentation, l e rprocede que, de 1925 3. 1965, on va essayer d * i n s t a l l e r dans l e roman,...\"7 L ' e f f o r t du neo-nouveau romancier et du th£oricien de \"Tel Quel\" va toutefois plus l o i n a f i n d ' e t a b l i r une symStrie parfa i t e entre l e s i g n i f i a n t et l e s i g n i f i e , c*est-a-dire, entre l e miroir et l e r e f l e t . La narration devenue s i g n i f i a n t et s i g n i f i e au stade du nouveau roman, va maintenant partager sa fonction de s i g n i f i a n t avec l a f i c t i o n qui devient e l l e aussi, s i g n i f i a n t et s i g n i f i e . A i n s i , comme l e demontre l e schema III qui s u i t , tandis que l a narration en tant que s i g n i -f i a n t devient contenu semantique, l a f i c t i o n assume l a fonction de designer sa propre narration, c*est-a-dire, sa propre pre-sence materielle: 13 Schema III Signifiant —> SignifiE Narration - Fiction--> Fiction - Narration Comme le constate Jean Ricardou dans Pour une- thEorie du nouveau roman; \"Le roman, ce n'est plus un miroir qu'on promene le long d'une route; c'est l'ef f e t de miroirs partout agissant en lui-meme.\"8 La conception rEaliste du miroir de Saint-REal que l'on prete a Stendhal a en effet, subi une radicale modification et les internes miroitements dont parle Ricardou ont tres tot, avant meme 1'apparition de 1'Etiquette \"nouveau roman\", recu l'originale appellation de \"mise en abyme\" dans le Journal de 1893 d'AndrE Gide. Ce procEdE u t i l i s E d'abord en peinture a pour but,en littErature, de ramener toute 1'attention sur l'oeuvre et sa composition. C'est dans le cadre du schEma III ou l a narration, comme l a f i c t i o n , est a l a fois, miroir et reflet que se situe La Mise a mort d'Aragon ou, en effet, i l est souvent question de miroirs. Le tableau suivant annonce les quatre niveaux du rEcit possibles, instituEs par le jeu de miroirs entre f i c -tion et narration: Ik Tableau I: S i g n i f i a n t / M i r o i r S i g n i f i e / R e f l e t 1 Narration A Narration B 2 Narration B F i c t i o n C 3 F i c t i o n C F i c t i o n D k F i c t i o n D Narration A Sans pousser trop l o i n dans une analyse de\"taille\"e qui se pre\"sentera plus tard, on notera l e s points suivants: 1. La narration A r e f l e t e l a narration B; La Mise a mort, oeuvre composed (A), offr e comme recit l e s d i f f i c u l t e s de l ' e c r i t u r e sous l a plume d'un scripteur (B). C e l u i - c i , p r i s dans l'engrenage de cette ecriture dont l e commencement l u i appartient se dScouvre incapable de controler l e r S c i t qui, a beaucoup de points, l e force a s'arreter pour y refiechir. 2. La narration B r e f l e t e l a f i c t i o n G: L'ecriture qui s'aventure au f i l des pages de La Mise a mort-, (B) offr e a son tour, 1'histoire ou l'on rencontre Fougere, Anthoine et l e scripteur lui-meme, et qui est l a f i c -t i o n C, c e l l e ..:^bauchee dans l ' i n c i p i t 7 du roman. 15 3. La f i c t i o n C reflete l a f i c t i o n D; La f i c t i o n C est une histoire ou parler constitue le principal acte entre les personnages: elle donne l i e u alors a une situation de communication ou les conversations et les reflexions tournent autour des problemes concerhant l'art romanesque. Ceux-ci naturellement mettent en cause des Ecri-vains et des textes qui appartiennent•au monde rEel et qui sont i c i vus sous un nouveau jour: i l s constituent ainsi une deuxieme histoire qui est l a f i c t i o n D. k. La f i c t i o n D reflete l a narration A: Cette nouvelle f i c t i o n D renferme en soi tout un monde l i t t S r a i r e qui dEpasse le cadre du li v r e et qui cons-titue une partie du monde rEfErentiel.ou ont exists Shakespeare, Gorki, R.L. Stevenson, etc. parmi les oeuvres desquels va se ranger cette Mise a mort, oeuvre composEe, de Louis Aragon. C'est par cette commune appartenance au monde d'oeuvres existantes que l a f i c t i o n D•reflete l a narration A. Le tableau suivant aidera peut-etre a mieux sa i s i r l a substance des niveaux du rEcit et les rapports entre eux: 16 Tableau I I : S i g n i f i a n t / M i r o i r S i g n i f i e / R e f l e t A La Mise a mort, Le scripteur a B < oeuvre composee sa tache B Le scripteur ^ a sa tache ( L ' h i s t o i r e de •^Fougere et ses / amants C C L ' h i s t o i r e de / Fougere et ses ( amants T Les problemes y de l ' a r t ^ romanesque D D Les problemes / de l ' a r t £ romanesque La Mise a mort, > oeuvre ^/ composSe. A A La Mise a mort, ^ oeuvre compose\"e s Le scripteur a S sa tache B 1 Kl i ! y\\\\ ! Dans ce tableau II, l a d i r e c t i o n des fleches indique 1 ' a c t i v i t y du miroir qui tourne pour un renvoi perpgtuel d'images re\"ciproques entre f i c t i o n et narration. Ce jeu de miroirs dans l e re\"cit f a i t v a l o i r deux points importants r e l i c s aux problemes romanesques. Le premier est que l a f i c t i o n dans un r£cit est utilise\"e pour r e f i e t e r l-'-e\"cri-17 ture et non le monde hors-texte. Et deuxidmement, l a f i c t i o n n'existe pas avant 1'Ecriture: c'est c e l l e - c i qui l a com-mande. C'est aussi ce que pense J. Ricardou dans Problemes du nouveau roman: \"Pour rEpandue qu'elle soit encore, 1'idEe d'une f i c -tion prEalable que 1'Ecriture exprimerait ensuite, se rEvele ainsi, s'agissant de littErature, tout a f a i t hors du propos. La f i c t i o n pour nous, c'est ce que, par son fonctionnement, constitue une prose. Ou encore: l a f i c t i o n est inspirEe par 1'Ecriture.\"1° Ceci nous ramene alors a un probleme mille fois dEbattu: celui du rEalisme. Selon l a conception dEpassEe du roman au XlXeme siecle, le roman, c'est le miroir qui sert a reflEter l a rEalitE extE-rieure: en le promenant le /long d'une route, on captera les moindres dEtails du panorama offert, et par ce f a i t , le roman reprEsentera le monde. Cette conception apparait aujourd'hui insuffisante du f a i t que l a linguistique moderne nous a appris a distinguer en dehors du couple signifiant/signifiE, un t r o i -si§me terme qui est le rEfErent. Dans 1'effort de reprEsentation chez les \"rEalistes\", le rEfErent est confondu avec le signifiE, et pour cette r a i -son, on a eu tendance a croire que le monde reprEsentE dans le roman est celui ou l'on v i t . Ainsi, dans le schEma A suivant, on voit mieux l a confusion de deux termes sEparEs en un seul, c'est-a-dire, l'erreur des \"rEalistes\" a croire que leurs oeu-vres refletent le monde extErieur: 18 Schema A: S i g n i f i a n t S i g n i f i e Referent E c r i t u r e > • Monde exterieur Mais dans quel que s oeuvres romanesques contemporaines\" appeiees \"nouveaux romans\", l a s c i s s i o n entre s i g n i f i e et referent est bien apparente: l ' e c r i t u r e joue l e role du s i g n i -f i e tout en restant s i g n i f i a n t . Toutefois, trop souvent l e s i g n i f i e se trouve subordonne au referent qui est l e monde hors-texte. Pour se raconter, l ' e c r i t u r e s'appuie sur des f a i t s r e c u e i l l i s et modifies du monde exterieur qui constitue-ront 1'intrigue p r i n c i p a l e du roman. S i l'on reprend La Jalou-sie de Robbe-Grillet, on verra en e f f e t , que l a structuration mathematique du roman soutient des bribes d'une conscience qui la i s s e n t deviner l ' h i s t o i r e d'un mari jaloux de sa femme. L'ecriture joue un role i c i , mais de facon i m p l i c i t e , que l e lecteur doit deviner ou rechercher a travers l e s p e r i p e t i e s de l a conscience jalouse. Avant de presenter sous l a forme d'un autre schema, l a manifestation de l ' e c r i t u r e dans l a creation du nouveau roman, on prendra un autre exemple, A l a recherche du temps perdu de Marcel Proust que les nouveaux romanciers^^ considerent comme un de leurs precurseurs. Proust presente l e narrateur Marcel comme un etre doue de qualites qui l e feront e c r i v a i n : 19 v e r s l a f i n de l ' o e u v r e , dans l a p a r t i e L e Temps r e t r o u v E , l e l e c t e u r a p p r e n d que M a r c e l v a ' e n t r e p r e n d r e l e g r a n d t r a v a i l d ' E c r i r e u n l i v r e q u i r e s s e m b l e r a i t estrangement a A l a r e c h e r -che du temps p e r d u . P o u r t a n t on a s u f f i s a m m e n t repetE que M a r c e l e t P r o u s t s o n t deux e t r e s d i s t i n c t s : a l o r s c e que l e l e c t e u r a s o u s l e s yeux n ' e s t pas l ' o u v r a g e du n a r r a t e u r M a r c e l p u i s q u e c e l u i - c i n ' a pas commence s o n o e u v r e . E t s i e f f e c t i -vement l ' o e u v r e e s t c e l l e de M a r c e l P r o u s t , on s a i t a u s s i q u ' i l ne r a c o n t e p a s s a p r o p r e h i s t o i r e e t que A l a r e c h e r c h e du temps p e r d u n ' e s t pas 1 ' h i s t o i r e de s a p r o p r e E c r i t u r e . L ' o e u v r e de P r o u s t , comme c e l l e de R o b b e - G r i l l e t , a t t i r e 1 ' a t -t e n t i o n du l e c t e u r s u r l e r o l e de 1 ' E c r i t u r e s a n s d o n n e r a c e l l e - c i une i m p o r t a n c e c e n t r a l e dans l e roman. L e r E f E r e n t , c ' e s t t o u j o u r s l e monde e x t E r i e u r r e p o s a n t s u r u n s i g n i f i E m o d e s t e : l e monde i m p l i c i t e , s i n o n e f f a c E , de 1 ' E c r i t u r e comme l e dEmontre l e schEma B c i - d e s s o u s : SchEma B: S i g n i f i a n t E c r i t u r e S i g n i f i E Monde de 1 * E c r i t u r e : p r o b l e m e s 1 ^ e t : t e c h n i q u e s R E f E r e n t Monde e x t E r i e u r 20 La Mise a mort,,comme tout neo-nouveau roman, o f f r e un schema sernblable a c e l u i du nouveau roman (schema B) sauf pour un aspect p r i m o r d i a l : c e l u i du r e f e r e n t . Dans l e schema C qui s*impose un peu plus l o i n , l ' e c r i t u r e t r a n s p a r a i t partout dans La Mise a mort. Etant l e s i g n i f i a n t , e l l e expose ses problemes et l e s techniques u t i l i s S e s pour se f a i r e roman; e l l e a pour r e f e r e n t , son propre t e x t e q u ' e l l e est en t r a i n d'eiaborer, ce l i v r e qui prend forme page par page et qui va e t r e , q u i est La Mise a mort. A i n s i , ce roman est vraiment c e l u i d'un roman ou l a seule r e a l i t e est c e l l e des mots. C'est un a r t i s t e q u i f a i t l e p o r t r a i t de lui-meme. La Mise a mort, c'est une a n t i r e p r e s e n t a t i o n de l a r e a l i t e e x t e r i e u r e dont 1'existence est subordonne\"e a c e l l e du texte et c'est en 12 f i n de compte, un v e r i t a b l e \" a u t o p o r t r a i t \" . Un regard sur l e schema C e c l a i r c i r a ce p o i n t : Schema C: S i g n i f i a n t S i g n i f i e E c r i t u r e Monde de l ' e c r i t u r e : problemes et techniques S ^ _ Referent Monde du l i v r e La Mise a mort 21 A i n s i fonctionne l e m i r o i r a 1 ' i n t S r i e u r du r e c i t . I I prSsente l ' e c r i t u r e comme a l a f o i s , l e hSros, l e s u j e t et l e c r i t i q u e du roman. L ' e c r i t u r e est semantique et syntaxe du . t e x t e : e l l e en est a u s s i l a seule r e a l i t e . 22 NOTES F i c t i o n : terme dEsignant ce qui est d i t dans un r E c i t . C'est l e niveau semantiq-ue du r E c i t ou encore, c'est \" l ' n i s t o i r e \" racontEe dans l e r E c i t . Voir c i t a t i o n de T. .Todorov, p. 9« 2 Narration: terme (complEmentaire a ' f i c t i o n ' ) dEsi-gnant l a facon dont est dite l a f i c t i o n dans un r E c i t . C'est l e niveau syntaxique du r E c i t . T. Todorov l'appelle 'discours*.. Voir c i t a t i o n de Todorov, p. 9. 3 . . J Parmx ces oeuvres, on compterait c e l l e s de Denis Diderot, Ecrivain-philosophe du XVIIIeme s i e c l e . ^ T. Todorov, Communications, 8 , 1 9 6 6 , p.1126. ^ R. Barthes, \"Introduction a 1*analyse structurale des r E c i t s ; \" Communications, 8 , 1 9 6 6 , p. 7 . these. 7 8 Voir notes a 1'introduction no. 1, p. 6 de cette R.M. AlbEres, MEtamorphoses du roman, ;;p. 3 ^ . J . Ricardou, p. 2 6 2 . I n c i p i t : terme u t i l i s e par Aragon lui-meme dans Je n'ai .jamais appris a e c r i r e ou l e s i n c i p i t (Geneve: Skira, 1969) pour designer l a premiere phrase i n i t i a t r i c e , d u roman. 1 0 J . Ricardou, p. 1*1-3. ^ Nouveaux romanciers: bien que les ecrivains s'intes ressant au nouveau roman nient, chacun de son cote, d'appar-t e n i r a un groupe, nous assumons l a responsabilite de l e s appeler \"nouveaux romanciers\" par l e f a i t q u ' i l s entretiennent, malgre eux, des attitudes et des conceptions romanesques tr§s voisines l e s unes des autres. 23 12 Autoportrait: dans \"Le Merou: Apres-dire\"\"a La Mise a mort, Aragon <§crit: \"Tout autoportrait suppose un miroir, a 6t§ peint ou dessine\" devant un miroir (une memoire au besoin, c'est encore un m i r o i r ) . Par une Strange convention t a c i t e l e s peintres pendant des si d c l e s ont \"supprime\"\" l e mi-r o i r de leurs autoportraits comme un p r e s t i d i g i t a t e u r qui ne montre pas l'envers de ses tours. l i s se sont peints, ou d'cu moins:.- ont voulu nous dormer a cr o i r e q u ' i l s se peignaient, comme un bouquet l a , sur l a table...\" (pp. 257 - 8 ) . CHAPITRE II Pour une grammaire du r e c i t dans \"La Mise a mort\" Ce second chapitre, comme l e premier, sera de caractere general et p a r t i c u l i e r : i l pre\"sentera d'abord, une mise au point thSorique sur l a notion de grammaire dans l a l i t t e r a t u r e contemporaine; i l relevera ensuite l a pertinence d'une gram-maire dans l e r e c i t de La Mise a mort et en meme temps, l'ap-proche grammaticale et structurale qui se d e f i n i t pour une analyse de\"taille\"e du roman d'Aragon. Bast sur l e langage, un systeme de signes premier - l e plus important d'apres Roman Jackobson\"'\" - l e r e c i t est a un second niveau, une a c t i v i t y symbolique qui demande un d e c h i f -frement c o d i f i e semblable a 1'etude du langage au moyen d'une 2 grammaire . La v i s i o n d'une grammaire dans l e r e c i t s'est tres sensiblement r e a l i s e e dans l a nouvelle c r i t i q u e . Roland Barthes a p r i s comme point de depart a son analyse structurale des r e c i t s , un rapprochement entre l e r e c i t et l a phrase; Gerard Genette a propose d'etudier A l a recherche du temps perdu de Proust comme l'expression d'un verbe, t e l l e que \"Marcel devient ecrivain\".-^ On pense aussi a l a Grammaire du 2k 25 De\"cameron de Tzvetan Todorov. Todorov a d'abord rSduit l a nouvelle-de Boccace a un resume contenant plusieurs proposi-tions . Chaque proposition represente une action et se prete a une analyse syntaxique. De l a nouvelle a l a sequence^ ou a l a proposition, on passe d'un texte coneret a une presenta-t i o n abstraite, mais Todorov y entrevoit tout de meme, l a p o s s i b i l i t e d'une in t e r p r e t a t i o n semantique a partir;.du verbe qui p a r t i c i p e dans son contenu, a l a semantique et dans sa forme a l a syhtaxe. De ce niveau fondamental, Todorov en arrive ensuite a relever des transformations et des modes du verbe. Comme Todorov, Genette distingue dans A l a recherche du temps perdu, l e s categories du verbe t e l l e s que 1'aspect, l e mode, l e temps et l a voix.^ Pourtant, cette a p p l i c a t i o n \"grammaticale\" au r e c i t n'est pas tres nouvelle: e l l e a existe mais sous forme eparse des l e debut de ce s i e c l e . On se souvient de l a notion americaine du \"point ofviiew\" etudiee dans l e roman ou l e c r i t i q u e demontre que 1*auteur emploie des procedes n a r r a t i f s pour separer ses propres prejuges de ceux de ses personnages. L ' u t i l i s a t i o n d'un \"narrateur\" dans un roman, pose de nouveau, tout l e probleme de 1 ' i d e n t i f i c a t i o n d'un personnage disant \"Je\" a 1'auteur, et remet en question l a notion meme de personnage. C'est toujours a l a c r i t i q u e americaine ou anglaise (E.M. Forster, Percy Lubbock, Edwin Muir entre autres) qui a voulu forger un art de l a f i c t i o n , que revient l e merite d'avoir pose l e s problemes du temps et de l ' e s p a c e dans l e roman. Ces n o t i o n s d'abord r e p r i s e s p a r l e s c r i t i q u e s e t r o m a n c i e r s f r a n c a i s ont a c q u i s d e p u i s , un a s p e c t p l u s t h S o r i -que g r a c e a 1 ' i n t e r v e n t i o n de mEthodes i n s p i r E e s de l a l i n g u i s -t i q u e dans 1'Etude l i t t E r a i r e d'un t e x t e . Dans son e s s a i de 19687, R. B a r t h e s S c r i t : \"Et p o u r t a n t i l e s t E v i d e n t que l e d i s c o u r s lui-meme (comme ensemble de p h r a s e s ) e s t o r g a n i s S e t que p a r c e t t e o r g a -n i s a t i o n i l a p p a r a i t comme l e message d'une a u t r e langue supS-r i e u r e a l a langue des l i n g u i s t e s : l e d i s c o u r s a ses u n i t S s , ses r e g i e s , s a 'grammaire\"; a u - d e l a de l a phrase e t quoique com-pose uniquement de p h r a s e s , l e d i s c o u r s d o i t e t r e n a t u r e l l e m e n t 1'objet d'une seconde l i n g u i s t i q u e . \" Qui d i t grammaire p e n s e r a a u s s i t o t a systeme, code, r e g i e s ou mieux, s t r u c t u r e . E t 1'analyse de l a grammaire du r E c i t chez B a r t h e s e t Todorov l e prouve: e l l e e s t s t r u c t u r a l e . E l l e v a avant t o u t dSgager des d i r e c t i v e s f o r m e l l e s , des m o t i f s combi-n a t o i r e s dans l e t e x t e , q u i a i d e r o n t a s a i s i r : . l e sens de ce t e x t e . L a M i s e a mort e s t , comme on 1'a vu, un r E c i t q u i d i f -f u s e 1 ' E c r i t u r e s u r t o u s l e s p l a n s : c ' e s t v E r i t a b l e m e n t un t e x t e , c ' e s t - a - d i r e , un espace ou 1 ' E c r i t u r e se f a i t e t se v o i t f a i r e . Pour b i e n comprendre e t s u i v r e l e langage p r o f u s , r i c h e , q u i semble mener n u l l e p a r t , ce langage p r o p r e a L a Mise a mort, i l f a u t une l e c t u r e s t r u c t u r E e : t r o u v e r un o r d r e dans ce q u i semble e t r e d e s o r d r e , c ' e s t deja c h o i s i r un code q u i donnera un sens nouveau au t e x t e t o u t comme a p p l i q u e r une grammaire au langage f o r c e c e l u i - c i a une s t r u c t u r e o b l i g a t o i r e 2? qui engendre entre les signes choisis et leurs relations, de nouvelles valeurs. En effet, dans le duel opposant sens infus et description critique d'un texte, ce n'est plus le sens qui donne l i e u a 1 'activitS- de description; c'est c e l l e - c i qui, en proposant une structure formelle, permet de dEcouvrir un sens. Aragon serait lui-meme d*accord la-dessus quand i l Scrit dans Je n'ai .jamais appris a Scrire ou les i n c i p i t : \"Je crois encore qu'on pense a partir de ce qu'on Scrit et non pas le contraire.\" (p. 1 3 ) . Une mise au point est nScessaire i c i au sujet de l a presence citSe d'Aragon, dit 1'auteur de La Mise a mort. Giter ses remarques faites dans un texte ecrit aprds La Mise a mort n*impose nullement Aragon comme createur absolu de ce dernier: c'est rSvSler son role d'initiateur, de celui qui commence sans connaitre son itinSraire, qui pense apr&s avoir Scrit; en f a i t , i l est celui qui prSpare le terrain pour l'ave-nement du sens et que le sens ya transporter au-dela de l u i -mfme. Done, le but ici-, n'est pas de faire colncider le texte de La Mise a mort avec les propos de 1'auteur (celui-ci sera pour nous a proprement parler, le scripteur) pour en faire dSgager un sens prSalable. La contribution de 1'auteur se fera en termes d'une decouverte apr§s coup, de procedes nar-r a t i f s qui ju s t i f i e r a 1'elaboration consciente d'une structure dans le roman d'Aragon et du f a i t que cette structure donnera un sens qui sera independant de l a volonte du scripteur. On 28 accordera done, au scripteur l e benefice d'une i n i t i a t i o n sans porter t o r t a l ' e c r i t u r e , c r e a t r i c e du sens. Pour revenir a Aragon: i l avoue avoir reve d'ecrire \"un roman qui ne s e r a i t qu'une phrase\" ou encore \"une phrase qui se s u f f i r a i t comme 3 roman.\" Le roman comme phrase ou l a phrase comme roman: c'est l a , cette v i s i o n d'une grammaire dans l e r e c i t qu'a epousee l a nouvelle c r i t i q u e . La Mise a mort se prete a une analyse structurale: i l l'exige meme. Toutefois, i l s'ecarte des autres r e c i t s a cau-s a l i t e evenementielle, des cantes folk l o r i q u e s par exemple, parce que les d i r e c t i v e s formelles de La Mise a mort ne seront pas relevees d'apres une c o r r e l a t i o n entre des evenements s i -tues dans une intrigue ou 1'action appartient a un personnagej l e s evenements dans La Mise a mort seront constitues par les phrases elles-memes, et ces mimes phrases serviront comme dir e c t i v e s formelles au texte. L'heureuse i n t u i t i o n de Todorov permettra d ' e c l a i r e r mieux ce point; dans \"Poetique structu-r a l e \" , i l mentionne l a p a r t i c u l a r i t e de 1*oeuvre de Raymond Roussel et e c r i t : \"Une oeuvre comme c e l l e de Roussel, par exemple, semble introduire l a causalite dans l a l i t t e r a l i t l meme du langage: ce ne sont plus des evenements qui sont provoques par des eve-nements, mais des mots par des mots. D'autres revelations nous attendent sans doute dans l ' a v e n i r . \" 9 Coincidence peut-etre: Aragon aussi s'interesse beau-coup a Roussel. II s e r a i t peut-etre pertinent de rappeler i c i 29 l'un des procedes u t i l i s e s par Roussel, ou, a p a r t i r de deux mots ressemblants t e l s que \" b i l l a r d \" et \" p i l l a r d \" , sont forgees deux phrases qui se l i s e n t comme s u i t : 1) Les l e t t r e s du blanc sur l e s bandes du vieux b i l l a r d ; 2) Les l e t t r e s du blanc sur l e s bandes du vieux p i l l a r d . Ges deux phrases ont donne\" forme, a l e u r tour, a l a genese d'un des ouvrages de Roussel': Impressions d'Afrique compose en 1910. Dans l a c i t a t i o n de Todorov, on a souligne \" l a c a u s a l i t y dans l a l i t t e r a l i t S meme du langage\" pour f a i r e r e s s o r t i r , outre l a - d i f f e r e n c e entre une h i s t o i r e t r a d i t i o n n e l l e \" ' ' ^ et une h i s t o i r e baste sur l a c o r r e l a t i o n entre l e s phrases-evenements, l e f a i t que dans 1'oeuvre de Roussel comme dans La Mise a mort, l e systeme semiotique premier du langage tend a c o l n c i d e r avec I ' a c t i v i t e symbolique du roman, de sorte qu'etudier l e r e c i t r e v i e n t a u s s i a e t u d i e r en premier l i e u , l e langage, et l a phrase comme u n i t e premiere et fondamentale du langage. C'est pour c e l a (et on l e v e r r a plus l o i n dans ce c h a p i t r e ) que l e s ca t e g o r i e s relevees dans l e r e c i t , s i e l l e s ne correspondent pas exactement aux categ o r i e s grammaticales chez Todorov, t r o u -veront par contre, l e u r s v a l e u r s et f o n c t i o n s premieres dans 1'etude de La Mise a mort. Concevoir l e r e c i t comme phrase: v o i l a l e premier pas vers une grammaire du r e c i t : 3 0 \" s t r u c t u r e l l e m e n t l e r E c i t p a r t i c i p e de l a phrase sans p o u v o i r j a m a i s se r S d u i r e a une somme de p h r a s e s : l e r E c i t e s t une grande p h r a s e , comme t o u t e phrase c o n s t a t i v e e s t d'une c e r t a i n e - maniSre, I'Sbauche d'un p e t i t r E c i t . \" H C e t t e c i t a t i o n de B a r t h e s r e n v o i e encore a Aragon q u i pose comme fondement a ses romans, l a phrase i n i t i a t r i c e ou 1 ' i n c i -p i t . M ais on t i e n t t o u t de s u i t e a p r E c i s e r que l a phrase q u i v a c o n s t i t u e r l e r E c i t de L a Mise a mort n ' e s t pas l a premie r e phrase du roman5 nSanmoins, c ' e s t a p a r t i r de 1 ' i n c i p i t que s'Sbauchera l a p h r a s e - r S c i t . A i n s i , 1'Etude du r E c i t comme phrase commencera avec 1'analyse de 1 ' i n c i p i t de L a Mise a mort; de 1 ' i n c i p i t s e r o n t .dSgagSs ces SISments q u i donneront l e s termes d'une p h r a s e . C e t t e p h r a s e - r S c i t f o r m u l S e , on p o u r r a e n s u i t e l ' a n a l y s e r sous forme s t r u c t u r a l e . L * i n c i p i t de L a Mi s e a mort s'annonee comme s u i t : \" I I l ' a v a i t d'abord appelEe Madame,et t o i l e meme s o i r , Aube au m a t i n . \" En elle-meme, c e t t e phrase semble ne comporter qu'un i n t E r e t a u t o b i o g r a p h i q u e a rSsonance p o E t i q u e ; mais comme l ' a e x p l i q u S Aragon rui-meme 1^, e l l e e s t i m p o r t a n t e a u s s i p a r c e q u ' e l l e E v e i l l e cbu;: coup l e s a u t r e s p h r a s e s s u i v a n t e s : \"Et p u i s deux ou t r o i s j o u r s i l e s s a y a de Z i b e l i n e , t r o u v a n t ga r e s s e m b l a n t . Je ne d i r a i pas l e nom que d e p u i s des annEes i l l u i donne, c ' e s t l e u r a f f a i r e . Nous suppos.erons q u ' i l a c h o i s i Fougdre. P o u r l e s a u t r e s , e l l e E t a i t I n g e b o r g , j e vous demande un p e u . \" i ^ 31 Situe\" aupres de ces a u t r e s p h r a s e s , 1 ' i n c i p i t l e u r c o n f e r e s o n s t a t u t o r i g i n e l ; a l e u r t o u r , c es p h r a s e s l u i donnent un sens p l u s complet e t l e s i t u e n t dans un c o n t e x t e d ' e c r i t u r e . I I s e r a i t done, p l u s p e r t i n e n t a n o t r e a v i s , de pren d r e comme l e p r e m i e r e l a n spontane\" de l ' e c r i t u r e , l e passage s u i v a n t : \" I I l ' a v a i t d'abord a p p e l t e Madame, e t t o i 'le meme s o i r , Aube au m a t i n . E t p u i s deux ou t r o i s j o u r s i l e s s a y a de .\"' Z i b e l i n e , t r o u v a n t 9a r e s s e m b l a n t . J e ne d i r a i pas l e nom que de p u i s des annees i l l u i donne, c ' e s t l e u r a f f a i r e . Nous supposerons q u ' i l a c h o i s i F ougere. Pour l e s a u t r e s , e l l e e t a i t I n g e b o r g , j e vous demande un peu.\" L a p r e m i e r e c a t g g o r i e g r a m m a t i c a l e q u i s'y m a n i f e s t e e s t c e l l e des pronoms p e r s o n n e l s : t o u t y e s t , de l a pr e m i e r e personne du s i n g u l i e r j u s q u ' a l a t r o i s i e m e personne du p l u r i e l - c e l l e - c i t t a n t d t s i g n t e p a r l e p o s s e s s i f \" l e u r \" - - ( J e , t o i , i l , e l l e , nous, vous, l e u r ) . Ces pronoms o f f r e n t une s i t u a t i o n en t r o i s personnes q u i e s t c e l l e de l a communication elle-meme. I I y a une personne q u i p a r l e : c ' e s t \" J e \" . C e t t e personne p a r l e a une a u t r e q u i e s t \"vous\". L a 2eme personne ( s i n g u l i e r ou p l u r i e l ) 1 ^ e s t c e l l e que l a l e r e personne d a i g n e a v o i r l e p l u s p r e s d ' e l l e . De p l u s , l a 2eme personne dans ce p r e m i e r passage ( c i t e p l u s haut) s u b i t ou:.'recoit 1 ' a c t i o n du \" J e \" : \" t o i \" dans \" e t , ( a p p e l e e ) t o i l e meme s o i r \" e t \"vous\" dans \" j e vous demande un peu\". Done, \" J e \" p a r l e a \"vous\". S ' e t a b l i s s e n t i c i deux des t r o i s personnes q u i c o n s t i t u e n t un systeme de communicationj 32 l a 3§me personne y est aussi: c'est celle dont on parle, c'est-a-dire, les pronoms \" i l \" , \" elle\", \" l u i \" , qui ont entre eux-memes etabli un rapport situe\" sur un niveau teraporel d i f -ferent ( \" i l l'avait appelEe\"; \" i l essaya de\"; \"qu'il a choi-s i \" ; \"elle etait\") de celui ou se placent l a personne qui parle et son interlocuteur (\"je ne dirai pas\"; \"nous suppo-serons\"; • \"je vous demande\"). Ces pronoms dEsignant l a 3eme personne peuvent aussi etre resume's sous un terme plus ou moins abstrait t e l que \"anecdote\" ou \"histoire\" puisqu'ils sont contEs par un \"Je\" a un \"Vous\". Le proc§s Stabli dans une communication est celui de \"parler\". Ce proces est i c i transpose pour dEfinir le rapport entre \"Je\" et \"Vous\". Comment ces deux personnes communiquent-elles? Dans ce meme passage du debut, les verbes accompagnant l a premidre personne: \" d i r a i \" ; \"supposerons\"; et \"demande\" expriment l a parole, l'hypothdse et l'echange. Au proces sim-ple de parler s'ajoute un prolongement etabli par une supposi-tion et une demande de participation. On remarque aussi l a presence des noms propres qui rEvele l' a c t i v i t e de nommer et de faire paraitre le miroitement multiple de personnalites chez un seul etre. Cet acte de nommer est propre a un createur. On propose done, que le proces releve dans ce passage soit celui 16 de \"raconter\". 33 V o i c i d e f i n i s l e s termes de l a phrase q u i s e r a n o t r e r e c i t : J e r a c o n t e une h i s t o i r e a vous. T T T S u j e t Verbe c . d ' o b j e t d i r e c t c . d . i n d i r e c t Ou mieux en c o r e , l a phrase s e r a : J e vous r a c o n t e une h i s t o i r e . I c i , l e rapprochement du \"vous\" aupres de \" J e \" s ' e x p l i q u e p a r une c o n s t r u c t i o n g r a m m a t i c a l e p l u s a cceptSe c a r l a prepo-s i t i o n \"a\" du complement d ' o b j e t i n d i r e c t y joue un r o l e s i f a i b l e q u ' e l l e s * e f f a c e . Ce rapprochement s e r a d ' a i l l e u r s , j u s t i f i e \" p a r l a c o n s t a n t e i n t e r p e l l a t i o n a \"vous\" p a r l e s c r i p -t e u r dans L a M i s e a mort. On s a i t que l e verbe e s t l e p i v o t de l a p h r a s e . I I engendre deux r a p p o r t s p r e m i e r s avec l e s u j e t e t l e complement d ' o b j e t d i r e c t : 1° l e r a p p o r t s u j e t - v e r b e 2° l e r a p p o r t v e r b e - c . d ' o b j e t d i r e c t . Ces deux r a p p o r t s se t r o u v e n t dans L a M i s e a mort: a)| S u j e t t ^ V e r b e J e ^ = ; r a c o n t e Verbe* >c. d ' o b j e t d i r e c t r a c o n t e < vune h i s t o i r e 3k Deux a u t r e s r a p p o r t s s o n t a u s s i p r e s e n t s dans ce roman: c) l e r a p p o r t e n t r e s u j e t e t c . d ' o b j e t d i r e c t : Je< j i m e h i s t o i r e d) l e r a p p o r t e n t r e s u j e t e t c . d ' o b j e t i n d i r e c t : Je< ^ vous Ces q u a t r e r a p p o r t s e t a b l i s s e n t a l e u r t o u r , l ' e t r e e t l e pr o c e s L ' e t r e , s u r l e p l a n du l a n g a g e , engendre l e s especes 18 n o m i n a l e s : l ' u n e d ' e l l e s e s t l a c l a s s e des pronoms •. Quant au p r o c e s , i l se d S f i n i t p a r ses c a t e g o r i e s . A i n s i , dans l e monde t e x t u e l de L a Mise a mort, l ' e t r e e t l e p r o c e s nous a p p a r a i s s e n t sous forme de r a p p o r t s e n t r e l e s termes de l a phrase-re\"c i t : 1'etude du c a r a c t e r e de t e l ou t e l personnage cede l a p l a c e a c e l l e des pronoms dans l e r e c i t ; ces d e r n i e r s d e v o i l e r o n t a u s s i l e j e u e t a b l i e n t r e eux. L a communication e n t r e l e s pronoms (\"Je\" e t \"vous\") s ' e f f e c t u e au moyen d'un echange a c t i f q u ' e s t l e p r o c e s de \" r a c o n t e r \" . Ce p r o c e s , une f o i s mis en r a p p o r t avec l e s a u t r e s Elements de l a phr a s e , d o i t e t r e \" p r e c i s e e t l o c a l i s e ' \" . C'est. l a c a t t g o r i e de l a v o i x q u i met l e verbe \" r a c o n t e \" en r a p p o r t avec l e s u j e t ; i l y a d'abord un r a p p o r t du s u j e t au v e r b e : J e > r a c o n t e . 35 L * i n v e r s e du r a p p o r t , c ' e s t - a - d i r e , du verbe au s u j e t , e s t t o u t a u s s i p r e s e n t que l e r a p p o r t p r e m i e r : Je s u i s r a c o n t e Pour e t r e p r e c i s e \" e t l o c a l i s e , l e p r o c e s s e r a etudie sous l e s c a t e g o r i e s de 1'aspect q u i re n d compte de son d e v e l o p -pement, e t du temps q u i i n d i q u e a q u e l moment i l a l i e u . L a c a t e g o r i e du mode t r a i t e r a de l a r e a l i s a t i o n du p r o c e s . Le r a p p o r t e n t r e \" r a c o n t e \" e t \"une h i s t o i r e \" s'etablit p a r c e que l e p r o c e s d o i t a b o u t i r a quelque chose, pour e t r e c o m p l e t . Le complement d \" o b j e t d i r e c t e s t ce p o i n t d'aboutissement sans e t r e t o u t e f o i s , une f i n en lui-meme: i l se definit p a r l e s a u t r e s termes de l a p h r a s e . A u s s i , l e j e u e n t r e l a l e r e p e r -sonne \" J e \" e t l e s a u t r e s pronoms f i g u r a n t t e l s des personnages dans \"une h i s t o i r e \" s e r a l a base de l a r e l a t i o n e n t r e l e s u j e t e t 1 ' o b j e t du p r o c e s . L a p h r a s e - r e c i t de L a Mise a mort se p r e t e done a une a n a l y s e g r a m m a t i c a l e . Mais on ne d o i t pas e c a r t e r l e r e c i t t e l q u ' i l se p r e s e n t e . Comment r a p p r o c h e r l e r e c i t lui-meme de ce p o i n t de vue gr a m m a t i c a l ? Au moyen d'une a n a l y s e s t r u c -t u r a l e comme l ' a propose B a r t h e s . De ce f a i t , 1 ' a n a l y s e de L a Mise a mort s e r a a l a f o i s g r ammaticale e t s t r u c t u r a l e . On t i e n t a r a p p e l e r a^ce p o i n t que l a r i c h e s s e du roman a n a l y s e ne s e r a pas diminuee p a r une d e l i m i t a t i o n t h e o r i q u e ; au con-t r a i r e , c e t t e r i c h e s s e se r e v e i e r a de p l u s b e l l e p a r c e qu'en 36 f a i t , l a d e l i m i t a t i o n e s t un germe pour l e deVeloppement d'un sens i n f i n i m e n t p l u s r i c h e , p l u s complexe, p l u s v a l a b l e , q u i ne d o i t pas n S c e s s a i r e m e n t e t r e c e l u i v o u l u p a r 1 ' a u t e u r . On se s o u v i e n t que B a r t h e s q u i c r o i t a une \" s t r u c t u r e a c c e s s i b l e a 1 ' a n a l y s e \" du r e c i t , a essaye\" d'en f o u r n i r l e s p r e m i e r s Elements pour une t h E o r i e ^ , n a d'abord d i s t i n g u E t r o i s n i v e a u x de d e s c r i p t i o n dans l e r e c i t : 1 ° l e n i v e a u des f o n c t i o n s ; 2 ° l e n i v e a u des a c t i o n s ; 3 ° l e n i v e a u de l a n a r r a t i o n . Le p r e m i e r n i v e a u t r a i t e des u n i t e s de contenu dans l e r E c i t q u i s o n t r e l e v S e s au moyen d'une c o r r e l a t i o n e n t r e e l l e s ; 2 0 l e deuxieme n i v e a u t r a i t e des p e r s o n n a g e s - a c t a n t s e t l e t r o i s i e m e de l a n a r r a t i o n (ou de l ' S c r i t u r e proprement d i t e ) . Dans l e cas de L a M i s e a mort, 1 ' E c r i t u r e se m a n i f e s t e sous l e s t r o i s n i v e a u x r e l e v E s chez B a r t h e s : e l l e e s t a l a f o i s , f o n c t i o n , p e r s o n n a g e - a c t a n t e t (pour h a s a r d e r une t a u t o -l o g i e ) n a r r a t i o n . I I y a a i n s i c o i n c i d e n c e des t r o i s n i v e a u x b a r t h S s i e n s en un s e u l : on a c h o i s i de ne r e t e n i r que ce s e u l n i v e a u dans 1 ' E t u d e de L a M i s e a mort e t ce n i v e a u e s t c e l u i des f o n c t i o n s . Ce f a i s a n t , i l e s t E v i d e n t qu'on n ' S c a r t e n i l e n i v e a u des p e r s o n n a g e s - a c t a n t s n i c e l u i de 1 ' E c r i t u r e : 1 ' E t u d e de ces n i v e a u x e s t t o u t simplement i n t S g r S e dans c e l l e du n i v e a u des f o n c t i o n s . P a r a i l l e u r s , on E v i t e une c e r t a i n e redondance dans 1 ' a n a l y s e des Elements s t r u c t u r a u x du roman. 3 7 Barthes a aussi re l e v t quatre types de fonetions: 1° l e s fonetions cardinales; 2° les fonctions catalyses; 3 ° l e s indices; 4 ° l e s informants. Les fonctions cardinales et l e s indices constituent l e s deux grandes classes: l'une ( c e l l e des cardinales) renvoyant a 21 un niveau d i s t n b u t i o n n e l , et ayant comme sous-classe, l e s catalyses; et 1*autre ( c e l l e des indices) a un niveau i n t e -22 g r a t i f , ayant comme sous-classe, l e s informants. Cette d i s t i n c t i o n entre l e s deux grandes classes de fonctions se d e f i n i t aussi, d'apres Barthes, par l e f a i t que l e s fonctions correspondent au proces et l e s indices a l ' e t r e tandis que les informants renvoient au temps et a l'espace. Encore une f o i s , on c h o i s i r a d'Studier La Mise a mort sous 1'angle des fonctions settlement, c'est-a-dire, des car-dinales et des catalyses. La raison d'un t e l choix peut paraitre ose\"e, mais toutefois, j u s t i f i e d par un aspect impor-tant du re\"cit (qui sera d ' a i l l e u r s demontrS dans l e s chapitres suivants): c'est que La Mise a mort ne renvoie pas a des concepts p r t e t a b l i s du caractere d'un personnage n i d'une atmosphere. Le temps et l'espace i c i , se prSsentent comme ceux du texte. Aragon lui-meme les concoit comme t e l s et t c r i t dans une de^ses prefaces: 38 \"Comme du temps t o u t c o u r t nous- avons, nous a u t r e s p e u p l e s o c c i d e n t a u x , une r e p r e s e n t a t i o n l i n E a i r e , j ' a i du temps que j ' i n v e n t e , du temps romanesque, une r e p r e s e n t a t i o n s p a t i a l e . M a i s pas p l u s l ' e s p a c e que l e temps n ' e s t i c i l ' e s p a c e r e e l . L'espace n ' e s t pas le-monde, mais l e l i v r e . C ' e st (...) un e s p a c e - p a p i e r . Dans c e t e s p a c e - p a p i e r , l e temps c o u l e avec une v i t e s s e v a r i a b l e , ce temps que nous appe-l o n s l e temps romanesque e t q u i e s t l ' a c t i v i t e de 1'espace-p a p i e r , s i j e p u i s d i r e . C 'est s u i v a n t ce temps i n v e n t s que se d i s p o s e , se d S r o u l e - l e r E c i t . \" 2 3 I I n'y a pas d ' a u t r e c o n c e p t a u q u e l r e n v o i e L a M i s e a mort que l e l i v r e meme en t r a i n de s ' E c r i r e . En d ' a u t r e s mots, l e s \" c o n c e p t s \" de personnage, de temps, de l ' e s p a c e s o n t i n t S -g r S s dans l e r e c i t : i l s f o n t p a r t i e du r E c i t . Pour c e l a , i l s ne peuvent e t r e des e n t i t S s indSpendantes dans l e s q u e l l e s on p u i s e r a des i n d i c a t i o n s s u r l e s elements du r E c i t . Ces con-c e p t s e n t r e t i e n n e h t en t a n t q u ' u n i t S s du t e x t e , une r e l a t i o n h o r i z o n t a l e e t non v e r t i c a l e avec l e s u n i t E s de contenu dans l e t e x t e : en e f f e t , i l s f o n t p a r t i e de ce q u i e s t r a c o n t E dans L a Mise a mort ou, comme dans un c e r c l e h e r mStique, i l s p e r d e n t l e u r q u a l i t S a b s t r a i t e de \"c o n c e p t s \" pour d e v e n i r p l u s concretement des elements du r e c i t q u i se rEpondent e t se d S f i -n i s s e n t e n t r e eux. Quant aux i n d i c e s , i l s s e r o n t S c a r t S s de c e t t e a n a l y s e , mais l a f o n c t i o n n a l i t S de l ' e t r e q u ' i l s r e p r S -s e n t e n t chez B a r t h e s s e r a i c i S t u d i E e p a r r a p p o r t a c e l l e du proc§s, t e l qu'on l ' a S t u d i S dans 1'analyse g r a m m a t i c a l e de l a phrase-r£cit R e d S f i n i s s o n s n o t r e b u t : c e l u i d'une a n a l y s e s t r u c t u -r a l e , e t nos termes. L a Mise a mort s e r a sounds a une a n a l y s e 39 des f o n c t i o n s c a r d i n a l e s e t des f o n c t i o n s c a t a l y s e s . Une f o n c t i o n dans L a M i s e a mort e s t une u n i t e de con-t e n u q u i se p r e s e n t e comme l e terme d'une c o r r e l a t i o n , e t ou 1 ' a c t i o n d e v o i i e e e s t c e l l e de l ' e c r i t u r e . Une f o n c t i o n e s t c a r d i n a l e dans L a M i s e a mort quand e l l e m a i n t i e n t l a c o r r e l a t i o n q u i s'etablit e n t r e l e s u n i t e s t r a i t a n t de 1 ' a c t i o n de l ' e c r i t u r e . Une f o n c t i o n e s t c a t a l y s e quand e l l e se t r o u v e en c o r -r e l a t i o n avec une c a r d i n a l e , mais joue un r o l e p l u s f a i b l e que c e l l e - c i , dans l e d e v o i l e m e n t de 1 ' a c t i o n de l ' e c r i t u r e . P a r c o n t r e , e l l e a une e x p a n s i o n p l u s l a r g e e t se r t v e i e r a impor-t a n t e dans 1 ' e t u d e de l a f o n c t i o n n a l i t e de l ' e t r e , du temps e t de l ' e s p a c e . I I r e s t e m a i n t e n a n t , a f a i r e c o r r e s p o n d r e 1 ' e t u d e gram-m a t i c a l e de l a p h r a s e - r e c i t a c e l l e s t r u c t u r a l e du r e c i t de L a Mise a mort. Les f o n c t i o n s c a r d i n a l e s p e r m e t t r o n t d ' e t u d i e r 1 ° l e r a p p o r t e n t r e \" J e \" e t \"vous\"; 2 ° l a r e l a t i o n e n t r e \" J e \" ( s u j e t ) e t \" r a c o n t e \" ( p r o c e s ) ; 3° l e s c a t e g o r i e s du p r o c e s : 1 ' a s p e c t , l e mode, l a v o i x , l e i t e m p s . Les f o n c t i o n s c a t a l y s e s donneront une a n a l y s e de l ' o b -j e t p a r r a p p o r t aux a u t r e s termes de l a p h r a s e - r e c i t . Cet ko o b j e t e s t ce q u i e x p l i c i t e l a communication e n t r e \" J e \" e t \"vous\". R S s u l t a t du p r o c e s de \" r a c o n t e r \" , 1'objet s e r a S t u -die\" sous ,les a s p e c t s s u i v a n t s : * i - 0 l e - r a p p o r t e n t r e l e p r o c e s ( r a c o n t e ) e t 1'objet (une h i s t o i r e ) ? 5° l a f o n c t i o n n a l i t S de l ' e t r e : r e l a t i o n s e n t r e \" J e \" e t \"une h i s t o i r e \" ; \"vous\" e t \"une h i s t o i r e \" ; 6° temps e t espace. On ne d o i t pas o u b l i e r que t o u t e c e t t e Etude repose a u s s i s u r une t e n t a t i v e . p o u r r e d S f i n i r l e r S a l i s m e . Le t a b l e a u s u i v a n t donnera une i d S e p l u s s t r u c t u r S e de 1'approche a p p l i q u S e a L a Mi s e a mort: GRAMMAIRE DU RECIT POUR .\"LA MISE A MORT\" Phrase-r£cit ^ Je vous r a c o n t e une h i s t o i r e Y r . ^ / Y y F o n c t i o n s c a r d i n a l e s v c a t a l y s e s r *s V -i o T Y 1 J e vous V k° r a c o n t e h i s t o i r e 2° J e r a c o n t e 5° L ' e t r e ( n a t u r e C a t e g o r i e s g r annua t i c a l e s 3° Le proces::.ra-c onte -1'aspect e t f o n c t i o n ) .. J e h i s t o i r e Vous h i s t o i r e - l e temps 6° Temps e t espace - l e mode r - l a v o i x . • Y V e r s une r e d e f i n i t i o n du r t a l i s m e Grammaire e t s t r u c t u r e se conjuguent dans L a M i s e a mort. P a r l a , se j u s t i f i e une grammaire du r£cit, de ce roman ou e l l e ne se v e u t pas seulement f o r m u l a i r e de r e g i e s , mais a u s s i g e n e r a t r i c e de sens. k-z Sequence: Un groupe de p r o p o s i t i o n s est appelS NOTES Roman Jakobson, E s s a i s de l i n g u i s t i q u e gSnSrale ( P a r i s : Ed. de mi n u i t , 1 9 6 3 ), p. 2 ? . 2 Grammaire: P. Guiraud dans La Grammaire (Que s a i s - j e ? ) S c r i t : \"La grammaire est 1'art q u i enseigne a S c r i r e et a p a r l e r correctement j e l l e c o d i f i e et Sd i c t e 1 'en-semble des r e g i e s f a i s a n t a u t o r i t S dans un p a r l e r donnS...\" (p. 5 ) . 3 Gerard Genette, Figures I I I ( P a r i s : S e u i l , 1 9 7 2 ) , P. 7 5 . sSquence. -5 Gerard Genette, Figures I I I . ^ Norman Friedman, \"Point of view i n f i c t i o n , \" PMLA, 7 0 , dSc. 1955 , pp-V 1161 - 8*1-. ' Roland Barthes, \"Introduction>ja 1 'analyse s t r u c t u -r a l e des r e c i t s , \" Communications, 8 , p. 3« Q Louis Aragon, Je n ' a i jamais a p p r i s a e c r i r e ou l e s i n c i p i t (Geneve: S k i r a , 1 9 6 9 ), pp. 96 - 97• ^ Tzvetan Todorov, \"Poetique s t r u c t u r a l e , \" Qu'est-ce que l e s t r u c t u r a l i s m e ? ( P a r i s : S e u i l , I 9 6 8 ), p. 1 3 2 . 1 0 T r a d i t i o n n e l l e ; : V o i r note n° 10 a 1' I n t r o d u c t i o n de c e t t e these, p. 7-1 1 Roland Barthes, op. c i t . , p. k. 12 P h r a s e - r e c i t : Ce terme implique l a r e c i p r o c i t e entre phrase et r e c i t : l a phrase porte en e l l e un r e c i t ; c e l u i - c i se prSsente sous forme d'une phrase. On maintiendra, desormais, 1'usage de ce terme. 13 J Louis Aragon, op. c i t . , pp. 119 - 2 1 . Louis Aragon, La Mise a mort, C o l l . ORC, p. 1 3 . k3 Les grammairiens f o n t meme une d i s t i n c t i o n e n t r e ces deux: \" t u \" e s t b i e n p l u s r a p p r o c h e de \" J e \" que \"Vous\". Ce d e r n i e r peut s e r v i r a c r e e r une p l u s grande d i s t a n c e e n t r e l a 2eme personne e t \" J e \" . R a c o n t e r , c ' e s t d t j a i n v e n t e r , c r e e r p a r une mise en p a r o l e s ou en mots. 17 ' Dans Grammaire s t r u c t u r a l e ( P a r i s : C h a r l e s -L a v a u z e l l e , 1 9 7 1 ) , G. G a l i c h e t d t c r i t l ' e t r e e t l e p r o c e s comme \"deux elements e s s e n t i e l s e t d ' a i l l e u r s c o m p l t m e n t a i r e s q u i c o n s t i t u e n t l a trame du monde t e l q u ' i l nous a p p a r a i t . \" (p. 1 7 ) . 18 G. G a l i c h e t , op. c i t . , p. \" q u i j o u i s s e n t du moins,de t o u t e s l e s v a l e u r s e t p r o p r i t t e s g r a m m a t i c a l e s du nom.\" Ro l a n d B a r t h e s , \" I n t r o d u c t i o n a I ' a n a l y s e s t r u c t u -r a l e des r e c i t s \" . 20 P e r s o n n a g e s - a c t a n t s : des personnages se d S f i n i s s a n t p a r l e u r s f o n c t i o n s . 21 N i v e a u d i s t r i b u t i o n n e l : n i v e a u ou une u n i t e \" r e n -v o i e a un a c t e complementaire e t consequent\", p a r exemple, \" 1 * a c h a t d'un p i s t o l e t a pour c o r r e i a t l e moment ou l ' o n s'en s e r v i r a . \" ( B a r t h e s , op. c i t . , p. 8 ) . 22 N i v e a u i n t e g r a t i f : n i v e a u c o n s i s t a n t \" d ' i n d i c e s c a r a c t e r i e l s c o n c e r n a n t l e s personnages, i n f o r m a t i o n s r e l a -t i v e s a l e u r i d e n t i t e , n o t a t i o n s d'atmosphere e t c . \" . ( B a r t h e s , op. c i t . , p. 8 - 9 ) . 23 J L o u i s Aragon, \"La s u i t e dans l e s i d e e s , \" L e s Beaux q u a r t i e r s ( P a r i s : L a f f o n t , 1965) , v o l . I I , pp.1 11 - ^ 6 . 7h Aux pages 33-3^ de d e t t e t h e s e . CHAPITRE III Les fonctions cardinales dans \"La Mise a mort\" Dans ce chapitre, on prSsente 1'analyse dStaillSe du rEcit de La Mise a mort faite au moyen des fonctions cardi-nales. Le chapitre suivant continuera cette analyse avec les fonctions catalyses. La longueur de ce Jbme chapitre explique l a presence des rubriques qui l u i donneront, on l'espere, une cohSrence plus structurSe et plus clair e . Bien qu'il s'agisse i c i d'ana-lyse dEtaillEe, on a cru nEcessaire de semer de part et d'autre quelques definitions de nature gEnErale: ainsi, sous l a pre-miere rubrique, on a donnE une definition approfondie de l a fonction cardinale et on a souligne davantage l a coincidence entre 1'Etude grammaticale de l a phrase-rScit de La Mise a mort et 1*Etude structurale du rEcit proprement d i t . Une-liste des fonctions cardinales permettra a 1'analyse de s'orienter dans les directions suivantes: l a classification des fonctions car-dinales en sequences et micro-sequences qui seront aussi dEfi-nies et prEsentEes en termes de chiffres, l a nomination de ces JJ4 k5 sequences e t mi c r o - s e q u e n c e s , l'examen en p r o f o n d e u r de chaque sequence e t micro-sequence e t f i n a l e m e n t , un e f f o r t de s y n t h a s e . L a f o n c t i o n c a r d i n a l e ou l e noyau'*': Une f o n c t i o n dans L a M i s e a mort a ete\" d t f i n i e comme une u n i t t de contenu q u i se p r t s e n t e comme l e terme d'une c o r -r e l a t i o n , ou l ' e c r i t u r e f a i t 1 ' a c t i o n . E l l e e s t c a r d i n a l e quand e l l e m a i n t i e n t c e t t e c o r r e l a t i o n e n t r e e l l e e t l e s a u t r e s f o n c t i o n s q u i l a p r e c e d e n t ou l a s u i v e n t . P u i s q u e l e r e c i t de L a M i s e a mort e s t a v a n t t o u t c e l u i de l ' e c r i t u r e , l e s noyaux s e r o n t ces u n i t e s n a r r a t i v e s q u i de-noncent l a presence d'un s c r i p t e u r a s a t a c h e . L a p r e m i e r e u n i t e n a r r a t i v e de L a Mise a mort e s t : \" I I l ' a v a i t d'abord a p p e i e e Madame, e t t o i lememe s o i r , Aube au m a t i n . E t p u i s deux ou t r o i s j o u r s i l e s s a y a de Z i b e l i n e , t r o u v a n t c a r e s s e m b l a n t . J e ne d i r a i pas l e nom que d e p u i s des annees i l l u i donne, c ' e s t l e u r a f f a i r e . Nous sup-poserons q u ' i l a c h o i s i Fougere. Pour l e s a u t r e s , e l l e etait I n g e b o r g , j e vous demande un peu.\" E l l e denonce l a presence de quelqu'un q u i d i t \" J e \" e t q u i r a c o n t e une h i s t o i r e - pas en termes de p a r o l e s , mais de mots apposes s u r p a p i e r . Ce p r e m i e r noyau ouvre 1 ' a c t i o n de L a Mi s e a mort. Ce \" J e \" q u i e c r i t s e r v i r a d'element de c o r -r e l a t i o n pour l e r e l e v e des a u t r e s noyaux du t e x t e : on en a r e l e v e Ikk, noyaux q u i a chaque f o i s r e m e t t e n t en presence k6 t e x t u e l l e l ' a c t e du s c r i p t e u r . De q u o i se compose un noyau de L a Mise a mort? J u s q u ' a m a i n t e n a n t , on a vu que noyau, f o n e t i o n c a r d i n a l e , u n i t e n a r -r a t i v e r e n v o i e n t a une s e u l e e t meme n o t i o n . A j o u t o n s un qua-t r i e m e terme: p r o p o s i t i o n . Une f o n e t i o n c a r d i n a l e e s t a u s s i une P r o p o s i t i o n . E l l e e s t u n i t e n a r r a t i v e e t ne c o i n c i d e pas ne c e s s a i r e m e n t avec une p r o p o s i t i o n g r a m m a t i c a l e q u i e s t une u n i t e l i n g u i s t i q u e , mais peut en comporter p l u s i e u r s - d e c e t t e d e r n i e r e . Le p r e m i e r noyau de L a Mi s e a mort p a r exemple, c o n t i e n t c i n q p r o p o s i t i o n s g r a m m a t i c a l e s . A u s s i l e s a u t r e s noyaux p e u v e n t - i l s e t r e de t a i l l e s d i v e r s e s sans que c e l a n u i s e a l e u r d e f i n i t i o n p r e m i e r e , c a r c ' e s t ce q u i l e s l i e ensemble q u i l e s d e t e r m i n e e t non pas l e u r d i m e n s i o n n i l e u r i m p o r t a n c e . Renvoyons a B a r t h e s s u r l a n a t u r e des f o n c t i o n s c a r d i n a l e s : \"Les f o n c t i o n s s e r o n t r e p r e s e n t e e s t a n t o t p a r des u n i -tes s u p e r i e u r e s a l a phrase (groupes de ph r a s e s de t a i l l e s d i v e r s e s , j u s q u ' a l ' o e u v r e dans son e n t i e r ) t a n t o t i n f e r i e u r e s ( l e syntagme, l e mot, e t meme dans l e mot seulement c e r t a i n s elements l i t t e r a i r e s ) . \" 2 Dans l e c h a p i t r e p r e c e d e n t , on a vu que 1 ' e t u d e s t r u c -t u r a l e de L a Mise a mort s o u s - t e n d 1 *etude g r a m m a t i c a l e de l a p h r a s e - r S c i t ; l e schema s u i v a n t montre l a c o i n c i d e n c e e n t r e ces deux a s p e c t s de 1 *etude: il k7 P h r a s e - r e c i t < ^ J e vous r a c o n t e une h i s t o i r e r * i Le r t c i t de / V V L a M i s e a \\ F o n c t i o n s c a r d i - F o n c t i o n s mort \\ n a l e s ou noyaux c a t a l y s e s C e t t e c o i n c i d e n c e e s t i m p o r t a n t e dans l a mesure ou e l l e d e r o u l e l e t r a j e t e n t r e un p r o c e s en p u i s s a n c e e t un p r o -ces r e a l i s t . I I y:.a d'abord, un mode du r t c i t a a n a l y s e r . L a p h r a s e - r e c i t \"Je vous r a c o n t e une h i s t o i r e \" renferme une t e n -t a t i v e de communication: e l l e o f f r e l ' a c t e de communiquer dans s a p o s s i b i l i t y de s ' a c c o m p l i r . Mais c ' e s t en t t u d i a n t l e r t c i t sous l e s noyaux e t l e s c a t a l y s e s qu'on s a u r a s i l ' a c t e s ' e s t a c c o m p l i . L ' a n a l y s e s t r u c t u r a l e p e r m e t t r a de s u i v r e l e dtveloppement du v i r t u e l a l a r e a l i s a t i o n , du d t s i r de commu-n i q u e r a l a communication elle-meme, ou a l a non-communication: c e t t e a n a l y s e s e r a en d ' a u t r e s termes c e l l e de 1 ' a s p e c t du r e c i t . L a M i s e a mort e s t done, l ' h i s t o i r e d'une t e n t a t i v e de communication e n t r e l e s c r i p t e u r e t son l e c t e u r ^ au moyen de k l ' t c r i t u r e . L a p h r a s e - r t c i t pose l e s termes de l a communica-t i o n : l ' e m e t t e u r , l e r t c e p t e u r , l e message, e t l e code.-^ L ' t m e t t e u r , c ' e s t l e s c r i p t e u r , l e \" J e \" de l a p h r a s e - r t c i t ; l e r t c e p t e u r , c ' e s t \"Vous\" avec l e q u e l l e s c r i p t e u r t e n t e de ij-8 communiquer. Le message est ce que l'Emetteur veut faire par-venir au rScepteur: dans notre phrase-rScit, c'est \"une his-toire\" tandis que le code est le moyen utilise\" pour faire parvenir ce message. Les noyaux du rEcit sont aussi ces unitSs narratives ou l'Emetteur essaie d'Stablir un rapport avec son rScepteur au moyen d'un code. Ils sous-tendent 1'Etude de l a premiere par-ti e de l a phrase-rScits Phrase-rEcit 3 8 ) . 2 7 . Le sang me quitte qui bat sous l a peau transparente du chant. Qu'est-ce que je dis? Ce sont l a des choses insensSes. (vol. 33» P« ^ 0 ) . 28. Ah, brouillons les cartes, i l ne s'agit pas de cela. (vol. 3 3 , P. ^ 3 ) . 2 9 . Entre nous, moi, je le trouvais plutot l a i d , Michel: (vol. 3 3 , p. W . 53 3 0 . E n f i n j ' e n r e v i e n s au 18 j u i n 1 9 3 6 . Devant 1* \"oussadba\". ( v o l . 3 3 . P. 5 D . 3 1 . Pour y r e v e n i r . ( v o l . 3 3 , p. 5 2 ) . 3 2 . ... j e nous v o i s dans ce cheminement, j e ne p u i s t r o p b i e n l e s i t u e r . ( v o l . 33» P« 54-). 33« Toutes l e s images se b r o u i l l e n t dans ma t e t e . ( v o l . 3 3 , P. 5 5 ) . 34-. Remarquez, j e ne l ' a i m a i s guere, G i d e , mais ... t o u t de meme, du p o i n t de vue f r a n c a i s , c'etait un S c r i v a i n impor-t a n t , c ' e s t s u r . ( v o l . 3 3 , P« 5 5 ) . 35* Oh, t o u t d'abord j e ne v o u l a i s meme pas y v e n i r , a c e t ente r r e m e n t , e t p u i s vous s a v e z , moi, j e ne t i e n s pas beaucoup a f r e q u e n t e r l e s h u i l e s , n ' a l l e z pas penser que j ' S t a i s v e x t de ne p l u s me t r o u v e r aux p l a c e s d'honneur. Mais c e l a se f a i s a i t s i b i z a r r e m e n t , s i ... j e ne s a i s pas. ( v o l . 3 3 , p. 6 1 ) . 3 6 . Q u e l l e s s o n t l e s l i m i t e s du r e a l i s m e ? De t o u t e f a c o n , l e dSmon de l ' a n a l o g i e n'a r i e n a f a i r e avec l u i . J e me s o u v i e n s a u s s i beaucoup p l u s t a r d , a N i c e , pendant 1 'oc-c u p a t i o n , j'etais a l i e i c a l a g a r e , p a r c e que j ' a t t e n d a i s ma \" l i a i s o n \" . . . t i e n s , comme l e s mots v a r i e n t . Ma l i a i -s on etait a v o c a t a l a c o u r de P a r i s , s i vous v o u l e z s a v o i r . ( v o l . 3 3 , p. 6 1 ) . 3 7 . Nous avons su seulement que j u s q u ' a l a g u e r r e , j e veux d i r e l a g u e r r e l a - b a s , c ' e s t - a - d i r e , jusqu'en j u i n 194-1 e l l e h a b i t a i t au M e t r o p o l e . ( v o l . 3 3 , p. 6 8 ) . 3 8 . Qu'est-ce que vous v o u l e z que j e v o i e quand j e r e g a r d e l a g l a c e ? ( v o l . 3 3 , p. 6 8 ) . 3 9 . P o u r q u o i c e t t e l e t t r e s u i v r a i t - e l l e f i d e l e m e n t l a chrono-l o g i e du r t c i t , d'un r e c i t q u i r a c o n t e des f a i t s de 1 9 3 9 , mais n ' e s t pas e c r i t en 1 9 3 9 . ( v o l . 3 3 , p. 7 3 ) . 4-0. Et q u o i de p l u s , j e t ' e c r i s , Fougere. ( v o l . 3 3 , p. 7 3 ) . 4-1. J e t ' e c r i s , n ' e s t - c e pas t o u t d i r e ? Tout n ' e s t , que j ' e c r i s , qu'une l e t t r e , une l e t t r e sans f i n v e r s t o i . ( v o l . 3 3 , P. 74-). ,5k k2. Et done, ceci te soit ma lettre, au jour l a nuit, sans cesse a quoi s'ajoute un peu de ce qui ne passe point l a levre, de ce qui bat dans les mots tus, et que les mots, dits mal, trahissent. (vol. 33, p. 7k). kj>. Ah, laissons l a Tatiana, Pouchkine ... (vol. 33, p. 75). kk. Vous demandez qui parle, ou moi, ou l u i ... (vol. 33» p. 80). k5. Me pardonneras-tu, Fougere, d'Scrire, de t'Ecrire avec meme confusion? (vol. 33» P« 81). k6. Et pour en revenir a 1'apologue du boxeur, (vol. 33» p. 82). k7. \"Mais ou done mon rEcit s'embrouille...\" 0% se perd. Ou se casse. (vol. 33. P' 89). *4-8. Mais i l ne s'agit pas de moi ni de comment f i n i r ce vaga-bondage, c'Stait seulement pour dire que je n'avais pas 23 ans. (vol. 33, p. 90). ^9. Je vous dis qu'il ne s'agit pas de moi. (vol. 33. P« 91)• 50. Mais i l ne s'agit pas de moi, je vous dis (vol. 33» '• -p. 91). 51. Enfin puisqu'il ne s'agit pas de moi, c'est trop de mots a dire I'essentiel: (vol. 33. P« 91). 52. Cela me fut EpargnE de justesse par 1'arrivEe de... mais son nom n'a pas a figurer i c i . (vol. 33. P« 93)-53* Tout cela pour vous expliquer comment (vol. 33» P» 93)• 5k. Encore une fois, i l ne s'agit ni de mes gouts, ni de moi. (vol. 33. P. 9^). 55' Moi, Othello, je pouvais expliquer pourquoi cette halte a Milan, au retour de Venise, de l'aventure de Venise ... Ce n'est pas le l i e u de le raconter. (vol. 33,.p. 100). 56. Mais plus je me rememorais l a \"sc5ne du miroir\"-, et plus i l me semblait que dans ses details, surtout cette facon de me mettre devant le miroir (...) Cela ressemblait en tout cas a cet Episode du rEcit d'Anthoine CSl§bre, quand Ingeborg avait f a i l l i s a i s i r le secret de son amant. (vol. 33, p. 10^). 55 57. Je vous parlerai peut-etre aussi d'une autre sorte d'Emotion... Ce qui me force a dScouvrir un autre cotS de ma vie, alors que je m'Stais promis de le laisser en dehors du Roman de Fougere, parce qu'il s'agit l a d'un monde Etrange de rapports, lesquels exigeraient des explications sans f i n . (vol. 33, p. 121). 58. Dans c e l l e - c i , d'histoire, i l y a quelque chose-qui clo-che: comment se f a i t - i l que Christian nous connaisse tous les deux, Anthoine et moi, (vol. 33, P« 128)i 59. Dix-huit ans et le pouee, je vous dis, qu'il me le repro-che, son sauvetage. (vol. 33, p. 133). 60. Est-ce que vous croyez qu'elle n'est jamais malheureuse? (vol. 33, P. 133). 61. Remarquez, elle aurait pu, m'en ayant parlE, n'en pas souffler mot a Anthoine. (vol. 33, p. 135). 62. Mais tout ca me ramene a Christian, au miroir Brot. (vol. 33, p. 136). 63. C'Etait non pas dans une glace ou 1'autre les trois aspects de Christian, mais l a , comme un rSsultat stS-reoscopique, le fantome unique formS de trois reflets superposEs: je ne sais pas, s i j'exprime \"bien ce que je veux dire... (vol. 33, p. 137)• 64. Eh bien, non imaginez-vous! Non, je veux dire que ledit spEcialiste (vol. 33, P« 1^6). 65. Vous imaginez ce que ce serait dans l a vie, s i tous les mSdecins du monde tombaient sur son mari, le soumettaient a tous les tests, les examens, les experiences de l a psy-chopathologie expSrimentale moderne! (vol. 33, P« 1^7)• 66. A ce point d'exploration des choses, j'imagine ce que sera devenu le mStier de romancier. (vol. 33, P* 1^8). 67. Fougere, je t'Ecris pour m'excuser d'Scrire, (vol. 33, p. 15k). 68. I c i commence, mon amour, l'histoire de l a glace sans tain, (vol. 33, P. 155). 69. Qu'est-ce qu'il y avait avant, qu'est-ce qu'il y avait apres, je ne sais pas, je ne peux pas le savoir. (vol. 33, p. 161). 56 7 0 . Comment t e l e r a c o n t e r , ce s o i r , \"de ma p l a c e \" ? ( v o l . 3 3 , p. 1 6 5 ) . 7 1 . Comment r a c o n t e r un r e v e du m i l i e u ? ( v o l . 33» P« 165) • 7 2 . V o i l a , on se met a r a c o n t e r , e t c ' e s t d i f f i c i l e , une h i s -t o i r e du m i l i e u , l e s d e t a i l s a f f l u e n t q u ' i l f a u t e x p l i q u e r ( v o l . 3 3 , p. 1 6 5 ) . 73* Je me perds dans l e m i l i e u , comprends-tu ( v o l . 3 3 , p. 1 6 6 ) . 7k. On ne peut r i e n r a c o n t e r . On c r o i t s a v o i r ce qu'on r a -c o n t e , ( v o l , 3 3 , P« 1 6 6 ) . 75« On ne peut r i e n r a c o n t e r du m i l i e u . M o i , l e r e s t e , j e l e s a i s , mais q u i m'Scoute? ( v o l . 3 3 , p. 1 6 6 ) . 76. M a i s e n f i n c ' e s t f o u , j e veux, j e veux r a c o n t e r ce s o i r -l a . ( v o l . 3 3 , p. I67). 7 7 . Comment v o u l e z - v o u s qu'on me comprenne? I I me f a u d r a i t t o u t e x p l i q u e r , d i x , j e ne s a i s pas, q u i n z e garcons de mon age, chacun ce q u ' i l a de p a r t i c u l i e r , s o n \"bazar, ses g o u t s , ses femmes, t o u t e l ' h i s t o i r e l i t t S r a i r e contempo-r a i n e , e t p o u r q u o i j e ne p u i s p l u s s u p p o r t e r qu'on me p a r l e d'une c e r t a i n e f a c o n , e t p o t i r t a n t personne d ' a u t r e au monde a comprendre ce que j e d i s de m i l l e e t une choses p i r e s que l e s n u i t s . L ' h a b i t u d e e t l a c o n t r a d i c t i o n . P E t dans t o u t 5 a , l e Dr. J e k y l l e t Mr. Hyde, j e veux d i r e , a l ' e n v e r s , I s i d o r e Ducasse e t l e comte de LautrSamont... c a , au moins j a e x i g e r a i t un deVeloppement.* N'y comptez pas. ( v o l . 3 3 , p.- I69). 7 8 . Comme t o u t e s t compliqu§! Vu du m i l i e u . ( v o l . 3 3 , p . 1 6 9 ) 79- Du m i l i e u , t o u t a un a u t r e s e n s . ( v o l . 3 3 , p. 1 7 5 ) -80. I I p a r a i t , Fougere, que c e c i e s t une l e t t r e . ( v o l . 3 3 , p. 1 7 6 ) . 81. ... mais l a i s s o n s en dehors de t o u t c e l a C h r i s t i a n e t son m i r o i r B r o t , c ' e s t p o u r t a n t a cause de l u i , que j ' a i r e l u c e t a u t r e m i r o i r de moi-meme, l e roman que j ' a i f i n i d ' t c r i r e en j u i n 1 9 3 6 , e t que j e v o i s a u j o u r d ' h u i avec des yeux d i f f S r e n t s . ( v o l . 3 3 , P- 1 7 7 ) . 57 82. C'est v r a i que j e l u i e e r i s , a e l l e , e t que j e ne l u i montre pas ce que j ' e c r i s . D'abord, p a r c e que p e u t - e t r e que j e v a i s t o u t d l c h i r e r sans l u i a v o i r r i e n montrS de t o u t ce g r i b o u i l l i s a n'en p l u s f i n i r . ( v o l . 3 3 , p. I 8 3 ) . 8 3 . Comment d ' a i l l e u r s , - r i e n n'a encore s a forme, n i sa_ p l a c e dans un o r d r e ou un a u t r e , - l i r e ce que j ' S c r i s a Fougere? ( v o l . 3 3 , p.184-). 84-. C e s t - a - d i r e que d'ou que j e p a r t e , ce s e r a i t l e d t s o r d r e des t t o i l e s . . . t e n e z , une- e x p r e s s i o n comme c a , i l f a u d r a i t d i x l i g n e s pour s'en s o r t i r . D'ou que j e p a r t e , j e s e r a i s S c a r t e l S e n t r e mes r a y o n s , ( v o l . 3 3 , p. 184-) . 8 5 . J e v a i s i n v e n t e r un de\"but pour Fougere. Un dSbut s u r l e roman en g e n e r a l . J ' a u r a i s pre'fe'rl l i r e \"Le M i r o i r de V e n i s e \" mais a p r e s ce que j ' a i d i t . ' \"Le M i r o i r de V e n i s e \" , s i on y p r l t e a t t e n t i o n e s t b i e n une i n t r o d u c t i o n a un roman q u i e s t a l a f o i s l e roman-et s u r l e roman, m i r o i r e t r e f l e t , mensonge e t r S a l i t S , mais pour que c e l a prenne c o r p s , i l f a u d r a i t en l i r e t r o p l o n g . ( v o l . 3 3 , p. 1 8 5 ) . 86. On v e r r a p l u s l o i n que c ' e s t t o u t e l ' h i s t o i r e d'Oedipe: r e f l e x i o n q u i s u f f i t a d S t r u i r e t o u t e c h r o n o l o g i e de ce roman, mais qu'y p u i s - j e ? E l l e m'est sautSe aux yeux a r e l i r e l a d a c t y l o g r a p h i e , i c i e t pas a i l l e u r s . ( v o l . 3 3 , p. 1 9 0 ) . 8 7 . Mais j e n ' a v a i s f a i t i c i s u r g i r C h a r l e s Lamb e t son ombre que pour me j u s t i f i e r de remonter au qu i n z i e m e s i e c l e . J ' y r e v i e n s . ( v o l . 3 3 , p. 1 9 3 ) . 8 8 . O u i , j e m i l e t o u t . ( v o l . 3 3 , p. 2 0 3 ) . 8 9 . Ce que j e ne t r a n s c r i s pas a f f a i r e de s i t u e r A n t h o i n e . . . ( v o l . 3 3 , p. 2 0 6 ) . 9 0 . L ' h i s t o i r e e s t done, au p l u s c o u r t . . . ( v o l . 3 3 , p. 2 6 9 ) . 9 1 . E t moi, j e vous epargne t o u t ce q u ' i l p a r u t a A n t h o i n e i m p o s s i b l e a p a s s e r sous s i l e n c e de Byzance a Chypre, ( v o l . 3 3 , P. 2 7 2 ) . 9 2 . E t t o u t c e l a , de ma p a r t , e s t encore c o n c e s s i o n a 1'auteur de Murmure, ( v o l . 3 3 , p. 2 7 3 ) . 58 93• ••• mais c'est assez parler par mStaphore, appelons, comme ne cesse de le rSclamer un ami a moi qui s'est f a i t le dSfenseur du rSalisme, les choses par leur nom. (vol. 3 3 , P. 2 7 5 ) . 9^. Tout ceci demanderait un peu de clarte\", et l'histoire du roman me l'apporte. Non que je veuille d'un coup devoi-l e r mes batteries, ni meme que je sache bien moi-meme ou je vais... Prenons un exemple prScis, un moment de cette histoire, une charniere de 1 'esprit humain... (vol. 3 3 , 9 5 ' Tout ceci, je l'Scris, pour les reflexions en moi qu'a provoquSes Murmure. Je l'Scris par protestation contre le silence de Fougere. (vol. 33* P' 2 7 7 ) . 9 6 . Mais ni de cela, ni de 1 'invention pure et simple d' Oedipe, ainsi s'intitule, l ' a i - j e dit? le troisiSme conte de l a chemise rouge, rien ne jieut etre c l a i r avant l a lecture de ces histoires. Pas sur, entre nous, que cela le devienne apres. Je tiens pourtant a remarquer d'abord, avant d'inclure i c i \"Le Carnaval\", qu'il y a une chose dont Anthoine n'a pu se retenir. (vol. 3 3 , P« 278) 97• J'en reviens done au Carnaval, et, ce qui semble se jus-t i f i e r par l'Spigraphe de Rimbaud a ce qui suit, je ne reconnais plus celui qui parle, cet autre moi, mais un autre a chaque fois que le souvenir vient l'Sclairer. (vol. 3 3 , P. 2 7 9 ) . 9 8 . Anthoine dit (c'est l u i ou moi, qui l ' a Scrit?): \"Fougere m'aime, bien sur. - Mais elle aime une image de moi (...) tant que je collerai a cette 'image' de moi qu'elle s'est faite . . . \" Vous vous souvenez? (vol. , p. 8 3 ) . 9 9 . Je me souviens. II m'a dit, je ne l ' a i jamais rSpStS,^ j'hSsite un peu. Enfin, comme on ne va pas le reconnai-tre, puisque j'ai dans ces quelques mots suffisamment camouflS son cas (vol. Jk, p. 8 6 ) . 1 0 0 . Tiens, je n'ai pas achieve\" ma phrase des baisers. (vol. 3 ^ , p. 8 6 ) . 1 0 1 . II me semble que je ne puis rien dScrire de Fougere qu* aussitot une pourpre me vienne, parce que tout en elle, p. 2 7 5 ) . 59 102. D ' a i l l e u r s , ce n ' e s t aucunement de c e l a q u ' i l s ' a g i t . Comment se f a i r e comprendre: prenez s a main, ( v o l . 34, p. 88). 103. Vous voyez b i e n que c ' e s t i m p o s s i b l e , q u ' i l v a u t mieux changer de s u j e t de c o n v e r s a t i o n , ( v o l . 34, p. 88). 104. Ne donnez pas des s i g n e s d ' i m p a t i e n c e : ce que j e t e n t e de d i r e n ' e s t pas d ' e x p r e s s i o n s i f a c i l e , ( v o l . 34, p. 89) 105. J ' a v a i s d S j a , me s e m b l e - t - i l , une f o i s commence de vous e x p l i q u e r l e c h a n t de Fougere p a r l a mEtaphore du roman. P o u r q u o i m'e*tais-je a r r e t s s u r c e t t e v o i e , ou etait-ce que l e m i r o i r a v a i t t o u r n e ? (...) i l f a u d r a i t t o u t r e p r e n d r e . ( v o l . 34, p. 90). 106. Pour s u i v r e , pour t o u c h e r ce que j e veux d i r e , i l f a u -d r a i t t r o u v e r dans ce domaine 1 * e q u i v a l e n t du pas, du s a u t qu'a ete pour 1 ' e s p r i t humain 1 ' i n v e n t i o n du roman. Je v o i s b i e n , mais j ' h e s i t e a l e d i r e p e u t - e t r e p a r c e que j e s u i s dans ce d o m a i n e - l a , moi; a u s s i , l a p r o i e des p r S -juges que j e combats dans l ' a u t r e . ( v o l . 34, p. 90). IO?. E t s i j e veux p a r l e r de Fougere, i l me v i e n t e n v i e de t r a n s c r i r e i c i ce que d i s a i t S t e n d h a l quand i l v o u l u t dormer un p o r t r a i t m u s i c a l de Mme P a s t a : ( v o l . 34, p. 91) 108. E t t o u t a coup, l e m i r o i r a t o u r n e s u r lui-memej e l l e s ' e s t mise a p a r l e r de l a M a l i b r a n ( v o l . 34, p. 93). 109. L a l u m i e r e t o u r n a n t e e c l a i r e I n g e b o r g en Desdemone ( v o l . 34, p. 97). 110. Le m i r o i r t o u r n a n t j e t t e l a l u m i e r e a nouveau s u r c e t t e r S g i o n des songes. ( v o l . 34, p. 99). 111. Le m i r o i r a v a i t encore t o u r n e . Que d i s a i t Ingeborg? ( v o l . 34, p. 101). 112. E t t o u r n e t o u r n e l e m i r o i r , en t e r r e s e t mers l o i n t a i n e s , ou s'en f u r e n t l e s C r o i s e s p o r t a n t r e v e s d i v e r s e t c r u a u t e grande. ( v o l . 34, p. 101). 113. P a r c e que p l u s d'une beaute de ce roman me f a i t image de Fougere, e t j e ne p u i s i c i d i r e comment, ou t o u t au moins me b o r n e r a i - j e a l ' h i s t o i r e de comment ( v o l . 3^, p. 102). 60 114. Sache-le, bien que, du Roman de Fougere, je n'appelle que cette part i c i \"Le Miroir tournant\", i l me fautavouer par ce t i t r e que se dSvoile quelque chose injustement qu\" on tiendrait jpour procSdS, et procSdS seulement, par quoi se f a i t enchainement des paroles profondes dont-je suis habits, combattu, dSchirS, mis hors de moi-meme'. (vol. 34, p. 104). 115- Et nous en Stions comme l a dame eut laissS le chanter... (vol. 34, p. 105). 116. Mais i l ne pla i t Dieu me ramener a elle, i l faut croire, et le miroir autrement a tournS pour le nom d'Aquitaine, en chemin, comme un beau caillou•luisant sous le pas d'un cheval. (vol. 34, p. 105). 117. Tout cela n'a pris le temps de rien. Ni ce qui suit: c'est pourtant un siecle de pensSes. (vol. 34, p. 109). 118. Tout cela ne prend le temps ni de l'Scrire ni de le penser (vol. 34,- p. 112). 119. Et plus ne parle i c i l'histoire d'Angouleme, (...). Plus ne dit mot l'histoire ni du petit Philippe ni du gSant de Souabefj l a gueule ouverte d'Stonnement, pour tant de mots sortis de moi comme d'un magister prussien. Mais tourne et tourne le miroir. (vol. 34, p. 116). 120. Le miroir tourne a l'envers... est-ce d'avoir accrochS, (vol. 34, p. 116).• 121. Le miroir trop vite a tournS pour les Stapes de cette route, et i l s'est enfui deux annSes comme une seule cou-leuvre. (vol. 34, p. 116). 122. Ah ce miroir, ce miroir, comme i l glisse au glacis des annSes! (vol. 34, p. 120). 123. Je confonds, je vous dis. Ce sont les sacrSs biseaux de ce miroir. II y a des choses, je ne sais plus s i je les ai vues de mes yeux, ou s i je les ai lues quelque part: (vol. 34, p. 122). 124. Et puis soudain, 1'image saute, se fixe quelque part a Paris, dans le quartier militaire, (vol. 34, p. 123). 125. Le miroir tourne... i l accroche un mur, un arbre, une Streinte, (vol. 34, p. 125). 61 1 2 6 . Rien ne va plus. Tout ce qui precede i c i se disloque. Je ne pourrai plus rien expliquer a personne de cette histoire, l a vraisemblance est foutue, le realisme a l a derive, le lecteur laisse choir le l i v r e , i l a les yeux au c i e l , l ' o e i l fou, i l se demande, i l se demande un peu... Oh, migraine, migraine! Si je mets un avec deux, s i je reviens en arriere, s i je rapproche, a l'envers, a l'en-_droit, je compose,- j'oppose, je choisis, je renonce, re-jette, regarde autour de moi, les morceaux i l en manque, i l s ne biehent pas, collent mal, se calent, coincent, chevauchent, chahutent, je n'arrive pas, je n'arrive posi-tivement pas... (vol. jk, p. 1 3 8 ) . 1 2 7 . Le miroir a tournS, dSfinitivement tourne\" sur cette chose de sang. (vol. Jk, p. 1 3 9 ) . 128. Qu'est-ce que je dis? Qu'est-ce que je pense? Ou trou-ver 1'excuse, ou trouver l a confirmation? Confusement, en moi, cette tache rouge: inconsciemment, ou presque, 1'idSe. Le 3eme conte. (vol. 34-, p. 14-0). 1 2 9 . Penser, pour l'homme, c'est toujours tomber... \"comme tomber\", je veux dire: impossible de se rattraper, i l faut a l l e r jusqu'au bout de l a chute, de 1'enchainement des idtes, a l a conclusion, au fond de l'abime, on ne peut pas couper court, (vol. 3^» P« 1 9 5 ) ' 1 3 0 . Tout cela d'abord n'apparaissait a mes yeux que comme une tentation, s'inscrivant bien sur dans le jeu d'Anthoine, ce dSdoublement sur lequel je ne sais trop s i je me suis jusqu'ici pour les autres le moins du monde exprimS... Non? Si je ne l ' a i pas f a i t , je m'en excuse, et qu'avez-vous done compris a tout ce qui precede? (vol. 2>k, p.197) 1 3 1 . Mon histoire, ntcessairement i c i vue du milieu, comment l a comprendrait-on de 1'inttrieur? Je ne puis passer au denouement sans m'expliquer. Non que je veuille excuser le meurtre. Vous n'etes pas mes juges. Tout au plus mes temoins. (vol. 3 ^ , p. 1 9 8 ) . 1 3 2 . Mais. II n'y a pas de plus Strange cheville intellec-tuelle que ce petit mot sournois, qui jette a terre tous les raisonnements, toutes les resolutions prises. Ce \"mais\" qui f a i t le crime. Sur l u i , comme le roman tourne avec le miroir, tourne l a morale de l'homme (...) Bref. (vol. 34-, p. 1 9 9 - 2 0 0 ) . 1 3 3 . Je vous fais grace du dSveloppement que vous imaginerez sans moi. (vol. 3^» P« 2 0 1 ) . 62 134-. J ' a i remarquS au passage, l e s i n v r a i s e m b l a n c e s de c e t t e h i s t o i r e . ( v o l . 34-, p. 2 0 1 ) . 135« S i j a m a i s ce que j ' S c r i s s u r ce p a p i e r y demeure, s i j e ne l e couvre pas d'encre b o u c l S e , s i j e ne d S c h i r e ou ne b r t i l e pas ces aveux, i l f a u t b i e n qu'on t r o u v e i c i non p o i n t de q u o i m ' a c c a b l e r , mais ma s e u l e d S f e n s e . ( v o l . 34-, p. 20k). 1 3 6 . Comment? Ce que vous me demandez l a m'est l a preuve que vous n'avez r i e n encore compris a ce que j e v i e n s de d i r e , ( v o l . 3k, p. 20k). 1 3 7 . V o i l a . Je ne p u i s pas e t r e un m e u r t r i e r p a r c e qu'Anthoine n ' e x i s t e pas. I I n'a j a m a i s e x i s t s . Comprenez-vous b i e n ? I I n'a eu de r S a l i t S que c e l l e des mots. Vous me s u i v e z ? ( v o l . 3k, p. 20k). 1 3 8 . Done A n t h o i n e n'a j a m a i s e x i s t s , enfoncez-vous b i e n c e l a dans l a t e t e . ( v o l . 3k, p. 2 0 6 ) . 139- Quand on s'y met, on e s t j a l o u x des fantomes, des r e v e s , du s i l e n c e , e t p e u t - e t r e b i e n que s i l ' o n d i t : \" A n thoine n ' e x i s t e pas\", ce n ' e s t qu'un systeme pour ne pas t r o p s o u f f r i r , un c a u t e r e s u r une j a l o u s i e de b o i s . T i e n s , s i vous pouvez vous en s o r t i r a d S f e n d r e c e t t e e x p r e s s i o n d e r n i e r e , j e vous paye des g u i g n e s . ( v o l . 3k, p. 2 0 6 ) . 14-0. P a r c e que ce l i v r e e s t l e roman du r S a l i s m e . Du r S a l i s m e c o n t e m p o r a i n . Avec ses d i f f i c u l t S s , ses c o n t r a d i c t i o n s , ses problemes. Vous n ' a v i e z pas remarquS? O u i , n a t u r e l -l e m e n t , c ' e s t un l i v r e s u r l a j a l o u s i e . A u s s i . S ur l a p l u r a l i t S de l a personne humaine. J e veux b i e n . Mais s u r t o u t , s u r t o u t , Du moins, a c e t t e page. Un roman du r S a l i s m e , j e vous d i s . ( v o l . 3k, p. 2 0 7 - 2 0 8 ) . 14-1. Tout c e l a . . . ou en S t a i s - j e ? I I s u f f i t d'un r i e n que j e me perde. Tout c e l a comme l e s cheveux s u r l a soupe. En r S a l i t S j ' a i l a t e t e a i l l e u r s . J ' i n v e n t e de m'en p r e n d r e a c e u x - c i , a c e u x - l a , pour S v i t e r ce q u i me dSvore. J e d i s des mots pour m'Sgarer. J e me joue e t vous joue une p i e c e . ( v o l . 34-, p. 2 0 9 - 2 1 0 ) . 14-2. D ' a i l l e u r s t o u t c e l a n ' e s t que mStaphore, i l n'y a pas d ' A n t h o i n e , l e t u e r , c ' e s t f a c o n de p a r l e r , i l s ' a g i t s i m -plement de m e t t r e f i n a un j e u ou l a r a i s o n v a c i l l e . E t d'abord f a i r e que Fougere s'en r e t i r e . Meme s i j e d o i s t o u t p e r d r e a c e l a . P a r c e qu'a ce p o i n t ou j ' e n s u i s des 63 choses, tout se brouille, et' votre'rSalite\" me parait etre, elle, le jeu. Je vais done, comme on dit, prendre sur moi... retourner l a situation... (vol. 3 ^ , p. 2 1 3 ) . 1*1-3. J'Ecris cela ne sachant trop s i quelqu'un le l i r a , n'aura pas de longtemps StS lasse* de mes tempetes. Le lecteur, en tout cas, ignore ce qui me l i e avec cette batisse ancienne, dans ce coin de Paris en cette saison- qui me ressemble. (vol. 3 ^ , p. 2 1 5 ) . 144. Tout ceci me vient a propos de bottes, semble-t-il, mais cent trente neuf ans apres l a visite de Celeste Buisson de l a Vigne, Vicomtesse de Chateaubriand, comment n'y point repenser pourtant, devant l a somptuosite\" de 1'Hotel Massillon, et a ces gens dont je suis issu, qui- tiraient le diable par l a queue, dans l a region meme, ou, quand ma mere Stait enceinte, elle Stait venue cacher son dSshonneur dans une propriety de chenes-li§ge.et de tama-r i s , chez des amis de sa grand'mere. L'histoire arrive au bout d'elle-meme, Maman. (vol. 3 ^ , p. 2 1 6 ) . 6k 3 - La sequence dans \"La Mise a mort\": Les noyaux se soumettent ensuite a un groupement par sEquences. Une sSquence, on l a dSfinit i c i d'apres Barthes, \"est une suite logique de noyaux, unis entre eux par une relation de solidarity: l a sequence s'ouvre lorsque l'un de ses termes n'a point d'antScSdent solidaire et elle se ferme lorsqu'un autre de ses termes n'a plus de consequent.\" 1 0 Une formule qui aiderait a mieux presenter l a sequence est: Sq. = N-L-L. N 2 - L . N 3 1_ N N ou ( N ) reprSsente noyau et (Sq.) sequence. La sSquence est done a un niveau supSrieur au noyau mais infSrieur au rEcit car elle f a i t partie du rEcit. Ainsi, le rEcit est constituS de plusieurs sEquences: R ( (rEcit) - Sq.-j-j- Sq . . 2 -J- Sq.^-j- ... Sq..n Dans le cas de La Mise a mort, les noyaux sont groupEs en 3 grandes sEquences. Mais, contrairement a l a formule R ^ Sq-j^ -f- Sq2-+- Sq^-f- ... Sq.n ou les sEquences se suivent de facon consScutive, les 3 sEquences de La Mise a mort se chevau-chent entre elles, c'est-a-dire, que chaque sSquence contient des noyaux groupEs non selon un ordre chronologique (l->2-> 3->4-+...) mais .logique (1-f- 3 -f- 8 - j - 134-.. •) . 65 4- - Presentation en termes de chiffres\"^ des 3 sequences de \"La Mise a mort\": La sequence 1 contient 6 l noyaux: S q ^ _ (])+ 3 -+-4- -KD+6 + 7 4 - 8 + 9-+ 10-j- 12 +(g+ 21+- 2 6 + 28+ 29 -+ 34- + 3 5 +-(36)-+ 38 + 4-0^-4-1+ 4-2 + (g)-l-@4(g) T@r- @4-(53)+@H-5 9 6 0 4 - 61 + @ } + 67 +(77)4- 80 4- 8 1 4 - 84-+ @ H - C 9 3 ) - ^ @ + - 96 + @ ) + < 1 0 | > f 103 +(lo4)+ (105)4- @ ) + 123-+- 130-f-131-f @ H - 1 3 6 + 1 3 7 4 - 1 3 8 + - 1 3 9 - H @ ) + @ 4 - ( l ^ 2 ) La sequence 2 contient 67 noyaux: S ( l - 2 - Or- 2 4 H2H-®+II+ 1 3 + © + 1 5 + 1 7 + 19-+-2 0 - ^ 2 2 + - 23 -+- 24-4- 26—f- 28-|- 3 0 - + 3 1 4 - 37 + . ' 3 9 + 4-0-+4-1-+ 4-24 @ + 4-6 4 - @ ) + @ 4 - 5 2 4 -@* 55 + 56 -r 62 + @ + 67 + 68 + @ + 80 4 -81-+ 82+ - 8 5 + 8 7 + 8 9 + 9 0 ^ @ H - 9 2 - f ^ ® + @+ 9 5 + 97 + ( 9 § ) + 10 l4-@)+(l^ - ) - ( l 0 5 H -1 0 6 + - 1 0 7 + 1 1 3 - f - @ ) + 1 2 9 + 132 + @ ) 4 - . 1 3 ^ 4 - 1 3 5 44@)+(S2)+ 14-3 -\\-(lkk) 66 La sequence 3 contient 51 noyaux: Sq < 3 = 2 7 + 3 3 ^ @ H - @ 4 @ - f - 4-7+ ^ 8 - f © ^ @ ^ t -51—f- 5^-f-©-}- 5 8 - i - 69 -f- 70 -+ 71 - f 72 + 73-f- 74-^ 7 5 + 7 6 + 78—f- 79 4 - 8 3 + 84--+ 86-+ 8 8 - + 100+ 103 H- 108 4-109-f- 110 + 111-t- 112-+ 114-+116 + 117+ 118-j- 120-f 12t-j- 122-1- 1 2 3 + 124-+ 1 2 5 + 1 2 6 + 127 + 128+ 1 3 0 + 1 3 1 4 ( ^ 4 ( 1 4 4 ) Cette presentation f a i t mieux ressortir le chevauche-ment entre les 3 sequences. Ce chevauchement indique que l a trame d'une histoire dont les etapes s'enchainent de fagon suivie n'existe pas dans La Mise a mort qui presente a pre-miere vue meme, un desordre de propos mal rattaches l'un a 1'autre, un entassement de phrases jetees pele-mele sans orien-tation preiiminaire. Les 3 sequences de ce roman en effet, ne se suivent pas: elles se developpent concurremment pour se modifier l'une 1'autre. Pour que cela transparaisse, i l nous faut d'abord analyser une a une les sequences: ce sera bientot f a i t dans les pages a venir. Pour 1*instant, i l s u f f i t d'ajouter que cette presentation en termes de chiffres eclaire un nouvel aspect des noyaux de La Mise a mort: certains des noyaux (ceux qui sont encercies) reapparaissent dans une 6? a u t r e sequence. Ces noyaux p a r t i c u l i e r s s o n t d E f i n i s p a r 2, q u e l q u e f o i s 3 elements de c o r r e l a t i o n . P a r exemple, l e noyau 1 p a r t i c i p e a l a sequence 1 p a r c e q u ' i l c o n t i e n t 1*element d'un echange e n t r e \" J e \" e t \"Vous\" dans \"Je vous demande un peu\", e t en meme temps a l a sequence 2 pui s q u e ce noyau r e v e l e a u s s i l a pres e n c e du s c r i p t e u r q u i v a \" r a c o n t e r \" une h i s t o i r e . 5 - L a n o m i n a t i o n des sequences: On a f a i t remarquer a l a page 64 que l e s noyaux d'une sequence s o n t groupes s e l o n un o r d r e l o g i q u e que l e u r p r o c u r e 1'element de c o r r e l a t i o n . C ' e s t l e f a i t de s a i s i r c e t t e s u i t e l o g i q u e d ' a c t i o n s dans l e s noyaux q u i donne l i e u a l ' a c t e de nommer un groupe c o n s t i t u e de noyaux. A p p e l e r ce groupe une sequence ne s u f f i t pas p u i s q u ' i l e x i s t e d \" a u t r e s sequences dans l e r e c i t ; i l f a u t a u s s i c o n f e r e r a chaque sequence un t i t r e q u i i n d i q u e r a i t de c e t t e f a c o n , l a c o m p o s i t i o n p a r t i c u -l i e r e de c e t t e sequence. On a nomme l a sequence 1: \" E m e t t e u r - r e c e p t e u r \" . L'echan-ge dans c e t t e sequence, on l e v e r r a , depasse l e cadr e d'un s i m p l e c o n t a c t l i v r e s q u e e n t r e c e l u i q u i f a i t l e r e c i t e t c e -l u i q u i l e r e c o i t . A u s s i l e s termes ''emetteur\" e t \" r e c e p t e u r \" s o n t - i l s a p p r o p r i e s pour d e s i g n e r l e s d i f f e r e n t e s f a c e t t e s d'une t e n t a t i v e v i s a n t a e t a b l i r un c o n t a c t immediat e t p e r c e -v a b l e . L es noyaux de c e t t e sequence se d e f i n i s s e n t p a r 1 ' i n -t e r p e l l a t i o n d'une 2eme personne p a r une l e r e personne. L e s 68 termes de \"emetteur\" et de \"rtcepteur\" sont aussi choisis pour marquer l a difference essentielle entre l a communication expli-citee et approfondie dans cette sequence 1 et celle non encore realiste entre scripteur et lecteur qui depend, elle, du con-cours supplementaire des deux autres sequences mentionntes. En d'autres mots, le deVeloppement de l a sequence 1 depend de ceux des sequences 2 et 3. La sequence 1 rtvSlera sous l'ana-lyse, les difftrentes attitudes qu'adopte le scripteur vis-a-vis de son lecteur, mais l a conclusion finale signalant une communication ou une non-communication ne se fera qu'apres 1'Stude des autres sequences du recit. Ceci prevoit une syn-taxe des trois sequences qui se signal-era aussi comme synthese de cette analyse de La Mise a mort au moyen des noyaux. La sequence 2 s'intitule \"Je raconte\". Les noyaux de cette sequence annoncent une certaine maitrise de l a part du \"Je\" devant le texte qu'il pense etre en train d'ecrire. La voix dans le recit se presente i c i a l ' a c t i f . La sequence 3 a pour t i t r e \"Je suis raconte\". I c i , les noyaux dSnoncent une confusion grandissante chez le scripteur qui semble avoir perdu son autorite sur le texte. Cette se-quence s'annonce comme l a contre-partie de l a sequence 2 dont elle se f a i t l a voix passive. 69 6 - L a micro-sequence dans \"La M i s e a mort\": Les sequences 2 e t 3 c o n t i e n n e n t chacune des m i c r o -12 sequences . Une micro-sequence e s t un p e t i t groupe-de noyaux f a i s a n t p a r t i e d'une ,grande sequence: c e l l e - c i , e f f e c t i v e -ment, se p r e t e a une a n a l y s e p l u s detainee. \" I I y a done,\" comme d i t B a r t h e s , \"une s y n t a x e i n t S r i e u r e aux sequences e t une s y n t a x e ( s u b r o g e a n t e ) des sequences e n t r e e l l e s . \" A i n s i , l a s y n t a x e des t r o i s grandes sequences de L a Mise a mort e s t soutenue p a r une s y n t a x e i n t e r i e u r e c o n s t i t u t e p a r l e s m i c r o -sequences. L'examen de l a s y n t a x e e n t r e l e s grandes sequences e s t n S c e s s a i r e m e n t precede de c e l u i des m i c r o - s e q u e n c e s . On a r e l e v e 5 micro-sequences dans chacune des sequences 2 e t 3» on l e s a e n s u i t e nominees. Les micro-sequences de l a sequence 2 s o n t ( i ) \" C e r t i t u d e du d i r e \" ; ( i i ) \"Abandon\"; ( i i i ) \" R e p r i s e \" ; ( i v ) \" C o n t e x t e \" ; (v) \" M o d a l i t e s du d i r e \" . C e l l e s de l a sequence 3 s o n t ( i ) \" C o n f u s i o n \" ; ( i i ) \" L e i t m o t i v 1\"; ( i i i ) \" L e i t m o t i v 2 \" ; ( i v ) \" L e i t m o t i v 3 \" ; (v) \" P e r t e de c o n t r o l e \" . 70 Les pages s u i v a n t e s o f f r e n t une a n a l y s e de chaque sequence e t micro-sSquence. C e t t e a n a l y s e s e u l e p o u r r a i n d i -quer s i l e passage d'une t e n t a t i v e de communication a l a communication p l e i n e s ' e s t e f f e c t u S ou non. 7 ~ A n a l y s e de l a sequence 1; \"Emetteur-Re'cepteur\": Dans c e t t e sequence, l ' e m e t t e u r i n t e r p e l l e d i r e c t e m e n t son r S c e p t e u r : une v o i e e s t o u v e r t e pour l a communication. Les noyaux de c e t t e sequence 1 s i g n a l e n t l a presence- du r t c e p -t e u r • a u q u e l s ' a d r e s s e l e \" J e \" . Le s c r i p t e u r de L a Mise a mort ne v e u t pas r a c o n t e r son h i s t o i r e dans l e v i d e meme s i c e l l e -c i e s t captSe dans un t e x t e q u i s e r a de t o u t e f a c o n a c c e s s i -b l e a l a l e c t u r e ; i l d e s i r e p l u t o t r e s s e n t i r l a p r e s e n c e proche de son l e c t e u r q u i a s s i s t e r a l u i a u s s i a l a f a b r i c a t i o n du t e x t e e t a u r a a i n s i , l e p r i v i l e g e d ' e t r e t e m o i n de l ' a c t e d ' S c r i r e . Le l e c t e u r d o i t se m a n i f e s t e r , d'ou, l ' e m p l o i du langage dans c e t t e sequence pour s i g n a l e r l a p r e s e n c e de c e t t e deuxieme personne. Roman Jak o b s o n a a p p e l t c e t usage l a 13 f o n c t i o n J c o n a t i v e du l a n g a g e . On se r a p p e l l e que l e l i n -g u i s t e a d i s t i n g u t s i x f o n c t i o n s du langage a p a r t i r des s i x 14/ f a c t e u r s fondamentaux a t o u t e t e n t a t i v e de communication Les s i x f o n c t i o n s s o n t de n a t u r e emotive, c o n a t i v e , r t f S r e n -t i e l l e , p o t t i q u e , p h a t i q u e e t m t t a l i n g u i s t i q u e e t r e n v o i e n t conse'cutivement a l ' e m e t t e u r , au r t c e p t e u r , au c o n t e x t e , au message, au c o n t a c t e t au code. 71 L a p l u p a r t des noyaux de l a sSquence 1 r e n f e r m e n t l a f o n c t i o n c o n a t i v e : quelques exemples s o n t : (Noyau 1 ) : \" j e vous demande un peu\"; (Noyau 53) * \"pour vous e x p l i q u e r \" ; (Noyau 6 0 ) : \" E s t - c e que vous c r o y e z . . . \" ; (Noyau 6 l ) : \"Remarquez\"; (Noyau 6 4 ) : \"Imaginez-vous\"; (Noyau 1 0 3 ): \"Vous voyez b i e n \" . L a p r e s ence du r S c e p t e u r e s t s i g n a l S e i c i p a r 1'usage du pronom \"Vous\" e t p a r 1 ' i m p S r a t i f . On v e r r a p l u s t a r d que l a deuxieme personne du s i n g u l i e r (Tu) s e r a a u s s i employee. C e t t e p r e s ence se f a i t c h a i r e t s i g n a l e l e c o n t e x t e de 1 ' ' e c r i -t u r e q u i englobe s c r i p t e u r e t l e c t e u r dans une s e u l e e t meme s i t u a t i o n . L a p a r t i c i p a t i o n a une meme a c t i v i t e de l ' e c r i -t u r e r e l a c h e 1 ' a t t i t u d e du s c r i p t e u r v i s - a - v i s de son t e m o i n ; i l n ' e s t p l u s borne a communiquer s u r p a p i e r : i l d e v i e n t emetteur dans un sens p l u s l a r g e . En e f f e t , i l o f f r e ! l a pos-s i b i l i t e d'un echange p l u s humain. C ' e s t , s i l ' o n v e u t , un d e s i r chez' l e s c r i p t e u r de f r a n c h i r l a d i s t a n c e t e m p o r e l l e l e s e p a r a n t du l e c t e u r pour engendrer une p r i s e de c o n t a c t p l e i n e avec l u i . Le s c r i p t e u r en communication ne v e u t p l u s e t r e s e u l : 1 'absence d'un temoin d o i t e t r e combiee e t s a p r e s e n c e , une f o i s e t a b l i e , d o i t e t r e maintenue. Pour que son a c t e a i t un sens, 1 ' e m e t t e u r a b e s o i n du r e c e p t e u r . E t justement pour 72 e t r e p l u s p r e s e n t , ce r S c e p t e u r ne d e v r a i t - i l pas e t r e une personne chere (avec q u i on a partage\" l e s e n t i m e n t de 1'amour, pour q u i on a r e s s e n t i de l a j a l o u s i e ) , une femme t e l l e que Fougere? En e f f e t , l e s noyaux s u i v a n t s m e t t e n t a 1'avant un pesonnage du t e x t e que l e s c r i p t e u r peut t u t o y e r : (Noyau 40): \" E t q u o i de p l u s , j e t ' S c r i s , Fougere\"; (Noyau 4 1 ) : \"Je t ' S c r i s , n ' e s t - c e pas t o u t dire.....\"; (Noyau 4 2 ) : \"Et done, c e c i t e s o i t ma l e t t r e . . . \" ; (Noyau 6 7 ) : \"Fougere, j e t ' S c r i s pour m'excuser d ' S c r i r e \" ; (Noyau 8 0 ) : \" I I p a r a i t , Fougere, que c e c i e s t une l e t t r e \" . Fougere d e v i e n t l a mStaphore du l e c t e u r e t permet a i n s i , un p l u s grand rapprochement e n t r e s c r i p t e u r e t l e c t e u r : c ' e s t l e p r i v i l e g e du \"Tu\" s u r l e ' \" V o u s \" . Quand l e langage e s t u t i l i s e \" pour m a i n t e n i r une v o i e de communication, i l d S t i e n t l a f o n c t i o n p h a t i q u e . Les noyaux s u i v a n t s 1 - ' r e n f e r m e n t une t e l l e f o n c t i o n : (Noyau 1 6 ) : \" E n t r e nous...\"; (Noyau 26): \"Abandonnons t o u t c e l a \" ; (Noyau 2 8 ) : \" B r o u i l l o n s l e s c a r t e s \" ; (Noyau 4 4 ) : \"Vous demandez q u i p a r l e . . . \" . L'Emetteur se s e r t de l a p r e m i e r e personne du p l u r i e l pour m a n i f e s t e r une i n t e n t i o n de s o l i d a r i t y avec son r S c e p t e u r . 73 Celui-ci est encourage* a continuer a participer. \"Nous\" dans l a communication, c'est le monde partage\" de l'Emetteur et du rScepteur. Sans faire de cel u i - c i son ame-soeur, l'Emetteur le rapproche un peu plus de l u i puisque \"Nous\" marque une Etape supSrieure dans l'intimitS a celle de \"Vous\". Le rScep-teur est complice, non pas juge: ce sentiment de complicitS renforce davantage le contact entre l'Emetteur et l u i . Ce contact est aussi signals dans le noyau 44 par une interroga-tion de l a part du rScepteur et dans le noyau 9 1 \" ^ ou trans-paraxt l a complaisance de l'Emetteur a ne pas ennuyer son rScepteur. II arrive aussi que souvent, l'Emetteur dSsire s*assurer que le code u t i l i s E est commun a tous les deux. I c i , s'annonce l a fonction mStalinguistique du langage. Celui-ci au l i e u de renvoyer a un autre contexte, se rSflEchit lui-meme. Dans les 17 noyaux citSs ci-dessous , on voit bien que l'Emetteur veut etre compris: (Noyau 4 ) ; \"Comprenez-vous... me comprenez-vous bien?\" (Noyau 7)s \"Vous comprenez\" (Noyau 8): \"Est-ce que vous entrez bien dans ce que je dis?\" (Noyau 9)* \"Comprenez-vous\" Ainsi, de l'Emetteur au rScepteur le langage vise au moyen des trois fonctions - conative, phatique et mStalinguis-tique - a Stablir, maintenir et assurer l a communication entre Ik les deux parties. II s'agit visiblement d'un effort. Abou-t i r a - t - i l a une reussite ou a l'echec? L'emetteur eprouve une ir r i t a t i o n grandissante vis-a-vis du re\"cepteur: dans les noyaux de cette sequence, 1'encouragement et 1'intimitS font place a un besoin de convaincre (\"je vous dis\") qui frole l a rudesse (\"enfoncez-vous bien cela dans l a tete\") pour ensuite denoncer son jeu (\"Je me joue et vous joue une piece\") et enf in rejeter le recepteur (\"et votre rSalite\" me paraxt etre, elle, le jeu\") qui, de\"sormais, n'appartient plus au meme uni-vers que l u i . La fonction mttalinguistique f a i t place a une fonction emotive ou le langage se rapporte a l'tmetteur l u i -meme. En effet, l'emetteur veut s'affirmer: le code est de l u i et s i son rScepteur ne le comprend pas, cela veut dire qu'il est l a source de cette incomprehension. Mais rejeter le rScepteur est prtferable, d'apres 1*Amotion du ton des derniers noyaux de cette sequence, au rejet du code lui-meme qui Squivaudrait a un rejet de soi. II n'est, toutefois, pas possible de conclure tout de suite a un echec de l a communication. Comment ce changement vis-a-vis du lecteur a - t - i l eu lieu? L'analyse du rapport entre emetteur et code apportera peut-etre une rSponse a cela. 75 8 - Analyse de l a sequence 2 \"Je raconte\": La trame de cette sSquence est tissSe de 5 micro-sSquences qu'on a aussi nommSes. On donnera i c i un relevS en termes de chiffres de ces micro-sSquences de l a sSquence 2 : (i) Micro-sSquence \"Certitude du dire\": 1+- 5 + 8 + 1 3 -t- 14+- 22 -t- 4 9 + 5 0 + 5 3 + 9 3 + 94-h 1 0 l - f - 102-+- - 1 0 7 - h 1 1 3 + 1 1 5 + -1 4 0 - f - 1 4 3 4-144. ( i i ) Micro-sSquence \"Abandon\": 26+ 28+ 4 3 + 5 5 + 77 + 81-t- 8 9 + 9 1 + 1 1 9 . ( i i i ) Micro-sSquence \"Reprise\": 3 0 + - 3 1 + 46+ 62+ 8 7 + 97 -f- 1 0 5 . (iv) Micro-sSquence \"Contexte\": 23-f- 3.9-h 40+ 41+ 42+ 56-f\" 62 + 6 7 ^ 6 8 + 8 0 + 82+ 8 5 + 95 + 9 6 + 97 + 9 8 + 114-+- 1 3 5 -|- 140 -+-143. 76 (v) Micro-sequence \"Modalites du dire\": - 24- 7 4-15-+ 17 + 19 4- 20 4\" 23 4- 24 4-. 37-4- 77 H-104 4-106 + 1134- 1 2 9 4-1^2 Ces cinq micro-sequences se chevauchent entre elles. Chacune se diffuse en un reseau de rapports internes qu'il s'agit maintenant d'etudier. (i) Micro-sequence \"Certitude du dire\": Le scripteur affirme l'acte de raconter sur le niveau de 1'ecriture. Raconter peut se faire au moyen de paroles ou de mots: c'est le processus propre a l a communication. Ce processus apparait dans cette micro-sequence sous plusieurs formes: dire, expliquer, demander, decrire, appeler, parler, ecrire. Ceci j u s t i f i e un point sur le roman de La Mise a mort: 1'action se situe au niveau du verbe et non de 1'evSnement. On note, toutefois, i c i une predominance du proces de dire sur celui d'ecrire. Encore une fois, i l est c l a i r que le scrip-teur desire raconter pour communiquer et non communiquer pour raconter. L'histoire se subordonne au procSs de raconter qui vise a l a communication. En ecrivant \"Je dis\", le scripteur se veut plus spontane dans l a mesure ou on emet plus vite une parole qu'on n'ecrit un mot. En voulant c u e i l l i r l a pensee dans sa purete et l a donner au lecteur, i l croit sacrifier l a duree (le mot ecrit) a 1•instantanE (la parole), mais happee 77 par l'ecriture et captee dans le monde du texte, l a parole a son tour, se metamorphose en durte pour etre remplacte par d'autres paroles qui subiront le meme sort qu'elle. Le proces de dire comporte en lui-meme, les trois pha-ses d'un deVeloppement: i l va commencer (\"Je vais vous dire\" - -noyau 5)5 i l se poursuit (\"je dis\" - noyau .8) et i l se termine (\"je viens de dire\" - noyau 13). Mais, i l y a toujours recom-mencement apres 1'accomplissement. Recommencer toutefois, ne ramene pas a l'ancien point de depart mais en propose un nou-veau pour le texte. Celui-ci se compose non pas d'une durte mais de plusieurs durtes: i l ne s'accomplit jamais totalement, i l est toujours en train de se faire. A certains Sgards, sous forme du present de l' i n d i c a t i f , le verbe dire actualise une grande certitude: (Noy. 14-): \"1'image, je dis, 1'image\" (Noy. 4-9): \"je vous dis\". Le scripteur est maitre du proces de raconter. ( i i ) Micro-sequence \"Abandon\": Tout au long du proces,-le scripteur choisit ce qu'il veut raconter et eiimine ce qu'il ne veut pas. Les noyaux de cette micro-sequence captent les instances de ce choix. Ces instances se divisent en 2 groupes: dans le premier, le scrip-teur coupe court a ce qu'il a deja commence a dire. Le texte ne poursuit pas un seul et meme chemin, et n'a pas de destina-tion. Sounds aux caprices du scripteur, i l ne realise pas ses 78 p o s s i b i l i t y , i l r e s t e t o u j o u r s en suspens. C'est l e cas des noyaux s u i v a n t s : (Noyau 26) (Noy. 28) (Noy. 4-3) (Noy. 81) (Noy. 91) (Noy. 119) \"Abandonnons t o u t c e l a \" \"Ah, b r o u i l l o n s l e s c a r t e s \" \"Ah, l a i s s o n s l a T a t i a n a , P o u c h k i n e \" \"Mais l a i s s o n s en dehors\" \"Et moi, j e vous epargne...\" \"Et p l u s ne p a r l e i c i l ' h i s t o i r e d'Angou-leme\". C ' e s t pour c e l a que L a M i s e a mort r e s s e m b l e a une t o i l e d ' a r a i g n t e dont l e s f i l s ne se r e j o i g n e n t pas, mais pendent l ' u n a c o t t de 1 ' a u t r e , d e t a c h t s e t i n a c h e v t s . I I y a a u s s i ce 2eme groupe d * i n s t a n c e s ou un r e c i t n ' e n t r e -v o i t meme pas l a t r a c e d'une p o s s i b i l i t y : (Noy. 5 2 ) : \" C e l a me f u t t p a r g n t de j u s t e s s e p a r l ' a r -r i v S e de... mais son nom n'a pas a f i g u r e r i c i \" (Noy. 5 5 ) : \"Moi, O t h e l l o , j e p o u v a i s e x p l i q u e r p o ur-q u o i c e t t e h a l t e a M i l a n (...) de V e n i s e . . . ce n ' e s t pas l e l i e u de l e r a c o n t e r \" (Noy. 7 7 ) : \"Et dans t o u t c a , l e Dr. J e k y l l e t Mr. Hyde (...) c a au moins, ga e x i g e r a i t un developpementJ N'y comptez pas.\" (Noy. 8 9 ) : \"Ce que j e ne t r a n s c r i s pas a f f a i r e de s i t u e r A n t h o i n e \" 79 (Noy, 133) '• \"Je vous f a i s g r a c e du developpement que vous i m a g i n e r e z sans moi.\" C e c i donne 1 ' i l l u s i o n d'un espace b l a n c du p a p i e r non s o u i l i e p a r l a t r a c e de l ' e c r i t u r e . E t c ' e s t l a une i l l u s i o n e f f e c t i v e m e n t p u i s q u e l ' e c r i t u r e r e p r e n d pour r a c o n t e r a u t r e chose. ( i i i ) M i c r o - s e q u e n c e \" R e p r i s e \" 1 : I I s e r a i t i n e x a c t de d i r e que t o u s - l e s f i l s du r e c i t de L a M i s e a mort s o n t l a i s s e s en suspens. I I e s t des moments ou l e s c r i p t e u r d e s i r e r e p r e n d r e une anecdote ou un s o u v e n i r d e i a i s ^ e s pour une d i g r e s s i o n s u r quelque a u t r e p o i n t . Dans l e s noyaux s u i v a n t s , l e s c r i p t e u r op.&re un r e t o u r au t e x t e a p r e s une d i g r e s s i o n : (Noy. 3 ° ) : \" E n f i n j ' e n r e v i e n s \" (Noy. 3 1 )s \"Pour y r e v e n i r \" (Noy. 4-6): \" E t pour en r e v e n i r a 1'apologue du boxeur\" (Noy. 6 2 ) : \"Mais t o u t c a me ramene a C h r i s t i a n , au m i r o i r B r o t \" (Noy. 87): \" J ' y r e v i e n s \" (Noy. 97): \"J'en r e v i e n s done au C a r n a v a l \" (Noy. 1 0 5 ): \" i l f a u d r a i t t o u t r e p r e n d r e \" Semblable au voyageur de Montaigne, l e s c r i p t e u r s'aven-t u r e dans l ' u n i v e r s du t e x t e sans que son i t i n e r a i r e s o i t fixe d'avance e t comme l e r e t o u r au pays f a i t e n t r e v o i r au voyageur 80 les changements survenus, le retour au texte devoile au scrip-teur un paysage nouveau ou l a digression est passEe. Le texte n'est plus le meme qu'avant puisqu'il contient maintenant, grace a l a digression, d'autres f i l s possibles du rEcit: c'est un univers enrichi que le scripteur retrouve mais quitte de nouveau:pour reprendre une route dEja empruntEe. \"Revenir\" trace deux directions du regard subtilement distinguEes au moyen des pronominaux \"en\" et \"y\". \"J'en reviens\" exprime un retour au cours duquel le scripteur a encore le visage tourne\" vers un rScit digressif qu'il vient de quitter tandis que ' \"J'y reviens\" reporte son attention vers l'ancien rScit dSlaissE. Le noyau 105 retient un sens particulier de \"reprendre\" car i l s'agit a ce moment-la non plus de reprendre un f i l dElaissE du texte, mais de recommencer toute une explication, de l a rEp§ter. \"Reprise\" comme \"Abandon\" montre le scripteur exergant sa volonte\" sur le texte: c'est par le choix qu'il f a i t d'Eliminer ou d'ajouter que le texte se realise. Du moins;, c'est ce qu'il croit. (iv) Micro-sgquence \"ModalitEs du dire\": Le proces de dire n'entraine pas toujours une expression spontanEe de ce que le scripteur veut dire. II existe des modalitSs exprimant les distances entre le sujet et 1'objet de dire. Le schema suivant i l l u s t r e ces modalite*s: 81 Schema A S u j e t M o d a l i t y du O b j e t d i r e Les m o d a l i t y se s i t u e n t en d i a g o n a l e e n t r e s u j e t e t o b j e t : h o r i z o n t a l e m e n t , e l l e s t r a d u i r a i e n t l e s d i s t a n c e s e t v e r t i c a l e m e n t e l l e s f o r m e r a i e n t un e c r a n e n t r e l e s deux p o i n t s . L a r e p r e s e n t a t i o n a c t u e l l e ( c e l l e du schema) r e v e l e ces deux c a r a c t e r i s t i q u e s des m o d a l i t y : s e u l e , chaque m o d a l i t e se p l a c e a une d i s t a n c e d i f f t r e n t e du s u j e t e t de 1 * o b j e t ; ensem-b l e , e l l e s forment 1 ' S c r a n que l e s u j e t e t 1 * o b j e t d o i v e n t f r a n c h i r pour p o u v o i r se comprendre. Le p r o c e s de d i r e e s t 18 precede d'un v e r be modal t e l que dans l e s noyaux s u i v a n t s : (Noyau 2): \" j e veux d i r e \" ; (Noy. 7): \" j e ne peux pas d i r e \" ; (Noy. 1 5 ) : \" j ' a i o u b l i e de d i r e \" ; (Noy. 1 9 ) : \" j ' a i f a i l l i d i r e \" ; (Noy.lO<+): \"ce que j e t e n t e de d i r e \" ; ( N oy . 1 0 6 ) : \" j e v o i s b i e n , mais j ' h S s i t e a l e d i r e \" . L e s v e r b e s modaux s o n t : v o u l o i r , p o u v o i r , o u b l i e r , f a i l l i r , t e n t e r , h t s i t e r . On peut d i s p o s e r ces v e r b e s en une c h a l n e e n t r e l e s u j e t e t 1 * o b j e t de d i r e comme dans l e schema s u i v a n t ou se v o i t r e p r e s e n t e e l a d i s t a n c e de chaque verbe modal p a r r a p p o r t a 1 ' o b j e t que v i s e l e s c r i p t e u r : 82 SchEma B: O u b l i e r P o u v o i r S u j e t H E s i t e r O b j e t T e n t e r F a i l l i r V o u l o i r \" J ' a i o u b l i E de d i r e \" : L ' a c t e de d i r e n'a pas eu l i e u . L'ou-b l i r e l e g u e l a pensEe dans une r E g i o n obscure ou l e s c r i p t e u r ne l ' a t t e i n t pas. O u b l i e r , c ' e s t 1'opposE de former-une pen-sEe, done, l a n E g a t i o n de 1 ' o b j e t . C'est en f i n de compte, 19 l e degrE zEro du d i r e . 7 \"Je ne peux pas d i r e \" : L a forme n E g a t i v e de p o u v o i r E l o i g n e ce v e r be modal de 1 ' o b j e t . Ne pas p o u v o i r d i r e une chose, c ' e s t de l a p a r t du s u j e t , p r e n d r e c o n s c i e n c e de 1 ' e x i s t e n c e de 1 * o b j e t sans q u ' i l y a i t rapprochement e n t r e s u j e t e t o b j e t . I I y a quelque chose a d i r e , mais c ' e s t l a d i r e q u i s'avere i m p o s s i b l e . A i n s i , l a d i s t a n c e e n t r e \"ne pas p o u v o i r \" e t 1 ' o b j e t e s t moins grande que c e l l e e n t r e \" o u b l i e r \" e t 1 ' o b j e t . \" J ' h E s i t e a d i r e \" : L * o b j e t e s t a d i s t a n c e v i s i b l e e t meme a p o r t E e de 1 ' e x p r e s s i o n , mais c ' e s t l e s u j e t q u i e x e r c e une c on t r ain't e v o l o n t a i r e s u r lui-meme: i l h E s i t e , i l r e t a r d e l ' a c t e de d i r e . \" H E s i t e r \" donne t o u t e f o i s , p l u s de chance a 1 ' o b j e t d ' e t r e exprimE que \"ne pas p o u v o i r \" . 83 \"ce que je tente de d i r e \" : Tenter, c'est de\"ja f a i r e un e f f o r t , un pas vers7.1'objet. Le s u j e t ne se r e s t r e i n t plus n i ne r e s t e p a s s i f ; i l veut se rapprocher de 1'objet. I I a commence\" a a g i r . \" j ' a i f a i l l i d i r e \" : Le s u j e t e t a i t sur l e p o i n t de d i r e quelque chose, mais c'est 1'objet q u i de\"ja commence a a f f i r m e r son autonomie en s'imposant au s u j e t . C e l u i - c i a d E c r i t \"un feu tout imaginaire\" mais tout de s u i t e , s*impose a l u i 1'idEe d' \"un f e u q u i p e r d i t son image\". L'objet done ne veut plus e t r e d i t , i l veut se d i r e a t r a v e r s l e - s u j e t . I I semble que l e s c r i p t e u r ne va plus d i r e , mais va etre d i t . \"Je veux d i r e \" : Cette modality prEdomine dans l a micro-sequence. V o u l o i r i c i exprime non plus une volonte\" a d i r e , mais a r e d i r e . Le s u j e t v i s e a une plus grande p r e c i s i o n dans ce q u i est d£ja d i t : i l cherche a remplacer une forme premiere de l a pensEe par une autre plus acceptable. Le s c r i p t e u r veut etr e compris et r i e n n'engendre mieux l a comprehension que l a p r e c i s i o n . Un exemple: (Noy. 20): \"Brusquement j ' a i p r i s l a mesure du temps, de mon age, des annEes, je veux d i r e des annSes en dehors de moi, des annSes o b j e c t i v e s comme dans un roman r e a l i s t e . \" Dans c e t t e expression modale, 1*objet a t t e i r i t est r e j e -te et repla c e a d i s t a n c e . Le s u j e t , ayant a b o l i l a distance entre l u i et 1*objet: \"Brusquement... des annees\", r e c o n s t i t u e 84-une nouvelle distance \"je veux dire\" qui l u i donnera 1'eTan ntcessaire pour atteindre son nouveau but \"des anntes en dehors..* rSaliste\". En meme temps, \"je veux dire\" f a i t entrevoir une cer-taine impuissance chez le scripteur a exprimer au premier coup, une pensSe precise et satisfaisante. II ne va pas droit au but. C'est done qu'il y a: : une force au-dela de l u i qui le rend imprtcis et incertain de son acte. Cette micro-sequence \"ModalitSs du dire\" renferme done les germes d'une transition de l a certitude a 1'incertitude. L'acte de raconter n'appartient pas totalement au scripteur: le code qu'il u t i l i s e est peut-etre en train de l ' u t i l i s e r . (v) Micro-sequence \"Contexte\": Les noyaux de cette sequence designent l'ecriture du roman comme le contexte meme de ce roman. La fonction refe-rentielle du langage se degage i c i ou le langage renvoie non pas a un monde exterieur appeie monde reel, mais au texte l u i -meme. Le contexte, c'est le texte. L'acte d'ecrireest mon-tre du doigt comme dans les noyaux suivants: (Noy. 23): \"Je l ' e c r i s . \" (Noy. 4-0): \"Et quoi de plus.je t'ecris, Fougere.\" (Noy. 4-1): \"Je t'ecris, n'est-ce pas tout dire? Tout n'est, que j'ecris, qu'une lettre, une lettre sans f i n vers t o i . \" (Noy. 6 7 ) : \"Fougere, je t*e\"cris'pour m'excuser d'Scrire\" (Noy. 82): \"C'est vrai que je l u i Scris a elle, et que je ne l u i montre pas ce que j'ecris (...) a n'en plus f i n i r \" (Noy. 95): \"Tout ceci je l ' e c r i s \" (Noy. 135)! \"Si jamais ce que j'Scris sur ce papier y demeure\" (Noy. 1^3): \"J'Scris cela, ne sachant trop s i quelqu'un le l i r a \" . L*ecriture du recit, on le note, comprend aussi celle des lettres a FougSre. II existe une ambiguite dans \"Je t'Scris, Fougere\" ou le pronom personnel \"te\" peut etre soit complement d'objet indirect (J'Scris a toi) soit complement d'objet direct (Je t'Scris: je te donne existence sur papier). L*£criture dote Fougere de deux aspects: elle l a f a i t person-nage d'une histoire, et metaphore de personnage dans une plus grande histoire ou elle joue le role du pronom \"Tu\". E l l e est femme a laquelle celui qui ecrit destine ses lettres, et en meme temps elle est l'espace vide du pronom personnel ou entre son role de lectrice. Les lettres ecrites a Fougere, dormant 1 ' i l l u s i o n d'une realite f i c t i v e font en realite partie de l a f i c t i o n de 1 'ecri-ture. Elles sont aussi des metaphores de 1*ecriture: 86 (Noy. 4-1): \" T o u t n ' e s t , que j ' e c r i s , qu'une l e t t r e , une l e t t r e s a n s f i n v e r s t o i \" . T o u t e f o i s , comme on l ' a d i t , e l l e s . ne c o n s t i t u e n t pas t o u t e l ' e c r i t u r e de L a M i s e a mort c a r meme a u n i v e a u de l a r e a l i t e \" f i c t i v e , i l f a u t d i s t i n g u e r e n t r e l e s c r i p t e u r v i s - a - v i s d'une 20 21 femme e t l e s c r i p t e u r v i s - a - v i s de s o n t e x t e comme l e montre l e n o y a u 82: \" C ' e s t v r a i que j e l u i e \" c r i s a e l l e , e t que j e n e l u i montre p a s ce que j ' e \" c r i s (...) a n ' e n p l u s f i n i r \" . L a 3§me p e r s o n n e \" e l l e \" r e l e g u e F o u g e r e a u n S t a t p l u s <§loign£ du s c r i p t e u r q u i e s t m a i n t e n a n t t o u r n S v e r s s o n t e x t e e t s o n l e c t e u r . M a i s de q u e l l e t o i l e e s t tisse-.. l e t e x t e ? D'un roman en t r a i n de se f a i r e , q u i s ' a p p e l l e L a M i s e a m o r t . L e s c r i p -t e u r m ontre que ce q u ' i l e c r i t e s t ce que l e l e c t e u r l i t : (Noy. 9 5 ) : \" T o u t c e c i j e l ' e c r i s \" (Noy. 1 3 5 ) - \" S i j a m a i s ce que j ' S c r i s s u r ce p a p i e r \" (Noy. 14 - 3 ) : \" j ' e c r i s c e l a \" L ' a c t e q u i f a i t L a M i s e a mort e s t c e l u i de l ' e c r i t u r e . On l ' a d e j a d i t , l ' e c r i t u r e r t c u p e r e t o u j o u r s l a p a r o l e e t l a c o n s t i t u e e n d u r S e . Ce que d i t , c e que r a c o n t e l e s c r i p t e u r ne s ' e n v o l e p a s m a i s d e v i e n t l a t r a c e c o n t i n u e l l e d'un c a d r e s a n s c e s s e s ' S p a i s s i s s a n t q u i d e v i e n d r a l e l i v r e . L e s c r i p -t e u r p e u t done r e v e n i r s u r s e s pas e t r e t r o u v e r ce q u i e s t 87 deja t r a c t p u i s q u ' i l l ' a nomme: \" J ' a u r a i s p r E f E r e l i r e 'Le M i r o i r de V e n i s e ' \"(noy. 85) - t e l e s t l e t i t r e du p r e m i e r c h a p i t r e de L a Mise a mort; l e s c r i p t e u r pense a ce c h a p i t r e quand i l t e n t e d'exposer a Fougere un debut du roman. T a n t o t i l dSbute une anecdote: \" I c i commence, mon amour, l - ' h i s t o i r e de l a g l a c e sans t a i n . \" (noy. 6 8 ) . S ' e n s u i t l ' h i s t o i r e nom-inee; t a n t o t i l commente s u r l e t i t r e d'un c h a p i t r e : \" S a c h e - l e , 22 b i e n que.du Roman de Fougere , j e n ' a p p e l l e que c e t t e p a r t i c i 'Le M i r o i r t o u r n a n t ' . . . \" (noy. 1 1 4 ) . Les t r o i s c o n t e s : Murmure, Le C a r n a v a l e t Oedipe aux-q u e l s se r e f e r e l e s c r i p t e u r s o n t I n d u s dans l a p r e s e n t a t i o n du roman de s o r t e q u ' i l s en forment une p a r t i e . \"Tout c e c i , j e l ' e c r i s , pour l e s r e f l e x i o n s en moi qu'a provoquees Murmure\" (noyau 9 5 ) , e t l e l e c t e u r , comme l e s c r i p t e u r , a deja p r i s c o n n a i s s a n c e de ce nomme c o n t e . I I p r e s e n t e tr£s t o t l e t r o i -si§me con t e Oedipe (noyau 96) 2 -^ e t f a i t s a v o i r q u ' i l v a b i e n -t o t i n c l u r e Le C a r n a v a l , l e deuxieme conte (noyau 96) a u q u e l 24 i l r e v i e n t aprds une d i g r e s s i o n (noyau 97) Le roman q u i se f a i t se v o i t , a i n s i , reflete a p l u -s i e u r s p o i n t s p a r c e qu'a ces p o i n t s - l a i l a ete nomme. Le l e c t e u r en se r e n v o y a n t au c o n t e x t e s'y v o i t lui-meme p u i s q u e c ' e s t s a l e c t u r e q u i donne forme a L a Mise a mort: en l i s a n t l e s t r o i s c o n t e s , i l l e s i n s e r e dans ce roman. Ces c o n t e s d e v i e n n e n t p a r t i e du roman. L a communication e n t r e s c r i p t e u r e t l e c t e u r se v o i t i c i r e n f o r c e e p u i s q u e t o u s deux p a r t a g e n t 88 l e meme contexte. C'est l a , une instance ou e c r i t u r e et l e c t u r e se re v e l e n t comme l e s deux f a c e t t e s d'un se u l et meme acte, c e l u i de l a c r e a t i o n du sens. 9 - Re\"sume de 1'analyse de l a sequence 2: Dans c e t t e grande sequence: \"Je raconte\", l e s c r i p t e u r se s i t u e dans l e contexte de son t e x t e . La, i l raconte en suivant ses propres i n c l i n a t i o n s : i l c h o i s i t d'abandonner un f i l du r t c i t pour en reprendre un autre. Sur de l u i , i l se sent indulgent envers l e l e c t e u r q u ' i l prend comme complice. T o u t e f o i s , en d t p i t de ce rapprochement intime entre s c r i p t e u r et l e c t e u r , perce un e f f e t d'omniscience chez c e l u i q u i racon-t e . En revanche, i l rend l e l e c t e u r a u s s i omniscient que l u i en l'admettant dans l e jeu de l ' e c r i t u r e . Lecteur et s c r i p -t e u r s'unissent contre l e s elements du t e x t e : c e t t e b e l l e confiance rSciproque est d§ja apparente des l e premier noyau du texte dans \" j e vous demande un peu\". Mais on p e r c o i t a u s s i dans l ' a c t e de d i r e une- i n c e r t i -tude encore inconnue du s c r i p t e u r . D i r e chez l u i s'effectue souvent par m o d a l i t t s . C'est done q u ' i l ne d i t pas toujours ce q u ' i l veut. V i s - a - v i s du l e c t e u r , i l se sent un de v o i r de se j u s t i f i e r comme s i une plus grande p r e c i s i o n a i d e r a i t l e l e c t e u r a l e mieux comprendre. Le t e x t e n'est done, pas p a s s i f sous l a main du s c r i p -t e u r . L ' e c r i t u r e elle-meme r t a g i t - e l l e contre l a suprtmatie de c e l u i q u i t c r i t ? C'est ce que nous verrons dans 1'analyse 89 de l a sequence 3: \"Je s u i s raconte\". 10 - Analyse de l a sequence 3 \"Je s u i s raconte\": Cette grande sequence c o n t i e n t a u s s i c i n q micro-sequences. Comme pour l a sequence 2, on donne i c i l a c o n s t i -t u t i o n en c h i f f r e s de chaque micro-sequence de l a sequence 3. ( i ) Micro-sequence \"Confusion\": 274- 33 4- 444- 45 -f- 88 ( i i ) Micro-sequence \" L e i t m o t i v 1 1 \" : 484- 49-f- 50 4-51 -k54 ( i i i ) Micro-sequence \" L e i t m o t i v 2\": 704- 714- 72+ 73 + 74 +. 75 -h 76 4 78-)- 78 -+-84 ( i v ) Micro-sequence \" L e i t m o t i v 3 \" : 108 4- 1094-110 4-111+ 112+- 1144- 1164\" 120+ 121+ 122 4- 1234- 1 2 4 + 1254 127 90 (v) Micro-sequence \" P e r t e de c o n t r o l e \" • 36+ 4 7 + 5 7 + 5 8 + 6 9 + 8 3 + 86 + 100- + 1 0 3 4 - 1 1 7 + 118 + 1 2 6 + 1 2 8 + 1 3 0 + 131 + 141 ( i ) M i cro-sequence \" C o n f u s i o n \" : Dans c e t t e m icro-sequence, c ' e s t l a c o n f u s i o n q u i l i e l e s noyaux e t dont l e s c r i p t e u r prend c o n s c i e n c e . I I e s t des moments ou i l admet e t r e c o n f u s : (Noyau 3 3 ) : \"Toutes l e s images se b r o u i l l e n t dans ma t e t e \" ; (Noyau 4-5): \"Me pa r d o n n e r a s - t u , F o u g e r e , d ' g c r i r e , de t ' t c r i r e avec meme c o n f u s i o n ? \" (Noyau 8 8 ) : \"Oui, j e mele t o u t \" . I I e s t p a r f o i s s i c o n f u s q u ' i l ne s a i t p l u s ce q u ' i l d i t : (Noy. 27) \"Qu'est-ce que j e d i s ? \" . C'est l a une a u t r e m o d a l i t S du d i r e chez l e s c r i p t e u r : c e t t e f o i s - c i i l a a t t e i n t son b u t ; i l a d i t quelque chose. Le s u j e t possede 1 ' o b j e t mais c ' e s t pour e t r e possede\" a son t o u r p u i s q u e ce q u ' i l d i t l u i p a r a i t insense\" e t n ' e s t pas ce q u ' i l a v o u l u d i r e . I I y a done, une f o r c e e x t e r n e q u i l e re\"duit en t e x t e e t l e d i t sans q u ' i l p u i s s e s'en empecher. 91 ( i i ) Micro-sgquence \"Leitmotiv 1\": Le leitmotiv est i c i \"II ne s'agit pas de moi\". On note un dSroulement presque consScutif des noyaux de cette micro-sgquence. Ce leitmotiv sert a freiner le scripteur dans son SI an a parler de l u i , mais c'est en rgalit£,, 1 'expression d'un dgsir obsgdant a ne pas se laisser entrainer par le texte en marche. C'est 1'enchainement des propos dans le texte qui 1 ' i n c i t e a parler de.\"-lui, et le scripteur tout en s'excusant de son ggoisme, lutte en meme temps contre le texte. Le scrip-teur veut parler d*autre chose que de son propre passg mais le texte le tire toujours vers ce passg-la. ( i i i ) Micro-sgquence \"Leitmotiv 2\": Signalons le leitmotiv i c i : \"raconter\". I c i aussi les noyaux s'enchainent de facon quasi-chronologique sauf pour le noyau 84 2 5 et 1'absence de noyau 7 7 ^ . Le scripteur dgcide de raconter un certain soir de son passg a Fougere, mais i l s'apercoit qu'il ne sait comment le faire. On percoit dans les noyaux un dgveloppement qui engendre un nouvel glgment servant l u i aussi de leitmotiv: \"milieu\". (Noy. 7 0 ) : \"AComment te le raconter,ce soir,'de ma place*?\" (Noy. 7 1 ) : \"Comment raconter un reve du milieu?\" Dans le noyau 7 1 , les deux glgments du leitmotiv sont prgsents; mais aussitot, le scripteur constate que raconter une histoire du milieu est d i f f i c i l e : 92 (Noy. ?2): \"Voila, on se met a raconter, et c'est d i f f i c i l e , une h i s t o i r e du milieu, l e s details affluent q u ' i l faut expliquer.\" II se perd dans l e milieu (Noy. 7 3 ) ^ et trouve qu'on ne peut p Q r i e n raconter (Noy. 74-) pour finalement constater: (Noy. 75) \"On ne peut r i e n raconter du milieu.\" Parvenu l a , l e scripteur se reVolte: i l veut a tout prix 29 raconter (Noy. 76) • Mais apres une autre tentative, i l trouve que raconter du-milieu est tres compliqut (Noy. 78) et que \"du milieu, tout a un autre sens\". (Noy. 7 9 ) ' Pour c e l u i qui semblait s i maitre de son h i s t o i r e , v o i l a que raconter une anecdote devient tache d i f f i c i l e . Tout d'abord, pourquoi raconter \"du milieu\"? Une h i s t o i r e qui se dSroule d'apres une structure suivie du dtbut jusqu'au denoue-ment demontre l a maitrise de c e l u i qui l a raconte; une h i s -t o i r e racontte du milieu peut toujours impliquer un choix volontaire du raconteur mais s i c e l u i - c i admet q u ' i l l u i est impossible de raconter du milieu, c'est que l ' h i s t o i r e e l l e -meme se di f f u s e en plusieurs directions t e l l e une t t o i l e avec ses rayons divergeant du centre - image dont se sert l e s c r i p -teur lui-meme (Noy, 8k)^* - et renferme l e scripteur qui ne s a i t plus ou i l en est. II est apparent que dans cette micro-stquence, l'acte de raconter n'appartient plus totalement au scripteur. 93 (iv) Micro-sgquence \"Leitmotiv 3\": Le motif r S p g t i t i f de cette micro-sgquence est l e miroir tournant. Le scripteur remgmore le-passg: apres cha-que passage du leitmotiv, l a scene change. L'apparition du leit m o t i v est frgquente et s'effectue a courts i n t e r v a l l e s , mais sous divers temps: l e plus-que-parfait dans l e noyau 111, l e passg dans l e s noyaux lo8, 116, 121 et 127, et l e prgsent dans l e s noyaux 120 et 125• Cette v a r i a t i o n dans l e s temps du lei t m o t i v semble confirmer ce qu'en d i t l e scripteur l u i -meme dans l e noyau 114-: \"Sache-le, bien que, du Roman de Fougere, je n'appelle que cette part i c i 'Le Mi r o i r tournant', i l me faut avouer par ce t i t r e que se dgvoile quelque chose injustement qu'on t i e n -d r a i t pour procgdg, et procgdg seulement par quoi se f a i t enchainement des paroles profondes dont je suis habitg, combat-tu, dgchirg, mis hors de moi-meme.\" Le lei t m o t i v i c i n'est pas &. chaque f o i s employg pour indiquer un changement de souvenirs t e l l'emploi conscient d'un changement de paragraphes. Ce n'est pas un procgdg consciemment appliqug par l e scripteur au texte, c'est un procgdg produit par \"enchainement de paroles profondes\". A i n s i , est-ce par rapport a l a distance qu'gprouve l e scripteur v i s - a - v i s d'un souvenir que se prgcise l'acte de tourner du miroir dans un temps p a r t i c u l i e r . Le prgsent rapproche l e scripteur du texte: (Noyau 125): \"Le miroir tourne... i l accroche un mur, un arbre, une gtreinte.\" C'est l e s e u l temps ou l e s c r i p t e u r e s t t o u j o u r s c o n s c i e n t de son t e x t e e t ou l a d i s t a n c e e n t r e s c r i p t e u r e t s o u v e n i r e s t n e t t e , b i e n t r a n c h t e . Le l e i t m o t i v , i c i , p o u r r a i t a p p a r a i t r e comme p r o c t d t c o n s c i e n t du s c r i p t e u r . Le passe compost r a p p r o c h e l e s c r i p t e u r d'un s o u v e n i r r S c e n t : (Noyau 116): \" e t l e m i r o i r a autrement tourne\" pour l e nom d ' A q u i t a i n e en chemin (...) d'un c h e v a l . \" Le s c r i p t e u r s ' t l o i g n e du t e x t e pour e t r e p l u s p r e s du souve-n i r t v o q u t . Le p l u s - q u e - p a r f a i t r a p p o r t e l e s c r i p t e u r v e r s un s o u v e n i r l o i n t a i n : (Noyau 1 1 1 ) : \"Le m i r o i r a v a i t encore t o u r n t . Que d i s a i t I n geborg?\" Le s o u v e n i r i c i e s t l o i n t a i n p u i s q u ' t v o q u t p a r I n g e b o r g , f i t -ment f i c t i f du t e x t e . L a d i s t a n c e e n t r e s c r i p t e u r e t s o u v e n i r diminue encore t a n d i s que l e l e i t m o t i v s ' S l o i g n e du t e x t e . C e t t e d i s t a n c e t e m p o r e l l e , i l f a u t l e p r t c i s e r , n ' e s t pas p r o -c t d t c a l c u l t du s c r i p t e u r . C ' e s t l e t e x t e q u i l u i impose ce p r o c t d t : en r a c o n t a n t , l e s c r i p t e u r e s t s u r p r i s dans l e tem-p o r e l c o n c e n t r i q u e de ses s o u v e n i r s . Tout en r a c o n t a n t , i l d e v i e n t p r i s o n n i e r du t e x t e q u i l e r a c o n t e m a i n t e n a n t . (v) M i c r o - s t q u e n c e \" P e r t e de c o n t r o l e \" : I c i , l e s c r i p t e u r se r e n d compte du f a i t que l e r t c i t manque de c'ohtrence e t de forme: (Noyau 4-7): \"Mais ou done mon r t c i t s ' e m b r o u i l l e . On se p e r d . On se c a s s e . \" 95 I I se t r o u v e devant une masse i n f o r m e E c r i t e e t se demande comment i l l a l i r a a Fougere: (Noyau 8 3 ) : \"Comment d ' a i l l e u r s - r i e n n'a encore s a forme, n i s a p l a c e dans un o r d r e ou un a u t r e , - l i r e ce que j ' S c r i s a Fougere?\" C'est l a une pr e m i e r e i n d i c a t i o n d'une p e r t e de c o n t r o l e s u r l e t e x t e . I I e s t des moments a u s s i ou quelque presence l u i t i e n t l a plume : dans l e noyau 57 \"^2» en v o u l a n t changer d'anecdote, i l se v o i t force\" a d e v o i l e r une p a r t i e de s a v i e . De meme, i l commente l ' h i s t o i r e d'Qedipe, l e t r o i s i e m e conte du roman t r e s t o t avant s a p a r u t i o n meme e t d i t : \"Mais qu'y p u i s - j e ? E l l e m'est sautSe aux yeux a r e l i r e l a d a c t y l o g r a p h i e , i c i e t pas a i l l e u r s \" (Noyau 8 8 ) . Meme l a n a i s s a n c e e t l e c o n t r o l e de ses \"personnages\" ne l u i a p p a r t i e n n e n t p l u s , i l s l u i e*chappent: \"Dans c e l l e - c i d ' h i s t o i r e , i l y a quelque chose q u i c l o c h e : comment se f a i t - i l que C h r i s t i a n nous c o n n a i s s e t o u s l e s deux, A n t h o i n e e t moi,...\" (Noyau 58) Deux f o i s au c o u r s du t e x t e , i l semble e t r e s u r p r i s p a r l e s mots: \" j ' a t t e n d a i s ma ' l i a i s o n ' . . . t i e n s , comme l e s mots v a r i e n t . . . \" (Noyau 36). ou encore: \" T i e n s , j e n ' a i pas acheve* ma phrase des b a i s e r s . \" (Noyau 1 0 0 ) . L ' u n i v e r s du t e x t e , s i l ' o n v e u t , l u i cache encore des s u r -p r i s e s . PrSoccupe p a r l e t e x t e dont i l note 1'absence de forme e t p a r lui-meme q u i n ' a r r i v e p l u s a d E c r i r e ce q u ' i l 9 6 33 v e u t v , l e s c r i p t e u r s'acharne v e r s l e chaos. Le t e x t e l u i tchappe e t d e r i v e : \" R i e n ne v a p l u s \" (Noyau 126). En meme temps, l e doute de s a m a i t r i s e s u r l e t e x t e l ' e n v a h i t . I I se s e n t lui-meme perdu, ne sacha n t ce q u ' i l d i t - ^ n i ou i l en e s t dans ce q u ' i l dit-*--'. Le s u j e t de d i r e e s t e n v a h i p a r 1 ' o b j e t : l a r u p t u r e s ' i n s i n u e e n t r e s u j e t e t o b j e t . Ce d e r -n i e r semble r t c l a m e r son autonomie devant l e s u j e t q u i f i n a l e -ment se t o u r n e v e r s l ' a c t e meme de d i r e pour y t r o u v e r une v o i e : \"Qu'est-ce que j e d i s ? \" E t i l a b o u t i t a un aveu: \"Je d i s des mots pour m'Sgarer. J e me joue e t vous joue une p i e c e \" (Noyau 14-1) . Mais e s t - c e l a l ' a v e u v o l o n t a i r e du s c r i p t e u r q u i de-v o i l e son jeu? On v e r r a i t p l u t o t une excuse de l a p a r t du s c r i p t e u r q u i t e n t e t o u j o u r s de f a i r e c r o i r e que l ' a c t e de r a c o n t e r . l u i a p p a r t i e n t : i l dupe son l e c t e u r e t i l se dupe. Le r S f l e x i f t o u t e f o i s s ' i n c a r n e en Judas pour l e t r a h i r : on ne se dupe pas de f a c o n s i c a n d i d e . \"Se j o u e r une p i e c e \" , c ' e s t encore s i g n e de mauvaise f o i du s c r i p t e u r a ne pas avouer qu'on l u i joue une p i e c e e t que c e t \"on\" i m p e r s o n n e l n ' e s t r i e n d ' a u t r e que son p r o p r e t e x t e . Le s c r i p t e u r s ' e s t c o n s t r u i t . un l a b y r i n t h e ou i l se p e r d . 97 11 - Resume\" de 1 ' a n a l y s e de l a sequence 3: L a g r a d a t i o n v e r s une d e s t r u c t i o n du mythe de 1'auteur o m n i s c i e n t se f a i t p l u s marquee dans c e t t e sequence: l ' a c t e de r a c o n t e r s'avere e t r e p l u s c o m p l i q u t que ne l ' a p e n s t l e s c r i p t e u r . I I y a des moments de c o n f u s i o n q u i p r S c o n i s e n t l a p e r t e de c o n t r o l e v e r s l a f i n . Les l e i t m o t i v s d t v o i l e n t une t e n t a t i v e du s c r i p t e u r pour ne pas se l a i s s e r p r e n d r e au p i e g e p a r l e t e x t e , d'ou, son gchec p u i s q u e l e t e x t e l e commande comme on l ' a vu dans l e s t r o i s m i c r o - s e q u e n c e s c o n t e -nant l e s l e i t m o t i v s . En e f f e t , l e t e x t e devenu a c t i f englobe l e s c r i p t e u r : t e l s e r a dans L a Mise a mort l e denouement q u i t r a n s p a r a i t d e j a dans l a n a t u r e ambigue du noyau 144-. G e l u i -c i p a r t i c i p e e t a l a sequence 2 e t a l a sequence 3 : \"Tout c e c i me v i e n t a propos de b o t t e s , s e m b l e - t - i l , mais c e n t t r e n t e - n e u f ans a p r e s l a v i s i t e de C e l e s t e B u i s s o n (...) L ' h i s t o i r e a r r i v e au bout d'elle-meme, Maman.\" Noyau de l a sequence 2 \"Je r a c o n t e \" , ce j e t de propos semble e t r e r e c u e i l l i dans un c a r n e t a s o u v e n i r s ou l e s c r i p t e u r mar-q u e r a chaque etape f a i t e au c o u r s de c e t t e promenade a P a r i s . C ' e s t , a l o r s , l e s c r i p t e u r q u i c o n t i n u e son h i s t o i r e s u r p a p i e r . Ce noyau 14-4 a a u s s i s a p l a c e dans l a sequence 3 \"Je s u i s r a c o n t e \" ou a p a r t i r de l u i , on p r e s s e n t que l e r o l e du s c r i p t e u r e s t joue p a r p l u s i e u r s au d e t r i m e n t d'un s e u l e t r e consequent d i s a n t \" J e \" t o u t au l o n g du t e x t e . Le \" J e \" se promenant dans l e s r u e s de P a r i s peut ne pas e t r e ce \" J e \" 98 qui se bat avec son texte. Le scripteur est a i n s i soumis au dynamisme du texte: l e noyau Ikk est aussi l e dernier signa-lant sa presence. Le scripteur, dSsormais, sera, comme ses personnages, element f i c t i f et esclave de 1 ' E c r i t u r e : en d'autres termes, i l sera raconte. 12 - La syntaxe des 3 grandes sEquences de \"La Mise a mort\": Les 3 grandes sEquences constituent done, l e passage d'une tentative de communication a l'Echec dans l a communica-tio n . Dans l a sSquence 1, on a vu q u ' i l y a eu un changement dans 1 *attitude du scripteur envers son lecteur q u ' i l semble r e j e t e r a l a f i n . La sSquence 2 presente un scrip t e u r i n d u l -gent qui f a i t partager au lecteur l a maitrise, pourtant incertaine, de son texte. Dans l a sSquence 3» c'est l a d E f a i -te du scripteur v i s - a - v i s du texte: en prenant conscience de 1 'aspect chaotique de son r e c i t et de sa s i t u a t i o n instable, le scripteur admet que son h i s t o i r e ne pourra etre comprise^ . A i n s i , l a syntaxe des 3 grandes sequences se caractS-r i s e par l e f a i t que l e dSveloppement de chaque sSquence s'imbrique dans ceux des autres. Les sEquences se chevauchent: c'est pour cela que l e r E c i t de La Mise a mort n'est pas l e dSveloppement l i n E a i r e d'une tentative de communication. Les sentiments du scripteur dans cette tentative se prSsentent sous forme d'un imbroglio d'hesitations, d'instants d'espoir 99 et de dSsespoir; et c'est vers l a f i n lorsque l e s phrases deviennent plus chaotiques que l e s 3 sequences semblent se converger pour confirmer l e r e j e t du l e c t e u r en t a n t que point rScepteur dans l a t e n t a t i v e de communication. Le s c r i p t e u r l a i s s e entendre que l e l e c t e u r devient sa dupe, q u ' i l n'y a vraiment pas de v a l e u r s a l u i communiquer et q u ' i l s'est s e r v i de l u i comme spectateur p a s s i f . Comme on l ' a d i t , l'Emetteur aux p r i s e s avec l e code se renferme sur lui-meme; l e langage assume l a f o n c t i o n Emotive au detriment de l a f o n c t i o n cona-t i v e : l e rScepteur indispensable au dSbut de l a t e n t a t i v e se vide de son importance a mesure que l'Emetteur l u t t e avec l e code et s'Sgare de plus en plus dans l e l a b y r i n t h e de son t e x t e . Des t r o i s SISments de base de l a communication: c e l u i qui p a r l e , c e l u i a q u i l'on p a r l e et c e l u i dont on p a r l e , l e t r o i s i e m e SISment, au l i e u de crSer un l i e n entre l e s deux autres, seme l a discorde et s*impose. A i n s i , s c r i p t e u r et l e c t e u r de La Mise a mort r e s t e n t deux e n t i t S s sSparSes t a n d i s que s'affirme l a suprSmatie du texte q ui a trouvS forme dans l a t e n t a t i v e de communication. La Mise a mort est done l a communication d'une non-communica-t i o n . 100 NOTES Noyau: Ce terme r e m p l a c e r a desormais l a f o n c t i o n c a r d i n a l e au l o n g de c e t t e t h e s e a f i n d ' S v i t e r une c o n f u s i o n e n t r e l e s d i f f t r e n t e s d e f i n i t i o n s du terme \" f o n c t i o n \" . 2 R. B a r t h e s , \" I n t r o d u c t i o n a 1 ' a n a l y s e s t r u c t u r a l e des r S c i t s , \" Communications, 8, 1966, p. 8 . J R e d u c t i o n a r b i t r a i r e de n o t r e p a r t , d'une pr e s e n c e p l u r i e l l e a l a q u e l l e s ' a d r e s s e l e s c r i p t e u r . On s a i t q u ' i l p a r l e a ses l e c t e u r s : mais au s i n g u l i e r ou au p l u r i e l , c ' e s t l a p resence d'un \"vous\" q u i compte l e p l u s i c i . L F.7\". Guyon, \"Le Nouveau roman comme c r i t i q u e du roman,\" Nouveau Roman: h i e r , au.jourd'hui, I , p. 2 2 0 . ^ R. Jakobson, E s s a i s de l i n g u i s t i q u e g e n e r a l e , pp. 2 8 - 2 9 . 6 F.V. Guyon, op. c i t . , p. 2 2 2 . ^ Homme e t homme: C'est l a une i d t e du l i n g u i s t e G. G u i l l a u m e , i d t e q u i a ete soumise a une p r e m i e r e p a r a p h r a s e chez C h r i s t o Todorov dans son e s s a i \"La H i e r a r c h i e des l i e n s dans l e r e c i t , \" S e m i o t i c a , 3 , 1971 . pp. 1 2 2 - 3 9 . 8 V o i x : p a r l a , on entend n a t u r e l l e m e n t l a c a t e g o r i e g r a m m a t i c a l e . 9 Ce r e l e v e de f o n c t i o n s c a r d i n a l e s dans L a Mise a mort, quoique e x h a u s t i f , n ' e s t pas p a r f a i t e m e n t c o m p l e t . Un o r d i n a t e u r a u r a i t mieux f a i t l e t r a v a i l . T o u t e f o i s , on peut d i r e avec c o n f i a n c e que, s i quelques noyaux ont e t e omis, c e t t e o m i s s i o n n ' a g g r a v e r a i t en r i e n l e b i e n - f o n d e de c e t t e a n a l y s e . C e l l e - c i se fonde s u r l e s noyaux dont 1 ' i m p o r t a n c e r e s i d e non pas en ce q u ' i l s s o n t , mais en l a r e l a t i o n q u ' i l s e n t r e t i e n n e n t e n t r e eux. 10 11 d i n a l e s . 12 R. B a r t h e s , op. c i t . , p. 1 3 . Les c h i f f r e s r e n v o i e n t a l a l i s t e des f o n c t i o n s car-R. B a r t h e s , op. c i t . pp. 14 - 1 5 . 101 A d i f f S r e n c i e r de l a \" f o n c t i o n \" de B a r t h e s . I c i , \" f o n c t i o n \" a l e sens de \" r o l e \" , \"usage\". On a s i g n a l ^ ( n o t e 1) que pour S v i t e r t o u t e c o n f u s i o n , on a p p e l l e r a l a f o n c t i o n c a r d i n a l e \" l e noyau\". Le terme \" c a t a l y s e \" s e r a u t i l i s e \" pour l a f o n c t i o n c a t a l y s e . 14 R. Jakob s o n , op. c i t . , pp. 214 - 2 2 2 . D*autres noyaux s o n t 81, 9 1 , 94 e t 1 1 5 . (Noyau 9 1 ) : \"Et m o i . j e vous Spargne t o u t ce q u ' i l p a r u t a A n t h o i n e i m p o s s i b l e a p a s s e r sous s i l e n c e de Byzance a Chypre,\" ^ E t a u s s i l e s noyaux 1 3 0 , 1 3 7 , 1 3 8 . On compte a u s s i l e s noyaux 17 , 2 0 , 2 3 , 64, 1 2 9 . Mais non pas l e degre\" zSro de l ' S c r i t u r e p u i s q u e c e l l e - c i r S c a p i t u l e ce q u i a ItS o u b l i S p a r l a p a r o l e . 20 F i c t i o n C ( v o i r c h a p i t r e I de c e t t e t h e s e ) . 18 19 21 22 N a r r a t i o n B ( v o i r c h a p i t r e I ) . Un p r e m i e r t i t r e de L a Mise a mort. C i t o n s Aragon dans Je n ' a i .jamais a p p r i s a S c r i r e ou l e s i n c i p i t : \"Je veux d i r e comment j e s u i s entre\" dans ce Roman de Fougere, comme j ' a i f a i l l i d'abord l ' a p p e l e r . \" 2 3 J (Noyau 9 6 ) : \"Mais n i de c e l a , n i de 1 ' i n v e n t i o n pure e t s i m p l e d'Oedipe, a i n s i s ' i n t i t u l e , l ' a i - j e d i t ? l e t r o i s i e m e c o n t e de l a chemise rouge, r i e n ne peut e t r e c l a i r a vant l a l e c t u r e de ces h i s t o i r e s . Pas s u r , e n t r e nous, que c e l a l e devienne a p r e s . J e t i e n s p o u r t a n t a remarquer d'abord, avant d ' i n c l u r e i c i Le C a r n a v a l , q u ' i l y a une chose dont A n t h o i n e n'a pu se r e t e n i r . \" 2 4 (Noyau 9 7 ) : \"J'en r e v i e n s done au C a r n a v a l , e t , ce q u i semble se j u s t i f i e r p a r l ' S p i g r a p h e de Rimbaud a ce q u i s u i t , j e ne r e c o n n a i s p l u s c e l u i q u i p a r l e , c e t a u t r e moi, mais un a u t r e a chaque f o i s que l e s o u v e n i r v i e n t l ' S c l a i r e r . \" 2 ^ (Noyau 8 4 ) : \" c ' e s t - a - d i r e que d'ou que j e p a r t e , ce s e r a i t l e d S s o r d r e des S t o i l e s . . . t e n e z , une e x p r e s s i o n comme c a , i l f a u d r a i t d i x l i g n e s pour s'en s o r t i r . D'ou que j e p a r t e , j e s e r a i s S c a r t e l S e n t r e mes r a y o n s . \" 102 26 (Noyau 77) '• \"Comment v o u l e z - v o u s qu'on me com-prenne? I I me f a u d r a i t t o u t e x p l i q u e r , d i x , j e ne s a i s pas, q u i n z e gargons de mon age (...) E t dans t o u t c a , l e Dr. J e k y l l e t Mr. Hyde, j e veux d i r e , a l ' e n v e r s , I s i d o r e Ducasse e t l e comte de LautrSamont... ga, au moins, ga e x i g e r a i t un d S v e l o p -pementl N'y comptez pas.\" t u \" 27 (Noyau 73) '• \"Je me perds dans l e m i l i e u , comprends-28 (Noyau 74-): \"On ne peut r i e n r a c o n t e r . On c r o i t s a v o i r ce qu'on r a c o n t e , \" 29 (Noyau 7 6 ) : \"Mais e n f i n c ' e s t f o u , j e veux, j e veux r a c o n t e r ce s o i r - l a . \" 30 m i l i e u . \" (Noyau 7 8 ) : \"Comme t o u t e s t compliquS! Vu du 3 1 V o i r note n° 2 5 . op (Noyau 5 7 ) : \"Je vous p a r l e r a i p e u t - e t r e a u s s i d'une a u t r e s o r t e d'emotion (...) Ce q u i me f o r c e a d S c o u v r i r un a u t r e c o t S de ma v i e , a l o r s que j e m'Stais promis de l e l a i s s e r en dehors du Roman de Fougere, p a r c e q u ' i l s ' a g i t l a d'un monde Strange de r a p p o r t s , l e s q u e l s e x i g e r a i e n t des e x p l i c a t i o n s sans f i n . \" 33 (Noyau 1 0 3 ): \"Vous voyez b i e n que c ' e s t i m p o s s i b l e , q u ' i l v a u t mieux changer de s u j e t de c o n v e r s a t i o n . \" 34-(Noyau 128): \"Qu'est-ce que j e d i s ? Qu'est-ce que j e pense? Ou t r o u v e r 1'excuse, ou t r o u v e r l a c o n f i r m a t i o n ? ConfusSment, en moi, c e t t e t a c h e rouge: inconsciemment, ou pres q u e , 1 ' idSe. Le Jeme c o n t e . \" 35 (Noyau 14-1): \"Tout c e l a . . . ou en S t a i s - j e ? I I s u f f i t d'un r i e n que j e me perde. Tout c e l a comme l e s cheveux s u r l a soupe. En r S a l i t S , j ' a i l a t e t e a i l l e u r s . J ' i n v e n t e de m'en prendre a c e u x - c i , a c e u x - l a , pour S v i t e r ce q u i me devo r e . Je d i s des mots pour m'Sgarer. J e me joue e t vous joue une p i e c e . \" 3^ (Noyau 1 3 1 ) : \"Mon h i s t o i r e n S c e s s a i r e m e n t i c i vue du m i l i e u , comment l a c o m p r e n d r a i t - b n de l ' i n t S r i e u r ? J e ne p u i s p a s s e r au denouement sans m * e x p l i q u e r . Non que j e v e u i l l e e x c u s e r l e m e u r t r e . Vous n ' e t e s pas mes j u g e s . Tout au p l u s mes tSmoins.\" CHAPITRE IV Les C a t a l y s e s dans \"La M i s e a mort\" L ' a n a l y s e des noyaux dans l e c h a p i t r e precedent a donne\" l i e u a 1'etude de l a pr e m i e r e p a r t i e de n o t r e phrase-r§cit q u i e s t \"Je vous r a c o n t e une h i s t o i r e \" . Des s i x f o n c t i o n s du l a n -gage, s e u l e r e s t e a e t u d i e r l a f o n c t i o n p o E t i q u e q u i - r e n v o i e au message communique. Dans l a p h r a s e - r S c i t , l e complement d ' o b j e t d i r e c t \"une h i s t o i r e \" r e p r e s e n t e 1 ' a b o u t i s s e m e n t du p r o c e s de r a c o n t e r : i l se t r o u v e e t r e , de d r o i t , l e message communique de L a Mise a mort. Ce message ne se l i m i t e pas, t o u t e f o i s , a une i n t r i -gue t r a d i t i o n n e l l e t e l l e que c e l l e proposee dans 1 ' i n c i p i t du roman: i l e s t 1 ' a m p l i f i c a t i o n du code q u i c o n s t i t u e l ' h i s t o i r e de L a M i s e a mort. \"Une h i s t o i r e \" e s t , d o n e , un code-message e t l a f o n c t i o n p o e t i q u e du langage g i t justement dans c e t t e p r o l i f e r a t i o n f e r t i l e de mots q u i d e v e l o p p e r a l e code en t a n t que message. I I nous r e s t e a r e n d r e complete 1*etude de n o t r e p h r a s e - r e c i t en mainte n a n t l a correspondance e n t r e l e comple-ment d ' o b j e t d i r e c t \"une h i s t o i r e \" e t l e s c a t a l y s e s , t e l l e que 1 0 3 dSmontrSe dans l e schema s u i v a n t : 104 P h r a s e - r S c i t / \"Une h i s t o i r e \" r ^ R E c i t de / L a M i s e a mort \\ Y c a t a l y s e s On commencera p a r v o i r de p l u s p r e s l a n a t u r e e t l e r o l e de l a c a t a l y s e e t on p r o c S d e r a e n s u i t e a d S r o u l e r l e s d i f f E r e n t s r a p p o r t s e n t r e l e s n i v e a u x du r E c i t , e n t r e l e s u j e t e t l ' o b j e t de \" r a c o n t e r \" e t a a n a l y s e r l ' e t r e , l e temps e t l ' e s p a c e comme on l ' a i n d i q u E dans l e t a b l e a u f i n a l du deuxieme c h a p i t r e de c e t t e t h e s e . 1 - L a f o n c t i o n c a t a l y s e : On a d S j a d S f i n i une f o n c t i o n comme c a t a l y s e quand e l l e se t r o u v e en c o r r e l a t i o n avec un noyau. En e f f e t , l a c a t a l y s e c o n s t i t u e 1 ' a c t i o n q u i se passe e n t r e deux noyaux: avec ses se m b l a b l e s , e l l e f o r g e un p a l i e r s e c o n d a i r e ou se d S p l o i e e t s ' a m p l i f i e 1 ' a c t i o n de 1 ' E c r i t u r e dont l a prSsence d E j a s i g n a -l E e p a r l e s noyaux d e v i e n t i c i , l e p l u s souvent, i m p l i c i t e . Un exemple d'une c a t a l y s e s e r a i t l e passage q u i s'Stend e n t r e l e s noyaux numSrotEs 3 e t 4: \"Ses d i s q u e s , o u i . On ne peut pas se f a i r e i d S e avec 105 des disques... (...) Une chanson tzigane ou Wagner.\" 1 La c a t a l y s e , comme on l e v o i t b i en, se compose a u s s i d'unites l i n g u i s t i q u e s . Cette c a r a c t e r i s t i q u e q u ' e l l e partage avec l e noyau tend a l a confondre avec ce d e r n i e r et on peut se demander ou marquer une l i m i t e nette entre noyau et c a t a -l y s e . Le choix d'un noyau, on l e r a p p e l l e , repose to u j o u r s sur un renvoi d i r e c t a l ' a c t e d ' t c r i r e t a n d i s que c e l u i d'une ca t a l y s e sera de nature a r b i t r a i r e sans, t o u t e f o i s , d t s o b t i r a deux l o i s fondamentales: ( i ) L ' a c t i o n d'un noyau s u i t l a sequence c o n s t i t u t e par l e s noyaux precedents; e l l e n'est pas a l t t r t e par 1 ' i n t e r v e n t i o n d'une c a t a l y s e ; ( i i ) L' a c t i o n d'une c a t a l y s e peut e t r e une c o n t i n u a t i o n plus d e t a i l l t e et d i g r e s s i v e de 1 ' a c t i o n dans un noyau auquel e l l e e s t l i t e . Dans l e r o l e de r e v t l e r 1 ' a c t i o n de l ' e c r i t u r e , une c a t a l y s e est secondaire a un noyau, mais c'est en e l l e que se d t p l o i e 1*essence p o t t i q u e du langage. Les noyaux c o n s t i t u e n t l ' o s s a -ture du r t c i t et c'est aux c a t a l y s e s q u ' i l a p p a r t i e n t d ' e n r i -c h i r c e t t e ossature et d'en f a i r e un espace p l e i n , r i c h e de mots et de sens. En d'autres termes, l e code assume une r i c h e s s e q u i l e transformera en message. L ' a c t i o n entre deux noyaux peut etre d i f f u s t e en p lus d'une c a t a l y s e . C e l l e - c i s o u t i e n t un l i e n de consecution avec ses semblables. Contrairement aux noyaux q u i e n t r e t i e n n e n t 106 une r e l a t i o n l o g i q u e e n t r e eux-memes e t pour c e l a , o f f r e n t a 1'Etude un dynamisrae de r a p p o r t s i n t e r n e s , l e s c a t a l y s e s dans L a M i s e a mort, p a r l e f a i t d ' e t r e des u n i t S s c o n s E c u t i v e s 2 , peuvent e t r e c l a s s E e s en deux c a t E g o r i e s g E n E r a l e s . C'est en f a i t p a r l e u r appartenance a une des c a t E g o r i e s que l e s c a t a l y s e s a u r o n t un r o l e p l u s d S f i n i dans 1'Etude de L a Mise a mort. Sans c h e r c h e r a c a n a l i s e r l a r i c h e s s e p o E t i q u e de ce t e x t e , on ne peut, t o u t e f o i s , E v i t e r , dans une Etude s t r u c t u -r a l e s u r t o u t , un c e r t a i n degrE de s y s t S m a t i s a t i o n q u ' a p p e l l e i n E v i t a b l e m e n t 1'Etude des c a t a l y s e s en groupes, E t a n t donnE qu'une c a t a l y s e en elle-meme ne s e r t pas a grand chose pour 1'Etude. Q u e l l e s s o n t c es c a t E g o r i e s de c a t a l y s e s e t a q u o i s e r v e n t - e l l e s ? A f i n de dEgager ces c a t E g o r i e s , on a f a i t 1 ' a n a l y s e des c a t a l y s e s q u i se d i f f u s e n t e n t r e l e s noyaux f a i s a n t p a r t i e du p r e m i e r c h a p i t r e de L a Mise a mort, i n t i t u l S \"Le M i r o i r de V e n i s e \" . L ' i n c i p i t du roman, on l e s a i t , s i g n a l e l a prEsence d'un s c r i p t e u r q u i r a c o n t e une h i s t o i r e d S t e c t S e a t r a v e r s l ' u s a g e de l a 3eme personne: l e s c r i p t e u r p a r l e de quelqu'un. I I se pose en \" a u t e u r o m n i s c i e n t \" q u i a s s i s t e d i r e c t e m e n t a une scene dans un r e s t a u r a n t s i t u E rue M o n t o r g u e i l a P a r i s : i l v o i t e t entend t o u t . Les c a t a l y s e s - ^ e n t r e l e s noyaux 1 e t 2 se p r E s e n t e n t comme c o n f i r m a t i o n de l a prEsence du s c r i p t e u r , 107 l e \" J e \" du p r e m i e r n o y a u : e l l e s r § v e l e n t e n o u t r e , deux a s p e c t s de l ' a c t e de r a c o n t e r . I I y a r e p r e s e n t a t i o n d i r e c t e de l a s c e n e au moyen du d i s c o u r s d i r e c t : \" 'Ne t e r e g a r d e pas comme c e l a dans l a g l a c e , d i t F o u g e r e , - r e s t e un moment a v e c n o u s . . . ' J e ne me r e g a r d e pas dans l a g l a c e , d i t A n t o i n e . I I y a a u s s i d e s c r i p t i o n de l a s c e n e : \" L a s c e n e se p a s s e dans un p e t i t r e s t a u r a n t a l ' t p o q u e du F r o n t p o p u l a i r e , quand l e s nappes e t a i e n t de l i n g e a c a r -r e a u x b l a n c s e t r o u g e s . . . \" M a i s a u s s i t o t , r e p r e s e n t a t i o n e t d e s c r i p t i o n se b r o u i l -l e n t quand s a n s t r a n s i t i o n r e m a r q u a b l e n i l ' a i d e d e s g u i l l e -mets, l e p e r s o n n a g e A n t o i n e d o n t p a r l e J e - s c r i p t e u r , assume l e r o l e de l a p r e m i e r e p e r s o n n e du s i n g u l i e r : \"Je m'y s e r a i s b i e n p l u , j ' a u r a i s aime p o u r moi ce c a d r e . A n t o i n e s o u p i r a . I I ne p o u v a i t pas se r a p p e l e r . . . \" Le r e t o u r a l a Jeme p e r s o n n e p o u r d e s i g n e r A n t o i n e s i g n a l e q u ' i l s ' a g i t l a d'une p e n e t r a t i o n dans l a c o n s c i e n c e du p e r s o n n a g e . L ' o m n i s c i e n c e du s c r i p t e u r e s t t e l l e q u ' e l l e p ermet de d e v o i l e r l e s p e n s e e s d ' A n t o i n e . Ce j e u e n t r e \" J e \" e t \" I I \" p o u r d e s i g n e r A n t o i n e a b o u t i t f i n a l e m e n t a une c o n f u -s i o n e n t r e J e - s c r i p t e u r e t A n t o i n e . \" E s t - c e que F o u g e r e m'aime? E l l e m'aime, p o u r s u r . C * e s t - a - d i r e q u ' e l l e aime une image de moi, q u ' e l l e a p p e l l e A n t o i n e . \" 1 ^ Ce q u i s ' e n s u i t a p r e s c e t t e c a t a l y s e , d t c o u v r e u n \" J e \" q u i assume e t l a v o i x d u s c r i p t e u r e t c e l l e d ' A n t o i n e . \" J e \" a l o r s p a r l e e t pe n s e comme A n t o i n e . E s t - c e A n t o i n e a l o r s q u i 108 tient l a plume? On en doute car un peu plus tard, le Je-scripteur se distingue d'Antoine: \"C'Stait a 1 'instant que l'histoire de l'homme qui a perdu son image se situait par rapport a un miroir de 1 9 3 6 . Mais cela, c'Stait le rEcit, l a chose dans sa perspective, qui n'implique pas ou se tient l'homme qui Scrit \" 5 Je-scripteur se touvera meme impliquS dans l'histoire, a cotS d'Antoine: \"Antoine et moi, nous lisions avec passion les jgur-naux, les nouvelles de-cette guerre Strange de 1 9 6 4 . . . \" ° On a ainsi dS ja-au commencement du rEcit, le jeu des pronoms, jeu qui sera plus amplement StudiS plus tard quoiqu' on n'ait pu s'empecher d'en parler i c i car cette confusion entre les \"Je\" joue un role essentiel dans l a determination des categories de catalyses. En effet, le f a i t que Je-scrip-teur participe l u i aussi a l'histoire qu'il raconte institue les scenes directement racontSes en souvenirs remSmorSs. Ainsi, les moments entre deux prises de conscience de son role scriptural, sont ceux d'une distanciation de 1 'Ecriture au moyen de souvenirs. Ces derniers seront constamment•prSsents dans La Mise a mort: i l s constituent une partie de 1*action de raconter qui a l i e u quand deux ou plusieurs personnes se parlent,par exemple, quand Antoine parle a Fougere devant sa coiffeuse ou, Antoine a Michel au restaurant. Les catalyses qui dSsignent des scenes avec personnages sont des catalyses-souvenirs. Dans ces instances ou l a description vire a une intS-109 r i o r i s a t i o n chez A n t o i n e , s'ouvre un espace de p e n s t e s ou se r e j o i g n e n t dans l e t e x t e J e - s c r i p t e u r e t Je-Anthoine-. P u i s q u e ce d e r n i e r e s t a u s s i r o m a n c i e r ( r e a l i s t e ) , ses r e f l e x i o n s p o r t e n t souvent s u r l ' a r t romanesque e t sont f a c i l e m e n t t r a n s -m i s s i b l e s pour a p p a r t e n i r a une a u t r e c o n s c i e n c e , c e l l e de J e - s c r i p t e u r , l u i a u s s i preoccupe\" p a r l e s problemes du roman. Les c a t a l y s e s q u i r e f l e t e n t l a pens t e s e r o n t done des c a t a l y -s e s - p e n s t e s . Un exemple d'une c a t a l y s e - p e n s e e s e r a i t : \": \"-'.c'est comme i l y a des S c r i v a i n s , i l s se donnent un mal a t r o u v e r du nouveau, i l s f o n t des voyages au d i a b l e pour d t c r i r e des gens e t des paysages (...) e t p u i s p r e n e z , j e ne s a i s pas moi, C o l e t t e avec t r o i s mots on e s t t o u t de s u i t e e n t r t dans une maison, i l y a des c o u s s i n s s u r l e canape, l a t r a c e p a r t o u t des h a b i t u d e s , une ombre de femme s u r des o b j e t s v u l g a i r e s , j e s u i s p r i s , j e ne peux p l u s p a r t i r . \" 7 Pour r e c a p i t u l e r c e t t e p a r t i e , on d i r a que l e s c a t a l y -ses q u i annoncent l a presence i m p l i c i t e ^ d e l ' e c r i t u r e dans L a Mise a mort se r e p a r t i s s e n t en deux c a t e g o r i e s : l e s c a t a l y s e s - s o u v e n i r s e t l e s c a t a l y s e s - p e n s e e s . Ces deux c a t e g o r i e s avec l e s noyaux p e r m e t t r o n t une d i s t i n c t i o n p l u s c l a i r e e n t r e l e s q u a t r e n i v e a u x du r e c i t ( r e l e v e s dans l e c h a p i t r e 1 de ce t r a v a i l ) . Ces q u a t r e n i -veaux ont ete nommes comme s u i t : 1) N a r r a t i o n A (La M i s e a mort, oeuvre composee); 2 ) N a r r a t i o n B ( l e s c r i p t e u r a s a t a c h e ) ; 3) F i c t i o n C ( l ' h i s t o i r e de Fougere e t ses amants); 4-) F i c t i o n D ( l e s problemes de l ' a r t romanesque). 1 1 0 Les noyaux ont donne* les deux faces de l a narration - l a Narration A qui est celle de l'oeuvre deja composEe et l a Narration B qui est celle de l'oeuvre en train de pren-dre forme sous l a mains du scripteur. Les catalyses continuent le deVoilement de l a narration B tout en dormant naissance a une Fiction C qui est celle commencSe dans 1' i n c i p i t du roman, fi c t i o n ou l'on rencontre Fougere, Anthoine et le scripteur lui-meme. Cette Fiction C est designee par les catalyses-souvenirs. A 1'intSrieur de l a Fiction C, on assiste aux r e -flexions d'Anthoine sur sa situation d*homme-qui-a-perdu-son-image et aussi sur sa situation d'Ecrivain re*aliste. Ses pensSes coincident avec celles du Je-scripteur et amenent l a realisation d'une Fiction D qui se devoile a travers les catalyses-pensEes sous forme d'Ecrivains et de textes appar-tenant au Monde Reel qui provoquent reflexions et discussions chez les personnages de l a Fiction C. Cette permutation entre les niveaux du recit sera eiaboree un peu plus l o i n . Pour 1'instant, i l s u f f i t de faire voir au moyen d'un simple tableau le role des noyaux et des catalyses dans le devoile-ment des niveaux: Narration A Narration B Fiction C Fiction D Noyaux X X C-Souvenir X X C-Pensee X X I l l Ce t a b l e a u s e r a d ' a u t a n t p l u s c l a i r s i l ' o n t i e n t compte du f a i t que l a F i c t i o n D n ' e s t pas un a b o u t i s s e m e n t mais r e n v o i e a u s s i au p r e m i e r n i v e a u ( N a r r a t i o n A ) . Ce dyna-misme e n t r e l e s n i v e a u x du r t c i t permet de v o i r que s i l a c a t a l y s e - p e n s t e n a i t sous l a F i c t i o n C e t e s t r e f l t t t e dans l a F i c t i o n D, e l l e peut a u s s i s ' t t e n d r e j u s q u ' a l a N a r r a t i o n A e t meme a l a N a r r a t i o n B. L ' a n a l y s e s u i v a n t e s ' e f f o r c e r a d'ex-p l i e ' i t e r ces r a p p o r t s e n t r e l e s n i v e a u x du r t c i t . 2 - Les n i v e a u x du r t c i t ou l e r a p p o r t \"raconte\"fc=> \"une h i s t o i r e \" : ( i ) E x p l i c i t a t i o n des n i v e a u x ; Le dtdoublement de l a n a r r a t i o n en m i r o i r e t image a t t t d t j a e s q u i s s t dans l ' t t u d e des noyaux. L a Mise a mort e s t un t e x t e q u i p a r t i c i p e a l a f o i s de l ' e t r e e t du d e v e n i r : i l e s t , e t en meme temps, i l se f a i t . Le d e v e n i r du t e x t e donne deux s i t u a t i o n s du s c r i p t e u r : c e l l e ou l ' a c t e de r a c o n t e r a l i e u au n i v e a u de l ' t c r i t u r e ( c ' e s t - a - d i r e , l a N a r r a t i o n B) e t c e l l e ou r a c o n t e r d e v i e n t r e p r e s e n t a t i o n au n i v e a u du s o u v e n i r ( q u i e s t l a F i c t i o n C engendrte p a r l a N a r r a t i o n B ) . L a l e t t r e a Fougere s u r 1*es-sence de l a j a l o u s i e i l l u s t r e b i e n ce p o i n t . L a double n a t u r e de \" J e \" , l e s c r i p t e u r ou A n t h o i n e , e s t p r t s e n t e au d t b u t c a r on s a i t que l'amant de Fougere e s t A n t h o i n e t o u t en f t a n t c o n s c i e n t a u s s i de c e t t e main q u i S c r i t : 112 \" P o u r q u o i c e t t e l e t t r e s u i v r a i t - e l l e f i d e l e m e n t l a c h r o n o l o g i e du r t c i t , d'un r t c i t q u i r a c o n t e des f a i t s de 1939, mais n ' e s t pas t c - r i t en 1939.\"8 \" J e \" e s t l e s c r i p t e u r q u i r a c o n t e mais \" J e \" peut a u s s i e t r e A n t h o i n e dont l a l e t t r e t c r i t e a Fougere e s t i c i r e p r t -s e n t t e . • L a c o n f u s i o n p r o v i e n t de 1 ' e x i s t e n c e de deux p r t s e n t s dans l e roman: l e p r t s e n t de l ' h i s t o i r e e t l e p r t s e n t du d i s -c o u r s . A i n s i , c e t t e l e t t r e a Fougere f a i t p a r t i e d e - l a N a r r a t i o n B (quand \" J e \" t r a n s p a r a i t comme s c r i p t e u r ) e t de l a F i c t i o n C (quand \" J e \" e s t A n t h o i n e C t l e b r e ) . On remarque a u s s i que c e t t e l e t t r e commence avec \"Je n ' a i j a m a i s pu t r a d u i r e l a ' L e t t r e a T a t i a n a ' : l e s mots en s o n t t r o p s i m p l e s pour p a s s e r d'une langue a- 1*autre.\"9 D t b u t i n t t r e s s a n t q u i , p a r ces r t f l e x i o n s , i n t r o d u i t une oeuvre r u s s e Eugene Ontguine de P o u c h k i n e . C e l u i q u i t c r i t l a l e t t r e se s e r t d'un a u t r e t e x t e pour a p p r o c h e r son s u j e t de b i a i s : c ' e s t l a , d'apres nous, l ' a p p a r i t i o n d'une a u t r e f i c -t i o n n a i s s a n t de l a F i c t i o n C. A mesure que l a l e t t r e assume un t o n p l u s i n t i m e , s ' a m p l i f i e encore p l u s l e b e s o i n de se j u s t i f i e r au moyen d ' a u t r e s r t c i t s : \"Tu c r o i s c o n n a i t r e l a p a r t q u i f u t l a mienne a n o t r e v i e , e t t u veux i g n o r e r ma j a l o u s i e ? I I f a u d r a i t que j e t e f a s s e r t c i t de l ' i n d i c i b l e , de c e t t e p e r p t t u e l l e i n s o m n i e d ' a i m e r . \" 1 0 E t \" J e \" i n t r o d u i t a l o r s 1'anecdote du boxeur-champion q u i se s u i c i d e a p r e s une d t f a i t e pour l a s e u l e r a i s o n q u ' i l ne v e u t pas e t r e i n d i g n e de 1'amour de s a femme. C' e s t c e t usage de r t c i t s ou de t e x t e s a u t r e s que l e s i e n q u i t c l a i r e 113 une nouvelle f i c t i o n naissant de l a Fiction C. Cette nou-velle Fiction D contient le plus souvent, des reflexions sur les aspects techniques de l'art romanesque en gSnSral et ren-ferme en soi tout un monde l i t t S r a i r e qui dSpasse le cadre du li v r e puisque c'est un monde hSritS par ceux qui s'adonnent a l a littErature (y compris, le lecteur). La Fiction D renferme une partie du monde rSfSrentiel ou ont effectivement exists les figures connues de Shakespeare, Pouchkine, Gorki, R.L. Stevenson, L. Aragon (en personnel) et d'autres. C'est par cet aspect du \"monde rEel\" IncorporE dans le rEcit que ce 4eme niveau, le plus SloignS de celui de l a narration reflete jus-tement ce ler niveau (de l a Narration A) ou transparait sans contestation possible l a prEsence d'Aragon en tant qu'auteur de La Mise a mort, roman publiS en l'an 1964 de notre ere et qui va trouver sa place parmi les oeuvres d'un Shakespeare, d'un R.L. Stevenson, d'une Elsa Triolet, ( i i ) Le .jeu de miroirs entre les niveaux: La permutation des 4 niveaux du rEcit de La Mise a mort est done justifiSe: sous le vernis de 1*Ecriture qui donne au rEcit une il l u s o i r e uniformitS, s'effectue une constante a c t i -vitE de miroirs et de reflets entre narration et f i c t i o n ou chaque niveau en engendre un autre. Le tableau suivant i l l u s -tre cette permutation dans La Mise a mort: 114-M i r o i r R e f l e t N a r r a t i o n A (La M i s e a mort: oeuvre composed) v N a r r a t i o n B 5\" ( J e - s c r i p t e u r a s a t a c h e j ^ l e d e v e n i r du r e c i t ) N a r r a t i o n B / ( J e - s c r i p t e u r devant son t e x t e ) < F i c t i o n C (L ' h i s t o i r e - ; d e Fougere, yd'Anthoine q u i e s t a u s s i c e l l e des s o u v e n i r s de y/ J e - s c r i p t e u r ) . F i c t i o n C / ( A n t h o i n e , 1' e c r i v a i n < r t a l i s t e e t l'homme q u i a perdu son image) F i c t i o n D (Problemes de l a c r e a t i o n — > romanesque vus a t r a v e r s des t e x t e s e x t t r i e u r s a / L a Mise a mort. P r e s e n c e / du monde r § f t r e n t i e l ;>) / F i c t i o n D (Monde r t f S r e n t i e l : < Shakespeare, e t c . ) N a r r a t i o n A •' >(Louis Aragon, a u t e u r de L a Mise a mort.) 115 C e c i dSmontre que f i c t i o n e t n a r r a t i o n dans L a Mise a mort r e n v o i e n t a un s e u l e t meme s u j e t : 1 * E c r i t u r e . L a f i c t i o n d e v i e n t en quelque s o r t e l a mStaphore de l a n a r r a t i o n . L ' i n t e r a c t i o n e n t r e l e s deux p r e m i e r s n i v e a u x du r E c i t a StS suff i s a m m e n t E c l a i r E e dans l ' a n a l y s e des noyaux. Le j e u e n t r e l e s n i v e a u x B e t C se d S v o i l e a t r a v e r s l a c o n s t a n t e a m b i g u i t E de 1 ' i d e n t i t S de c e l u i q u i E c r i t : \" J e \" se pose t a n t o t comme s c r i p t e u r e t t a n t o t comme A n t h o i n e . Le c h a p i t r e q u i s u i t l a premi&re l e t t r e a Fougere s ' i n t i t u l e : \"Le M i r o i r B r o t \" . Ce c h a p i t r e commence s u r l e n i v e a u de l a n a r r a t i o n B ou J e - s c r i p t e u r c o n t i n u e son r E c i t e t r a c o n t e son passE quand i l s ' a p p e l a i t A l f r e d . Ce n i v e a u de l a n a r r a t i o n cede l e pas aux s o u v e n i r s sans t o u t a f a i t d i s p a r a i t r e 1 1 pour e n s u i t e se con f o n d r e avec eux: en e f f e t , l a \"seconde l e t t r e a Fougere ou i l e s t q u e s t i o n d'une g l a c e sans t a i n \" p o u r r a i t e t r e , au dSbut, r e p r S s e n t a t i o n d'une l e t t r e d'Anthoine mais q u i se r S v e l e e t r e l ' o e u v r e de J e - s c r i p t e u r ( A l f r e d ) q u i p a r l e d ' A n t h o i n e : \"Remarque, i l s e r a i t p o s s i b l e de j o u e r autrement de l a g l a c e , d i r e que d ' i c i ou j e s u i s , j e v o i s de 1 ' a u t r e c o t S A n t h o i n e q u i ne me v o i t pas. Ou rSciproquement? A n t h o i n e , j e ne s u i s pas censE t e l e d i r e , ne peut pas me v o i r dans l a g l a c e p u i s q u ' i l ne s ' y v o i t pas. \" 1 2 A l o r s l e \" J e \" q u i a E c r i t c e t t e l e t t r e ne s e r a i t done pas A n t h o i n e mais A l f r e d , l'homme aux yeux b l e u s que Fougere ne v e u t pas t u t o y e r : \"Mais q u ' e s t - c e que t u peux b i e n E c r i r e comme c e l a t o u t l e temps, A n t h o i n e ? Ah, pardon, mon ami, j e n ' a v a i s pas vu que vous a v i e z l e s yeux b l e u s . . . \" 1 3 116 A i n s i commence l a \" D i g r e s s i o n du roman comme m i r o i r \" , commencement q u i p o u r r a i t a u s s i e t r e f i n de c e t t e seconde l e t t r e q u ' A l f r e d d S d i e a Fougere. L'ambiguite\" s ' e c l a i r e t o u -t e f o i s a mesure que p r o g r e s s e l a l e c t u r e : c ' e s t , en e f f e t , J e - s c r i p t e u r , l'homme aux yeux b l e u s q u i , du p o i n t de vue de l a n a r r a t i o n B, d S c r i t c e t t e scene q u i a eu l i e u e n t r e Fougere e t l u i . C e t t e c o n f r o n t a t i o n se deVeloppe \"en d i r e c t \" : l e s c r i p t e u r s * e f f a c e devant l e s o u v e n i r de l a scene q u i c o n t i e n t en germe une a u t r e h i s t o i r e ou Fougere d e v i e n t I n g e b o r g , une l e c t r i c e q u i Scoute e t c r i t i q u e l e s vues romanesques d * A l f r e d . A l o r s l e s deux n i v e a u x B e t C se confondent au p o i n t ou i l d e v i e n t i m p o s s i b l e de s S p a r e r l e t o n d i d a c t i q u e du s c r i p t e u r devant son t e x t e e t c e l u i p l u s \" c o n f S r e n c i e r \" d ' A l f r e d devant I n g e b o r g . Un exemple f r a p p a n t s ' o f f r e avec l a l e c t u r e des commentaires f a i t s p a r A l f r e d s u r A l i c e au pays des m e r v e i l l e s ou c ' e s t seulement 1 ' i n t e r v e n t i o n d*Ingeborg q u i l a r e p l a c e , e l l e , e t en meme temps, A l f r e d , s u r l e - n i v e a u des s o u v e n i r s . L a presence d'Ingeborg r a p p e l l e que l e s commentaires s u r L e w i s C a r r o l l e t son l i v r e , ne p r o v i e n n e n t pas d i r e c t e m e n t de l a l u t t e e n t r e l e s c r i p t e u r e t s on t e x t e , mais d'une c o n f r o n t a -t i o n e n t r e A l f r e d - s c r i p t e u r e t I n g e b o r g - a u d i t r i c e . A l f r e d t e n t e de f a i r e c r o i r e que c e t t e \" D i g r e s s i o n du roman comme m i r o i r \" n ' e s t composSe n i avant l a c o n f r o n t a t i o n e n t r e I n g e b o r g e t l u i , n i a p r e s : e l l e s ' e s t f a i t e d u r a n t l a d i s c u s s i o n e t rememorSe s u r p a p i e r a p r e s : 117 \"Done j e v a i s i n v e n t e r c e t t e ' D i g r e s s i o n du roman comme m i r o i r ' . . . j e ne 1'ai pas S c r i t e , j e prends mon manus-c r i t , j e f a i s mine d'y c h e r c h e r des pages, j ' e n mets de cote' un p e t i t paquet v r a i s e m b l a b l ' e , j e t o u s s e un peu, j e me donne l ' a i r de d i r e : j e p a r l e , j e ne l i s pas, j e ne s u i s pas l e s l i g n e s d'un m a n u s c r i t , j e mets un masque de l e c t e u r . \" x 5 A l f r e d se d S s i g n e comme i m p r o v i s a t e u r d'une a u t r e l i g n e de r E c i t q u ' i l v a n a t u r e l l e m e n t i n c o r p o r e r dans son Roman de Fougere. En t a n t que t e l , i l d e v r a i t m a i n t e n i r l a d i s t a n c e e n t r e I n g e b o r g e t l u i p a r \"Vous\" mais b r i s e l a r e g i e du j e u en t u t o y a n t c e l l e q u i l ' S c o u t e e t l e l u i r e p r o c h e : \"Vous melez t o u t , - r S p e t e I n g e b o r g - e t que d i r a i t A n t h o i n e s ' i l vous e n t e n d a i t me t u t o y e r ? \" x ° Techniquement, c ' e s t I n g e b o r g q u i , en demandant a l i r e un e x t r a i t du m a n u s c r i t d * A l f r e d , r S t a b l i t l a d i s t a n c e e n t r e eux. E l l e congSdie A l f r e d pour l i r e un con t e E c r i t p a r A n t h o i n e . L a prEsence d * A l f r e d s * E c l i p s e devant une r e p r S s e n t a t i o n de l a l e c t u r e du conte Murmure: l e moment de l a l e c t u r e d 'Ingeborg e t c e l u i du l e c t e u r se s u p e r p o s e n t ; l e l e c t e u r f i c t i f e t l e l e c t e u r n o n - f i c t i f ^ (dont l e s c r i p t e u r s o l l i c i t e 1'approbation) ne s o n t qu'un pendant c e t t e l e c t u r e de Murmure. C e t t e c o n f u s i o n des deux n i v e a u x de l a N a r r a t i o n B e t de l a F i c t i o n C re n d encore p l u s E v i d e n t l e r o l e symbolique p l u t o t que c a r a c t S r i e l d'Ingeborg. L a r e p r S s e n t a t i o n de Murmure annonce a u s s i un a u t r e n i v e a u du r E c i t q u i e s t c e l u i du c o n t e , t a n t p a r s a p r S s e n t a t i o n f o r m e l l e q u i l e range p a r m i ces a u t r e s r S c i t s d i s t i n c t s du Roman de Fougere que p a r l e f a i t q u ' i l e s t d i t S c r i t p a r A n t h o i n e . I I s ' a g i t Svidemment du 118 niveau de l a Fiction D qui se dSveloppe tres rapidement a mesure que s'avance l a Fiction C; ce l l e - c i se voit investie de cette deuxieme f i c t i o n qui semble faire partie d'elle. En f a i t , quel est ce rapport dynamique institug entre l a f i c t i o n nouvelle -ne'e (D) et l a fiction-mere (C)? L'anecdote du boxeur contSe dans l a premiere lettre a Fougere ouvre une dialectique entre les deux niveaux de la* Fiction, dialectique d'e\"change d'un niveau a 1'autre qui se poursuit jusqu'au dernier chapitre du roman avec une symStrie e\"tonnante. En effet, le rScit tragique du boxeur-champion qui se suicide pour sa femme devient celui de Fougere quand elle prend l a place de cette femme aimSe devant laquelle le boxeur se tir e une balle dans l a tete: \"imagine-le, imagine que tu vas a sa rencontre, que tu sais a suffisance en l u i cette douleur pour y donner l'accueil de l a femme, (...) Et hier encore, alors qu'il ne semblait songer qu'a sa forme avant le combat, a sa force... et tout a l'heure dans l a voiture, avec cette voix tranquille parlant a son manager, impossible de te rappeler cette phrase fugitive, dite avant de monter sur le ring, qui t'avais paru bizarre... tu ne t'en souviens pas...\"18 19 Les Elements des deux fictions s'interchangent 7: pre-mier signe de l a presence nScessaire de l a Fiction D a 1'intS-rieur de l a Fiction C qui s'en trouvera modifiSe. Le chapitre trois du roman englobe les episodes du passS d'Alfred quand i l avait f a i t l a connaissance d'un Christian Fustel-Schmidt. Celui-ci souffrant apparemment d'une phobie de miroir a essayS d'expliquer a Alfred, au moyen d'un roman de cel u i - c i traitant 1 1 9 2 0 des hommes-doubles et du Dr. Jekyll et Mr. Hyde de- R.L. Stevenson, qu'il existe \"un troisieme homme\" et meme- toute une sSrie de personnalitSs -chez un seul etre. En ce sens, l a Fiction C Slabore une thSorie dSja exposSe dans des textes connus. Dans l a seconde lettre a Fougere, c'est cette fois une citation de La Tempete de Shakespeare qui va provoquer l a redaction d'une missive ou reve et rEalitS constituent l'etre: \"Nous sommes de l'Stoffe meme dont sont fai t s les re-ves, et notre petite vie est entourSe d'un sommeil...\"21 Cette citation donne l i e u a 1'expression par mStaphores de l a solitude de chaque homme puisqu'il y a toujours une partie de l u i , 1'arriere-chambre isolSe par une glace sans tain, qui demeure inaccessible aux autres. Se souvenir de l a vie passSe ensemble avec celle qu'il aime, c'est aussi pour celui qui Scrit l a lettre une facon de rever et de revivre l a beautS de la vie: \"Et l a vie? II f a i t beau, mon amour, i l f a i t beau dans l a vie. II f a i t beau dans 1'amour. II n'est parole qu'il f a i t beau, les yeux ouverts, les yeux fermSs, meme a cet homme de blessure que je suis, que je fus tout le temps d'avant t o i , et le temps de t'aimer. Si beau, s i bleu, s i pur et s i pro-fond que e'en est a se perdre, a refuser a croire avoir jamais revS.\"22 Ainsi, toute cette lettre inspirSe de ce reve shakespearien qu'est La Tempete devient un appel a revivre le passS pour faire renaitre 1'amour de Fougere. La citation de La Tempete assume une signification nouvelle et s'Spanouit pour devenir poSsie de cette lettre destinSe a 1'aimSe. 120 Dans l e c h a p i t r e s u i v a n t , \" D i g r e s s i o n du roman comme m i r o i r \" , - l a presence d'Ingeborg c r S e , comme on l ' a vu, une s i t u a t i o n d'Schange de p o i n t s de vue s u r l ' a r t romanesque r e -montant jusqu'au XVeme s i e c l e quand d S j a l a t e c h n i q u e romanes-que c o m p t a i t pour un J e a n B u e i l dans s a c o m p o s i t i o n de Le J o u v e n c e l . I I y a dans ce roman l e j e u des i d e n t i t S s de 1'au-t e u r , q u i d i s t i n g u e c e l u i q u i S c r i t e t c e l u i q u i a g i t dans l e roman. Le passage \"A t r a v e r s l e m i r o i r \" de A l i c e au pays des m e r v e i l l e s de L. C a r r o l l e s t comments pour 1'usage du m i r o i r s S p a r a n t l e pays m e r v e i l l e u x de l a r S a l i t S , d S s i g n a n t a i n s i l a c o n s t i t u t i o n a l a f o i s v r a i e e t f a u s s e d'un personnage: \" A i n s i i l y a roman quand l e mensonge e t l a r S a l i t e \" c o h a b i t e n t dans un personnage q u i peut e t r e A n t h o i n e ou moi, peu i m p o r t e . Ces oeuvres s o n t comme une j u s t i f i c a t i o n pour A l f r e d -s c r i p t e u r q u i r e c h e r c h e des Schos dans 1 ' h e r i t a g e l i t t S r a i r e , e t l a scene dans A l i c e au pays des m e r v e i l l e s ou l e R o i B l a n c S c r i t ses memoires malgre l u i ( p u i s q u e c ' e s t A l i c e q u i t i e n t son c r a y o n ) , e s t un a v e r t i s s e m e n t au l e c t e u r de L a Mise a mort de ne pas pr e n d r e l e r S c i t pour un p r o c e s s u s a sens unique, de 1'auteur a 1'oeuvre: c ' e s t que 1'auteur a u s s i p e ut e t r e raconte\" p a r son t e x t e mis en marche. I c i place\" a l ' i n t S r i e u r de l a F i c t i o n C, l a F i c t i o n D s e r t de m i r o i r aux problemes t r a i t S s dans l a c o m p o s i t i o n de L a Mise a mort. L a d i s c u s s i o n e n t r e I n g e b o r g e t A l f r e d se t e r m i n e avec I n g e b o r g s ' i n s t a l l a n t pour l i r e Murmure, co n t e S c r i t p a r A n t h o i n e mais q u ' A l f r e d 121 p r e t e n d e t r e l e s i e n . I n g e b o r g ne v e u t p l u s d i s c u t e r : e l l e r e clame quelque chose a l i r e . Dans l ' e s p a c e de l a l e c t u r e de ce c o n t e , l e s F i c t i o n s C e t D se sup e r p o s e n t : I n g e b o r g l i t e t en meme temps, se d e r o u l e un cont e d ' a u t r u i e c r i t p a r An t h o i n e C e i e b r e , l ' e c r i v a i n r e a l i s t e . Ce c o n t e , element de l a F i c t i o n D pui s q u e c ' e s t l ' o e u v r e d'un a u t r e v a provoquer des r e f l e x i o n s s u r \" l e m i r o i r q u i (me) d e v i e n t roman ou l e s choses p a s s e n t a l ' S t a t de f i c t i o n \" e t une r e a c t i o n d'amant j a l o u x chez A l f r e d quand I n g e b o r g l u i r e n d Murmure sans aucun commentaire. C'est a c e t i n s t a n t q u ' i l c o n s i d e r e A n t h o i n e comme l'ennemi: \" A u s s i , p a r c e que l e p r i n c i p a l • e n n e m i m'est forcement i c i A n t h o i n e , e s t - c e d'abord de l u i que j e veux a r r a c h e r l e m i r o i r . \" 2 4 E n s u i t e A l f r e d prend Le C a r n a v a l pour l e l i r e e t c e t t e l e c t u r e engendre l'idee de meurtre chez l e j a l o u x : \"L'idee de t u e r A n t h o i n e f a i t en moi des p r o g r e s , e l l e s ' i n s t a l l e . \" 2 5 I I d e c i d e de ne pas donner Le C a r n a v a l a Inge b o r g , ce q u i n'empeche t o u t de meme pas l e cont e de provoquer chez A l f r e d des r e f l e x i o n s r a p p r o c h a n t roman e t musique, e t d'en d i s c u t e r avec I n g e b o r g , a u t o r i t e m u s i c a l e p u i s q u ' e l l e e s t c a n t a t r i c e c e i e b r e . Au c o u r s de c e t t e deuxieme d i s c u s s i o n , i l s p a r l e n t des romans d ' E l s a T r i o l e t d'ou A l f r e d c r o i t a v o i r lemprunte \" l e j e u d'Ant h o i n e \" , ce q u i d e v o i l e l a j a l o u s i e d ' A l f r e d aux yeux de Fougere q u i se moque de l u i . Desesperement, A l f r e d 122 prend l a t e r r i b l e d e c i s i o n de t u e r A n t h o i n e : \"Je n'en peux p l u s , A n t h o i n e , j e v a i s t e t u e r . \" C e c i menera au denouement ou A n t h o i n e e f f e c t i v e m e n t a p r i s v i e en d S p i t d * A l f r e d q u i v e u t s'en d S b a r r a s s e r . E n t r e l e s F i c t i o n s C e t D, on l ' a u r a d§ja devine\", s ' e s t i n s t i t u e \" l e j e u de 1 ' i n t e r t e x t u a l i t S . L a F i c t i o n D c o n t e n a n t pour l a p l u p a r t des oeuvres p r S e x i s t a n t e s a L a M i s e a mort p a r v i e n t a c o n t r o l e r l e deVeloppement de l a F i c t i o n C. L'exem-p l e f r a p p a n t e s t o f f e r t p a r l e s c o n t e s : A l f r e d , l'amant j a -l o u x penche peu a peu v e r s l e meurtre e t l a p r o g r e s s i o n se v o i t a chaque Stape q u ' o f f r e un c o n t e . A ce p o i n t , on note que l a F i c t i o n D q u i , au dSbut d o n n a i t une p e r s p e c t i v e p l u s p r o f o n d e a l a F i c t i o n C, e s t parvenue a s'y i n c r u s t e r au p o i n t d ' e t r e i n d i s p e n s a b l e au developpement de l a F i c t i o n - m e r e . > M ais i l e s t t o u t a u s s i v r a i que dans l a F i c t i o n C q u i a donnS n a i s s a n c e a l a F i c t i o n D, l e s oeuvres e t a u t e u r s c i t e s , q u o i -que b i e n connus, prennent une a l l u r e d i f f S r e n t e dans L a M i s e a mort : on ne prend pas c o n n a i s s a n c e de t o u t e L a Tempete n i de Dr. J e k y l l e t Mr. Hyde en e n t i e r . Ces t e x t e s o f f r e n t a L a M i s e a mort ce q u i l u i e s t p e r t i n e n t e t , c e f a i s a n t , a c q u i e -r e n t une i d e n t i t y n o u v e l l e , non d e v o i l S e avant l e u r p a r t i c i -p a t i o n dans l e r S c i t . A u s s i , l a j a l o u s i e dans O t h e l l o se t r o u v e - t - e l l e r S - e x p l o r S e quand A l f r e d v o i t l e j a l o u x i n c a r n S non p a r O t h e l l o , mais Iago, 1 ' i n s t i g a t e u r du c r i m e . On r e l i t J e a n de B u e i l pour y d S c o u v r i r ce qu'auparavant on a u r a i t 123 traitE sommairement, (le probleme des personnages, par exemple), et Alice de Lewis Carroll encore une fois, dSpasse sa fonction de conte pour enfants pour devenir oeuvre profonde a valeur artistique. Toutes ces oeuvres se dSpassent en assumant l a modernity: elles ne sont pas figSes mais subis-sent une Evolution dans le temps. La Fiction D ne se dis t i n -gue pas seulement par son interaction avec l a Fiction C; elle possede de plus son mouvement en avant dans le jeu de miroirs entre les niveaux du rEcit. En tant que miroir, l a Fiction D renvoie a l a Narration A. La Mise a mort, oeuvre composSe, n'est plus rEcit uni-latE r a l . Elle s'Sieve aux propositions tridimensionnelles du liv r e grace au dynamisme prSsent entre les niveaux du rEcit. On assiste a 1'autoportrait d'un roman qui est a l a fois miroir et reflet: pour connaitre La Mise a mort, ce l i v r e -miroir qu'on ouvre pour l i r e , on fera d'abord connaissance avec le l i v r e - r e f l e t , \"sujet\" du livre-miroir qui prSsuppose 27 alors un temps et un espace tout particuliers au rEcit. 3 - Les personnages du rEcit ou le rapport \"Je'— »\"une histoire\":. II est incontestable que l'un des problemes romanesques reflEtSs dans La Mise a mort est celui de 1'identitS de 1'au-teur. Les textes qui sont discutSs dans ce roman, notamment ceux mentionnSs au cours de 1'analyse de 1'intertextualitS 1 2k e n t r e l e s F i c t i o n s C e t D, j u s t i f i e n t e t a c c e n t u e n t l e j e u de m i r o i r s S t a b l i e n t r e 1*auteur e t ses personnages. Ce n ' e s t pas l a p e i n e de d i r e que \"J e \" dans L a Mi s e a mort e s t L o u i s Aragon: on ne l e s a i t - q u e t r o p . L ' e s s e n t i e l i c i , c ' e s t que 1'auteur i n s t i t u e un mensonge (\"Je e s t un a u t r e \" ) q u i l e s§pare de ce q u ' i l r a c o n t e a f i n de p o u v o i r e x p l o r e r j u s -tement l e s l i e n s i n f i n i s q u i l e r a t t a c h e n t a 1 ' o b j e t de son S c r i t u r e . C 'est en o u v r a n t un champ d* e x p l o r a t i o n que 1'au-t e u r p o u r r a se mieux c o n n a i t r e e t se r e n d r e compte a u s s i du p o u v o i r des mots s u r l u i . Dans L a M i s e a mort, c e l u i q u i d i t \" J e \" ne d o i t done pas, a p r e m i e r e vue, e t r e confondu avec J e -1'auteur pour l a s i m p l e r a i s o n l i n g u i s t i q u e qu'en d i s a n t \" J e \" , c e l u i q u i p a r l e dStache une p a r t i e de l u i \"pour l u i a t t r i b u e r un temps, un espace, des m o d a l i t S s autonomes e t d i s t i n c t s du temps, de l ' e s p a c e , des m o d a l i t e s de son e x i s t e n c e p a r -2 Q l a n t e . \" Le \" J e \" dans l ' i n c i p i t du roman r e n v o i e a c e t a u t r e moi q u ' e s t l e s c r i p t e u r : i l e x i s t e de\"ja une d i s t a n c e p s y c h i -que e n t r e 1'auteur e t l e s c r i p t e u r . J e - s c r i p t e u r s ' a d r e s s e a une 2eme personne e t p a r l e d'un t i e r s : on a d§ja t e n u compte de 1'ambiguity de l a 2eme personne e t du f l u x des r a p p o r t s 2 9 . e n t r e e l l e e t \" J e \" . 7 C e l u i - c i p a r l e de t r o i s i e m e s personnes q u i s o n t \" l e s personnages\" de son h i s t o i r e : en un sens, l e r a p p o r t q u i l i e l e s u j e t de r a c o n t e r a son o b j e t d e r i v e p r i n -c i p a l e m e n t du dSdoublement c o n s t a n t du \" J e \" en d ' a u t r e s e t r e s q u i peuvent a u s s i d i r e \" J e \" . Comme l e d i t G u i r a u d ^ , \"on 1 2 5 pourrait evidemment concevoir un plus petit ou un plus grand nombre de personnes dans le discours: l a distance psychique entre le sujet parlant et les autres etres est infiniment variable.\" Les personnages de La Mise a mort ne reprSsentent pas en eux-memes 1'existence d'etres psychologiques calquSs sur l a rSalitS extErieure. En effet, s i l'on essaie des le d<§but du roman de distinguer l a forme d'un etre disant \"Je\", on ne parvient qu'a discerner un jeu d'apparition et d'effacement Stabli entre Je-scripteur et Anthoine qui dit \"Je\". Un peu plus loin, le scripteur se distingue d'Anthoine en s'appelant Alfred qui, en f a i t , peut etre Anthoine dans sa jeunesse; mais on voit aussi qu'il y a dScalage quand Alfred et Anthoine se parlent et deviennent jaloux I'un de 1'autre pour 1'amour de Fougere. Quoi de plus t e r r i f i a n t pour Alfred que de cons-tater 1'existence \"palpable\" d'Anthoine dans l a scene finale? A moins que La Mise a mort ne soit de ces contes de fEes, ou l a part du merveilleux est acceptSe d'emblEe, on tend a etre dupe de 1 ' i l l u s i o n du rEel proposSe dans un roman qui se dit \"rSaliste\". Nul ne conteste l a part du fantastique dans un roman, mais on accepte moins spontanEment le manque de coherence dans ce roman a 1'allure rSaliste. En f a i t , les personnages ne sont pas pris dans une intrigue chargSe d'ex-ploits, de rebondissements, de surprises: sur ce point, elle reste faible. Par contre, 1'intrigue se v i v i f i e d'Schanges 126 verbaux, de reminiscences, de reflexions, d'Scriture et de lecture. : C'est done, au discours que se subordonne 1'action des personnages., et c'est justement le discours qui permettra de dSfinir \"Je\" a chaque fois qu'il est Snonce3'1\". Le pronom personnel \"Je\" n'a pas de domicile fixe: i l dSsigne- tantot le scripteur, tantot un des personnages. \"Vous\" de meme com-porte une certaine ambiguity tandis que \"II\", l a personne dont on parle et qui appartient a l'histoire que \"Je\" raconte, se multiplie en autant d'identitSs qu'il existe de personnages dans l'histoire. Le mystere du miroir Brot se trouve en un sens, dSmystifiS: les trois images constituent l a t r i n i t y de communication \"Je\" - \"Vous\" - \"II\" qui peut se multiplier en une infi n i t e d'images. Qu'est-ce qui f a i t un personnage dans La Mise- a mort ? Quelles en sont les caractSristiques? Une chose est-sure: c'est qu'il n'est determine\" ni par ses aspects physiques ni par un t r a i t psychologique particulier. Alfred n'a que ses yeux bleus pour le contraster avec Anthoine: on devine son age avec d i f f i c u l t y mais on sait qu'il ecrit. Fougere chante, quand elle parle a Alfred, elle est Ingeborg. Anthoine pense a son image perdue. Le personnage est d'abord dysigny par ce qu'il f a i t : \"Je\" ycrit, \"Vous\" l i t , \"II\" aime, etc., et par ce f a i t , le pronom personnel sera connu sous le terme actant^ . L'actant est un espace vide qui dyfinit une classe de person-nages par ce qu'ils font. En meme temps, i l ouvre un champ 127 de fonctions (ce que les personnages font) qui peuvent etre appelSes des roles-^. Les roles, a leur tour, peuvent etre 34 A joue's par des acteurs^ qui sont susceptibles d'etre i n d i v i -dualists au moyen de noms propres, Chaque acteur peut assumer un ou plusieurs roles. Le tableau suivant est une tentative de reprtsenter ces 3 aspects qui dSterminent un personnage de La Mise a mort: -Tableau des 3 aspects -presents dans -la crgation N i v e a u x du r<§cit A c t a n t s R o l e s A c t e u r s J Je S c r i p t e u r A l f r e d / A r a g o n Vous l e c t e u r J e s c r i p t e u r amant A l f r e d / A n t h o i n e Vous/Tu l e c t r i c e / a m a n t e Fougere J e amant e c r i v a i n r S a l i s t e l'homme au m i r o i r l e j a l o u x 1'agresseur A l f r e d / A n t h o i n e c y Vous/Tu l e c t r i c e chanteuse amante Ingeborg/Fougere \\ 11 amant S c r i v a i n r S a l i s t e l'homme au m i r o i r l e j a l o u x 1 ' a g r e s s e u r A n t h o i n e / C h r i s t i a n / M i c h e l J e s c r i p t e u r - c r i t i q u e A l f r e d Vous _audi t r i c e - l e c t r i c e I ngehorg / p J I l / E l l e S c r i v a i n - p o e t e amant l'homme au m i r o i r l e j a l o u x 1 ' a g r e s s e u r G o r k i / L . C a r r o l l / J.de B u e i l / C h a r l e s Lamb/ L.Aragon E l s a T r i o l e t J .F. S t r u e n s e e P. Houdry l e boxeur Oedipe O t h e l l o I ago A l i c e e t c . 130 a) E l a b o r a t i o n des t r o i s a s p e c t s : a c t a n t - r o l e - a c t e u r : Les a c t a n t s \" J e \" e t \"Vous\" s o n t pre*sent§s s u r l e s qua-t r e n i v e a u x du r E c i t e t a chacun de ces n i v e a u x , i l s p r o d u i -s e n t de nouveaux r o l e s . L ' a c t a n t \" I l / E l l e \" e s t p r e s e n t s u r l e s n i v e a u x C e t D. C e r t a i n s des r o l e s se r t p e t e n t s u r deux ou p l u s i e u r s n i v e a u x : p a r exemple, l e r o l e de s c r i p t e u r e x i s t e s u r l e s n i v e a u x A e t B, c e l u i d'amant s u r l e s n i v e a u x B, C e t D. On note a u s s i qu'au n i v e a u C, l e s a c t a n t s \" J e \" e t \" I I \" p r o d u i s e n t l e s mimes r o l e s , ce q u i f a i t qu'une 3eme personne peut assumer 1'usage de \" J e \" e t c e l u i q u i d i t \" J e \" peut p r e n d r e l e s t a t u t de l a 3eme personne t e l A n t h o i n e , au debut du roman, quand i l r a c o n t e e t e s t raconte* p a r l e s c r i p t e u r . Les a c t e u r s s o n t ceux q u i ont r e c u s t a t u t de p e r s o n n a -ges au moyen d'un nom p r o p r e : A l f r e d , A n t h o i n e , Fougere, e t c . Le nom p r o p r e c o n c r e t i s e , i n d i v i d u a l i s e en quelque s o r t e un r o l e donnS: a u s s i , l e r o l e de s c r i p t e u r e s t - i l r e m p l i p a r un nomme A l f r e d , mais r i e n n ' i n d i q u e q u ' i l s o i t l e s e u l a j o u i r de ce s t a t u t ; en f a i t , l e denouement m y s t e r i e u x de L a M i s e a mort l a i s s e c r o i r e q u ' A l f r e d n ' e s t pas l e s e u l a s ' a v e n t u r e r dans une e n t r e p r i s e s c r i p t u r a l e . Le r o l e d*amant permet p l u s d ' a c t e u r s c a r i l englobe non seulement A l f r e d e t A n t h o i n e , mais a u s s i l e s personnages r a c o n t e s q u i p a r t i c i p e n t a l ' a c t e 131 d'aimer: l e boxeur, L o u i s Aragon, S t r u e n s e e , O t h e l l o , e t c . Mais un a c t e u r peut a u s s i j o u e r p l u s i e u r s r o l e s : A l f r e d e s t s c r i p t e u r , amant, j a l o u x , e t c . b) M i s e en a c t i o n des \"personnages\" de \"La Mise a mort\": D S f i n i p a r l e s t r o i s a s p e c t s mentionnes ci-^dessus, l e concept de personnage s ' i n s t a l l e au n i v e a u du d i s c o u r s 3 - ' : \" J e \" , l ' a c t a n t , s e r a p r o j e t S en ses diff£rents r o l e s au moyen des Snonce's c o n t e n a n t \" J e \" . J e - s c r i p t e u r e s t a i n s i nomme' par c e que l e d i s c o u r s i n d i q u e son a c t i v i t y q u i l e c o n s t i t u e . On a de\"ja indique\" comment \" J e \" (au n i v e a u B ) p e u t e t r e s o i t A n t h o i n e s o i t A l f r e d . I I f a u t a j o u t e r que c e t t e c o n f u -s i o n s u b s i s t e p a r c e que l ' a c t a n t \" J e \" c o n c e p t u a l i s e d'abord deux r o l e s a r e m p l i r : c e l u i de s c r i p t e u r e t c e l u i d*amant. En e f f e t , au c h a p i t r e I , \" J e \" semble l u i a u s s i charme p a r l a v o i x de Fougere: a un c e r t a i n momentj on ne s a i t p l u s f a i r e l a d i s t i n c t i o n e n t r e A l f r e d e t A n t h o i n e c a r \" J e \" p a r l e comme s c r i p t e u r ( i l s ' a d r e s s e a son l e c t e u r ) e t comme A n t h o i n e q u i s ' e m e r v e i l l e devant l e chant de Fougere. Le passage s u i v a n t s e r a i t une i l l u s t r a t i o n de c e t t e c o n f u s i o n t o t a l e : E l l e c h a n t e . Vous ne l ' a v e z jamais entendue? Ses d i s q u e s , o u i . (...) Les gens me l ' e n v i e n t , Fougere, pour son y i S g a n c e , l e gout, ce dont e l l e s ' e n t o u r e , c e t e x t r a o r d i -n a i r e t a l e n t de donner v i e aux choses.\"36 Mais c e t t e c o n f u s i o n e s t , a p r e s coup, ^ c l a i r S e : \" J e \" n ' e s t pas une s e u l e e t meme personne; \" J e \" i n d i q u e l a presence 132 au n i v e a u B, de deux a c t e u r s : A n t h o i n e e t l e s c r i p t e u r q u i , on l ' a p p r e n d p l u s t a r d , s ' a p p e l l e A l f r e d . A i n s i , l e s moments ou l ' o n ne peut d i s t i n g u e r ces deux a c t e u r s i n d i q u e n t qu' A n t h o i n e , connu sous l e - r o l e d'amant, p a r t i c i p e a u s s i au r o l e de s c r i p t e u r ; de meme, A l f r e d p r i s pour l e s c r i p t e u r , e s t a u s s i amoureux de Fougere. A n t h o i n e e t A l f r e d s o n t a l o r s des a c t e u r s assumant e t l e r o l e de s c r i p t e u r e t c e l u i d*amant. Les a c t e u r s peuvent e t r e m a t S r i e l l e m e n t i n s t a b l e s : i l s o b S i s -s e n t , nEanmoins aux r o l e s q u ' i l s j o u e n t e t q u i l e s d S t e r m i n e n t p l u s que l e u r s noms p r o p r e s . L a l e t t r e a Fougere s u r l a j a -l o u s i e c o n f i r m e l e r o l e d*amant d ' A l f r e d b i e n que son amour ne s o i t pas payg de r e t o u r e t q u ' i l s o u f f r e . Au n i v e a u C du r e c i t , A n t h o i n e q u * A l f r e d r a c o n t e , assume au c o u r s de ses r e f l e x i o n s , l ' u s a g e de \" J e \" . En ce f a i s a n t , i l i n t r o d u i t deux a u t r e s r o l e s : l ' t c r i v a i n r t a l i s t e e t l'homme au m i r o i r . Durant son' \"monologue i n t e r i e u r \" , i l e s t obstde p a r l a p e r t e de son image dans l e m i r o i r : i l se remSmore une f o i s ou Fougere l ' a s u r p r i s devant l a g l a c e . En meme temps, i l re*fl£chit s u r son m e t i e r d ' e c r i v a i n r e a l i s t e i n t e r v i e w e a l a r a d i o . A l f r e d , - pendant ce temps v i t au temps des s o u v e n i r s : i l r e v i t ce passe ou Foug5re p a r t a g e a i t son amour ( l a seconde l e t t r e a FougSre) e t i l se s o u v i e n t de s a r e n c o n t r e avec C h r i s t i a n F u s t e l - S c h m i d t q u i l u i a u s s i , semble a v o i r des problemes avec son m i r o i r B r o t : i l s'y v o i t m u l t i -plie. Peu peu, A l f r e d d e v i e n t j a l o u x e t de C h r i s t i a n e t • • 133 d*Anthoine q u i se posent commes ses a n t a g o n i s t e s pour 1 'amour de Fougere. L ' S t a t de j a l o u s i e empire t e l l e m e n t q u * A l f r e d pense avec o b s e s s i o n se d S b a r r a s s e r de son r i v a l p r i n c i p a l A n t h o i n e que Fougere t u t o i e . En t a n t que \" J e \" , A l f r e d joue s u r ce n i v e a u C, p l u s i e u r s r o l e s : i l e s t 1 'amant, l e j a l o u x e t l ' a g r e s s e u r en p u i s s a n c e . R i v a u x pour 1 'amour de Fougere, l e s t r o i s a c t e u r s A n t h o i n e , A l f r e d e t C h r i s t i a n p e u v e n t - c o e x i s t e r , se p a r l e r , a l l e r ensemble au c o n c e r t O t h e l l o de S o b a t c h k o v s k i . L e u r s noms i m p o r t e n t moins que l e u r r o l e : en f a i t , l e u r r e n c o n t r e dans l e t e x t e ne d e v r a i t pas e t r e s i choquante /qu'on ne l e pense. A p a r t i r du n i v e a u G, on remarque s i n o n une r e p e t i t i o n , du moins une ressemblance des r o l e s des a c t a n t s \" J e \" e t \" I I \" . L ' a c t a n t \" I I \" d S s i g n e a u s s i A n t h o i n e , C h r i s t i a n e t M i c h e l quand l e s c r i p t e u r p a r l e d'eux. A n t h o i n e a u s s i a r r i v e a j o u e r l e s r o l e s du j a l o u x e t de l ' a g r e s s e u r : \" J ' a i brusquement co m p r i s 1'impensable: c ' e s t a r r i v e , A n t h o i n e e s t j a l o u x de moi. Pour q u ' i l m ' a i t t o u t a l ' h e u r e a p p e i e Iago... \" 3 7 E t quant a 1 ' a g r e s s i o n d ' A l f r e d , on ne s a u r a i t d i r e s ' i l e t a i t l ' a t t a q u a n t ou s i c ' e s t A n t h o i n e q u i l ' a a t t a q u e : c ' e s t t o u t de meme A l f r e d qu'on decouvre b a i g n a n t dans son sang. C h r i s t i a n , en t a n t que 3^me personne, e s t a u s s i a c t e u r de p l u s i e u r s r o l e s : i l e s t don j u a n des femmes; i l - e s t a u s s i l'homme au m i r o i r p u i s q u ' i l s ' i n q u i e t e de c e t t e p o l y v a l e n c e de son image dans l e m i r o i r . Quant a M i c h e l , i l f i g u r e au 134 debut comme l ' S c r i v a i n r t a l i s t e q u ' e s t l e j o u r n a l i s t ' e : q u o i de p l u s t e r r e a t e r r e que de r e c u e i l l i r : . l e s n o u v e l l e s j o u r n a -l i e r e s de ce monde q u i to u r n e ? Au c o u r s de s a c o n v e r s a t i o n avec A n t h o i n e au r e s t a u r a n t , M i c h e l mentionne l e r o l e d i a b o -l i q u e du \" r e t o u c h e u r \" q u i ne peut l a i s s e r un a r t i c l e j o u r n a -l i s t i q u e t e l qu'on l.'a prepare. Sa p r e o c c u p a t i o n au s u j e t du \" t u e u r \" l a i s s e v o i r en M i c h e l l a m e n t a l i t y • d e l ' e c r i v a i n q u i se c r o i t r t a l i s t e en m e t t a n t s a f o i en des s t e r e o t y p e s : l e t u e u r l u i a p a r u t u e u r - p a r c e q u ' i l en a l ' a i r . On ne peut n i e r a l o r s q u ' i l y a i t s i m i l a r i t e e n t r e l e s a c t a n t s \" J e \" e t \" I I \" . C h r i s t i a n e t M i c h e l p a r l e n t eux a u s s i en l e r e personne dans l e roman. C e l a i n d i q u e que \" I I \" e s t une r e p r e s e n t a t i o n p l u s l o i n t a i n e de J e - 1 ' a u t e u r : c ' e s t encore une p a r t de 1'auteur q u i e s t p e r s o n n a l i s e e e t jouee avec l a p a r t i c i p a t i o n d ' a c t e u r s ; c ' e s t un \" J e \" o b j e c t i v e q u i a p p r o f o n -d i t encore l a d i s t a n c e p s y c h o l o g i q u e e n t r e 1'auteur e t son t e x t e . V o i l a e x p l i c i t e l e r a p p o r t e n t r e l e s u j e t de r a c o n t e r e t son o b j e t , l ' h i s t o i r e . Au n i v e a u D, l ' a c t a n t \" J e \" d S f i n i t l e r o l e de s c r i p t e u r en t a n t que c r i t i q u e , assume p a r l ' a c t e u r A l f r e d , v i s - a - v i s d'une a u d i t r i c e - l e c t r i c e I n g e b o r g . Le r o l e d'amante se d i s -t i n g u e nettement de c e l u i de l e c t r i c e c a r s i F o u g e r e - e s t l e nom d ' i n t i m i t e pour l a femme aimee e t q u i aime, Ing e b o r g , nom charge d'or, d e s i g n e un r o l e de dame q u \" A l f r e d v o u v o i e - ^ . 135 L ' a c t a n t \" I I \" i c i o f f r e l e s memes r o l e s que ceux du n i v e a u C a 1 * e x c e p t i o n du r o l e d ' S c r i v a i n q u i n'a pas l ' S p i -t h e t e prS'somptueux de \" r S a l i s t e \" . Les a e t e u r s q u i j o u e n t ce r o l e s o n t t o u s des e c r i v a i n s connus dans l e monde l i t t e r a i r e . E n un sens, A n t h o i n e f a i t p a r t i e de c e t t e l i g n S e d ' S c r i v a i n s s a u f q u ' i l se d i t a p p a r t e n a n t a une t r a d i t i o n appelSe l e r S a l i s m e . A l i c e , dans 1*oeuvre de L e w i s C a r r o l l , e s t l a p e t i t e f i l l e q u i f a i t p l u s qu'un A n t h o i n e ou un C h r i s t i a n : e l l e t r a v e r s e l e m i r o i r e t p e n e t r e dans un monde f a n t a s t i q u e mais gouverne\", en r S a l i t S , p a r une l o g i q u e Stonnante. L'amant, c ' e s t l e boxeur q u i se s u i c i d e , P i e r r e Houdry dans Le C a r n a v a l , J . F . S t r u e n s e e dans•Murmure, Freddy a l i a s Oedipe, e t a u s s i ce mSd.-aux. L o u i s Aragon que Houdry a p e r c o i t au c o n c e r t a l a s a l l e Gaveau, accompagnS de s a femme ( q u i d ' a u t r e q u ' E l s a T r i o l e t ? ) q u i e s t a u s s i 1 ' i n c a r n a t i o n f e m i n i n e de l ' a c t a n t \" I I \" p u i s q u ' A l f r e d e t I n g e b o r g d i s c u t e n t l e s oeu-v r e s romanesques de l a femme S c r i v a i n E l s a T r i o l e t . O t h e l l o e t Iago, personnages s h a k e s p e a r i e n s , d e v i e n n e n t a e t e u r s j o u a n t l e r o l e du j a l o u x . Dans ce r o l e , \" I I \" r e n v o i e a \" J e \" p a r c e qu'a c e r t a i n s moments, O t h e l l o e t Iago a g i s s e n t en l e r e p e r -sonne a t r a v e r s A n t h o i n e e t A l f r e d . Le c o l l a g e , s i l ' o n v e u t , permet aux a e t e u r s i n c a r n a n t l e j a l o u x s u r l e s n i v e a u x C e t D, de changer a u s s i d ' i d e n t i t S s . Dans l e 3eme c o n t e , Oedipe e s t m e u r t r i e r a u - d e l a meme de l ' a c t e g r a t u i t : i l t u e sans c o n n a i -t r e l a v i e t i m e n i l e l i e u . O t h e l l o e t Iago a u s s i ont l e u r 136 p a r t dans l e r o l e d 1 a g r e s s e u r ; l e u r a g r e s s i o n se d S p l o y a n t v i a A l f r e d e t A n t h o i n e . On a d S j a vu q u ' i l y a i n t e r t e x t u a -l i t S e n t r e l e s n i v e a u x C e t D; p l u s i m p o r t a n t e n c o r e - e s t l e r e n v o i de 1'image A dans l e m i r o i r D q u i j u s t i f i e p l e i n e m e n t l a prEsence d'Aragon en t a n t q u ' a c t e u r au n i v e a u A du r E c i t . Le s a u t de D a A, c'est- a u s s i P i e r r e Houdry a p e r c e v a n t Aragon e t E l s a au c o n c e r t R i c h t e r , c ' e s t se s i t u e r dans l e monde du t e x t e pour r e g a r d e r le-monde \" r E e l \" . A i n s i , Aragon e s t d'abord, a c t e u r de l ' a c t a n t \" I I \" au n i v e a u D, p u i s d e v i e n t a c t e u r dans l e r o l e du s c r i p t e u r au n i v e a u A. I I n ' i n c a r n e t o u t e f o i s pas t o t a l e m e n t l ' a c t a n t \" J e \" : i l p a r t a g e son oeuvre, on l e s a i t , avec A l f r e d connu comme J e - s c r i p t e u r . Dans l e monde de-La Mi s e a mort, oeuvre composSe, Aragon n'a pas p l u s d'importance que l e s a u t r e s a c t e u r s . Comme eux, i l e s t f i g u -r a n t dans l e monde du t e x t e q u i , p a r s a s o u p l e s s e p o S t i q u e , e s t beaucoup p l u s v a s t e e t p l e i n de v S r i t S s que l e monde r E e l q u i a u r a i t du l ' e n g l o b e r mais q u i en e s t englobS. Le monde r E e l f a i t a l o r s p a r t i e de L a Mise a mort. En d ' a u t r e s mots, Aragon lui-meme n i e r a i t une m a i t r i s e t o t a l e s u r son t e x t e : t e l A l f r e d , i l e s t d i r i g S p a r son t e x t e , ses personnages. L ' e n t r e p r i s e s c r i p t u r a l e n ' e s t j a m a i s a sens unique. L a d i s t i n c t i o n e n t r e l e s n i v e a u x dans l e t a b l e a u r e p r S -s e n t a n t l ' a c t a n t , l e r o l e e t 1 ' a c t e u r en t a n t q u ' a s p e c t s du personnage s e r t a u s s i a i n d i q u e r que l a c r E a t i o n des p e r s o n -nages donne une c e r t a i n e E p a i s s e u r au r E c i t : p u i s q u e ces t r o i s aspects figurent sur tous les quatre niveaux du recit, l a lecture doit eonstamment s'assouplir et se maintenir a plu-sieurs Stages. Une lecture unilineaire du roman entrainerait surement a l a confusion et au dSsordre. On voit aussi que chaque niveau du recit crSe de nouveaux rapports entre actants, entre roles et aeteurs, ou encore entre les aeteurs eux-memes. L*existence d'Anthoine sSparS d'Alfred est tout a f a i t legitime: ce qui devient alors illSgitime, c'est quand Alfred cherche a faire croire, qu'il est Anthoine, mais un Anthoine du passe. La scission qui a eu l i e u entre eux a donnS nais-sance a un autre etre sur papier et s i Alfred, vers l a f i n , tente dSsespSrSment de se persuader qu'Anthoine n'existe pas, c'est qu'il se dupe. N'a-t-il pas auparavant parlS a Anthoine? Ne sont-ils pas allSs au theatre, n'ont-ils pas f a i t une pro-menade ensemble? C'Stait alors un jeu qu'Alfred pouvait accep-ter mais maintenant que le jeu devient trop dangereux pour l u i , i l se voit incapable de l'arreter. La presence d'Anthoine est ineluctable. Le jeu deborde Alfred qui l u i a cree des regies, le jeu desormais obeit a ses propres l o i s . On a vu dans le tableau qu'Anthoine figure comme acteur: i l a, ainsi, droit d'exister tout autant que les autres (Alfred, y compris). Et s i l'on admet 1*existence d'Anthoine dans La Mise a mort, on tend deja a reconnaitre l a legitimite du monde livresque: derriere 1'apparent desordre du recit se cache une structure logique et ordonnee a laquelle obeit le roman. La presence 138 d'Aragon lui-meme ne r e c e l e p l u s de s u r p r i s e : e l l e e s t a p p e l t e p a r l a s t r u c t u r e du t e x t e . L a c r e a t i o n des p e r s o n -nages dans L a M i s e a mort e s t l o i n d ' e t r e \"baste s u r 1'essence p s y c h o l o g i q u e de l ' e t r e : e l l e e s t a c t i v i t y s t r u c t u r a l e ou 1'Emanation d'une s t r u c t u r e se pose comme, c o n d i t i o n p r e m i e r e pour 1 * e x i s t e n c e d'un personnage, e t pour s a j u s t i f i c a t i o n . L ' e r r e u r a l o r s s e r a i t de j u g e r l e personnage de L a M i s e a mort p a r l e s p r o p o r t i o n s d'une personne r t e l l e c a r c o n t r a i r e m e n t a c e t t e d e r n i e r e , l e personnage n'a qu'a o b t i r aux l o i s du monde ou i l a g i t , q u i e s t c e l u i du t e x t e . 4 - Temps e t espace: • J u squ'a m a i n t e n a n t , on a vu que l e r e c i t se d t r o u l e au moyen de s t r u c t u r e s , p r i n c i p a l e m e n t c e l l e s des n i v e a u x e t des p r o n o m s - a c t a n t s . L a M i s e a mort, gra c e aux n i v e a u x , - s ' t r i g e en un espace q u i e s t l e l i v r e . C e c i c o n f i r m e l a d e c l a r a t i o n d'Aragon s u r l ' e s p a c e : \"L'espace n ' e s t pas l e monde, mais l e l i v r e . C ' e s t ... un espace-papier. \" 3 9 Lie e t r o i t e m e n t a c e t e s p a c e - p a p i e r e s t l e dynamisme- du temps: \"Dans c e t e s p a c e - p a p i e r , l e temps c o u l e avec une V i t e s -se v a r i a b l e , ce temps que nous appelons l e temps romanesque e t q u i e s t ' l ' a c t i v i t e de 1 ' e s p a c e - p a p i e r ' , s i j e p u i s d i r e . C ' est s u i v a n t ce temps i n v e n t e que se d i s p o s e , se d t r o u l e l e recit.\"^° L'on ne s a u r a i t done s e p a r e r 1'etude du temps de c e l l e de l ' e s p a c e p u i s q u e l ' u n presuppose 1 ' a u t r e . L ' e s p a c e - p a p i e r . . . . i 3 9 de L a M i s e a,mort. e s t i n s t i t u S p a r l ' e c r i t u r e . De ce f a i t , l e ' temps lui-meme e s t cree p a r l ' e c r i t u r e . C 'est ce qu'Emile B e n v e n i s t e a p p e l l e l e temps l i n g u i s t i q u e q u ' i l d i s t i n g u e du temps p h y s i q u e e t du temps c h r o n i q u e e t q u ' i l ' d e f i n i t comme \" f o n c t i o n du discours\"^\" 1\". Ce temps e s t p l u s v e r i t a b l e m e n t lie au J e - s c r i p t e u r ( q u i e s t d ' a i l l e u r s a u s s i i d e n t i f i e au moyen du d i s c o u r s ) p u i s q u e c ' e s t son e x p e r i e n c e du temps q u ' i l p a r t a g e avec son l e c t e u r , e t on sonde c e t t e e x p e r i e n c e i n d i y i -d u e l l e du temps d e c l e n c h e e dans l e t e x t e a p a r t i r d'une i n s -t a n c e de l ' e c r i t u r e : c e l l e ou J e - s c r i p t e u r e s t a s a t a b l e e t e c r i t un roman. I c i e n c o r e , l e temps de L a M i s e a mort r e -j o i n t l a d e f i n i t i o n du temps l i n g u i s t i q u e q u i a \"son c e n t r e 4 - 2 g e n e r a t e u r dans l e p r e s e n t de 1 ' i n s t a n c e de l a p a r o l e . \" L a M i s e a mort repose s u r \\un p r e s e n t a x i a l q u i e s t c e l u i de l ' e c r i t u r e : J e - s c r i p t e u r a s a t a c h e . Ce p r e s e n t e s t c o n s t a n t : l e temps a l o r s s ' i d e n t i f i e a l a p r e s e nce t e x t u e l l e d'un \" J e \" en t r a i n d ' e c r i r e . E n t r e ces moments s t a b l e s du p r e s e n t se d i f f u s e n t l e s pensees e t l e s s o u v e n i r s ou \" J e \" e f f e c t u e p l u s i e u r s voyages a t r a v e r s des espaces e t des temps d i f f e r e n t s . S i l ' o n v e u t b i e n r e v o i r l a p h r a s e - r e c i t \"Je vous r a c o n t e une h i s t o i r e \" , on v e r r a l a d i s t i n c t i o n n e t t e e n t r e un p r e s e n t de l ' e c r i t u r e e t l e s temps sondes dans \"une h i s t o i r e \" . L ' i n t e r e t i c i s e r a i t e n s u i t e , d'examiner l e r a p p o r t e n t r e ces deux p o l e s du temps. 140 Prenons d'abord, l a p a r t i e I I du p r e m i e r c h a p i t r e du roman: on d i s t i n g u e d'abord un p r e s e n t i m p l i c i t e de 1 * e c r i t u -r e p a r l e f a i t qu'Anthoine e t Fougere r t a g i s s e n t en 3emes personnes q u i s o n t r a c o n t t e s . J e - s c r i p t e u r e s t done, a s a t a b l e de t r a v a i l . En meme temps, p u i s q u e l a c o n v e r s a t i o n e n t r e A n t h o i n e e t Fougere e s t r e p r e s e n t e e , c e t t e scene devant l a c o i f f e u s e se passe a l o r s dans ce qu'on a p p e l l e r a l e p r e s e n t n a r r a t i f ou des evenements p a s s e s s o n t p r e s e n t e s comme s ' i l s se p a s s a i e n t devant l e l e c t e u r . Ces deux p r e s e n t s se c o n f o n -dent dans l e t e x t e , mais peuvent se d i s t i n g u e r p a r l e f a i t q u'Anthoine r a c o n t a n t l e u r s s o u v e n i r s t u t o i e Fougere t a n d i s que l e s c r i p t e u r p a r l e d ' e l l e en 3eme personne. Du p r e s e n t n a r r a t i f (devant l a c o i f f e u s e ) ou A n t h o i n e r a c o n t e l e s souve-43 n i r s , se degage un temps vu \"en a r r i e r e a p a r t i r du p r e s e n t \" J - s i t u e c h ronologiquement v e r s 1936-37, temps ou A n t h o i n e e t Fougere se t r o u v a i e n t en compagnie de M i c h e l , l e u r ami j o u r n a -l i s t e , au r e s t a u r a n t rue M o n t o r g u e i l . Au c o u r s de l a c o n v e r s a -t i o n e n t r e eux, s u r g i s s e n t des b r i b e s de s o u v e n i r s d'un voyage f a i t a Moscou pour a s s i s t e r a 1'enterrement de Maxime G o r k i , une de l e u r s c o n n a i s s a n c e s l i t t t r a i r e s : on a l a , I n v o c a t i o n d'un passe p l u s eioigne q u i , a cause de 1 ' e c r i t u r e , se s e r a i t t r o u v e c o n t e m p o r a i n au passe proche s ' i l n'y a v a i t pas l e j e u s p a t i a l q u i e n t r e l a c e l e s s o u v e n i r s des deux epoques e t q u i p r e v i e n t q u ' i l e x i s t e b e i e t b i e n deux n i v e a u x t e m p o r e l s du pass e . Du passe l o i n t a i n , s'op§re un r e t o u r d'abord au passe 14-1 proche q u i peut a u s s i e t r e p r e s e n t n a r r a t i f , p u i s q u ' A n t h o i n e se t i e n t devant l a c o i f f e u s e de Fougere: \"Cesse de t e r e g a r d e r dans l a g l a c e ! \" d i t Fougere. P u i s , s * i n d i q u e un p r e s e n t n a r r a t i f q u i peut a u s s i p a s s e r pour l e p r e s e n t du d i s c o u r s : \" Q u e l l e g l a c e ? Qu'est-ce que ga f a i t , q u e l l e - g l a c e ? De V e n i s e , ou n ' i m p o r t e . J e ne me r e g a r d e pas dans l a g l a c e , d ' a i l l e u r s . \" -C e t t e r e a c t i o n peut e t r e s o i t c e l l e d'Anthoine q u i r<§a-g i t i n t e ' r i e u r e m e n t : c ' e s t l a une r e f l e x i o n de s a p a r t , s o i t c e l l e de J e - s c r i p t e u r q u i e s t p r e s e n t t o u t au l o n g . • On a, dans ce passage, une s t r u c t u r e c o n c e n t r i q u e ou l e s s o u v e n i r s s'emboitent s u r q u a t r e n i v e a u x t e m p o r e l s . On r e t r o u v e c e t t e meme s t r u c t u r e dans \"Le M i r o i r t o u r n a n t \" : l a , l e p r e s e n t de l ' e c r i t u r e r e s t e i m p l i c i t e mais on l e d e v i n e p a r c e que quelques f o i s , Fougere dont p a r l e J e - A l f r e d , d e v i e n t \"Tu\" pour l u i , a d r e s s e f a m i l i e r e q u ' i l n ' a u r a i t j a m a i s f a i t e d evant Fougere sans en e t r e reprimande\". \" E l l e d i t que j ' i n v e n t e , qu'on ne peut pas e t r e malheu-r e u x pour t o u t l e monde, que c ' e s t de l a p e r v e r s i t y . E l l e d i t que j e me c o m p l a i s dans l e malheur (.. . ) . Mais t u ne m'aimes pas, t u ne m'aimes pas. E l l e ne s a i t pas.\"^4 J e - s c r i p t e u r e s t i c i dans 1 ' i n s t a n c e du d i s c o u r s . I I i n t r o d u i t e n s u i t e , l e p r e s e n t n a r r a t i f ou i l f i g u r e s e u l , pen-s a n t a s a d i s c u s s i o n avec Fougere e t eprouvant de l a p e i n e a ne pas e t r e aimS de r e t o u r . De ce p r e s e n t n a r r a t i f de l a r e f l e x i o n se degage l e s o u v e n i r d'une a u t r e d i s c u s s i o n avec 1 4 2 I n g e b o r g , s o u v e n i r d S c l e n c h t p a r une r e f l e x i o n s u r S t e n d h a l e t s a c o n c e p t i o n de 1 ' o p e r a , ce q u i a p p e l l e l a presence d ' I n -geborg c a n t a t r i c e ; e t a i n s i se t r o u v e i n s t a l l s l e passe proche: \"Nous S t i o n s dans c e t t e p i e c e ou e l l e t r a v a i l l e , avec l a grande b i b l i o t h e q u e en p i n des L a n d e s . . . \" 4 5 De c e t t e p i S c e s o n t e x p l o r e s d i f f S r e n t s e p i s o d e s d'un passS l o i n t a i n : passS de g u e r r e , passS d'amour. I I - y a un r e t o u r d'abord au passS p r o c h e : I n g e b o r g e t A l f r e d p a r l e n t des oeuvres romanesques d ' E l s a T r i o l e t , e n s u i t e au p r S s e n t n a r r a t i f : A l f r e d v a c h e r c h e r c o n f i r m a t i o n de son i d S e de meurtre dans Oedipe; e t pour f i n i r , au p r e s e n t de 1 * e c r i t u r e quand a t r a v e r s 1 * S c r i t , A l f r e d t u t o i e Fougere: \"C'est t o i , Fougere, a q u i s ' o u v r e n t ces r e g i o n s a mes p a r e i l s i n t e r d i t e s . . . ces r e g i o n s ou j e n ' a u r a i j a m a i s accSs que par t o i . \" 4 6 \"Le M i r o i r B r o t \" , p a r c o n t r e , o f f r e une a u t r e s t r u c t u r e t e m p o r e l l e i n t S r e s s a n t e dans un espace d i s p o s e en c i n q e p i s o -des, q u i prend 1 ' a l l u r e d'un c o n t e . L a c o n s c i e n c e du s c r i p -t e u r dSmarre t o u j o u r s d'un p r e s e n t g S n S r a t e u r : i l q u e s t i o n n e son t e x t e e t p l o n g e d'emblSe dans d e s • s o u v e n i r s de s a j e u n e s s e : l e f a i t de f a i r e s a v o i r q u ' i l remonte l e temps l e d S p l a c e j u s -qu'a un passS l o i n t a i n . L ' e v o c a t i o n de ce passS de j e u n e s s e se m i l e a c e l l e d'un passS proche ou A l f r e d t r o u v e r a l a s o l u -t i o n du mystdre B r o t e t en mime temps, une e x p l i c a t i o n au mystere de l a p e r t e de 1'image chez A n t h o i n e . Le temps c h r o -n i q u e de 18 ans e n t r e ces deux passes e s t t r a v e r s e en l ' e s p a c e 14-3 d'une ou deux phrases: \"Je ne l'avais jamais entendu ricaner, depuis dix-huit ans que je l e connaissais. \"^\"7 C'est, encore une f o i s , l e present de 1'Scriture e x p l i -cits qui c l o t \"Le M i r o i r Brot\" pour s i g n i f i e r que l e scripteur a f i n i d'explorer des regions de souvenirs d'ou i l revient pour recommencer une autre experience temporelle. Les t r o i s contes sont aussi rSvelateurs de jeux tempo-r e l s dans l e r e c i t , dont on reserve 1'analyse pour l e chapitre suivant. Si l e temps est \" 1 ' a c t i v i t y de 1'espace-papier\", c e l u i -c i de meme se manifeste a travers l e s jeux temporels i n s t i t u e s . La coincidence de deux ou plusieurs temps s'Srige alors en dimension spatiale: l e dShut de l a premiere l e t t r e a Fougere donne 1'impression qu'elle f a i t p artie du r e c i t du Je-scripteur, done du niveau de l a Narration B; nSanmoins, l a f i n intr o d u i t une Fougere qui a deja p r i s connaissance de l a l e t t r e : l e niveau B alors se dSdouble de facon surprenante, en niveau de l a F i c t i o n C. En meme temps, cette l e t t r e nous est prSsentSe formellement dans l e texte: e l l e se situe done sur l e niveau de l a Narration A. Le dScalage temporel entre l e commencement de l a l e t t r e (le moment ou Fougere n'a pas encore l u l a l e t t r e ) et l a f i n (le moment ou Fougere l ' a lue) et l a presence tex-tu e l l e de l a l e t t r e donnent a c e l l e - c i un contexte tridimen-sionnel ou l ' e c r i t u r e aboutit a un espace qui est l e l i v r e . . . 144 Une deuxieme i n s t a n c e de l a m a n i f e s t a t i o n de l ' e s p a c e se p r S s e n t e dans \" D i g r e s s i o n du roman comme m i r o i r \" ou 1'expo-se s u r l e roman q u ' A l f r e d donne a Ingeborg a p p a r t i e n t a deux n i v e a u x t e m p o r e l s : l e temps r a c o n t e ou I n g e b o r g e t A l f r e d se p a r l e n t e t l e p r e s e n t de 1 ' e c r i t u r e q u i t r a n s f o r m e 1-'expose en t e x t e . L a c o i n c i d e n c e de ces deux n i v e a u x t e m p o r e l s donne un c e r t a i n gonflement au passe q u i e s t mis en r e l i e f p u i s q u e ce passe c o t o i e un p r e s e n t a p e r c u comme t e x t e . L'espace du t e x t e o f f r e une c e r t a i n e i l l u s i o n s p a t i a l e q u i t e n d a s u g g e r e r l e r e e l . C 'est a l o r s 1 ' e c r i t u r e q u i c r e e l ' e s p a c e e t non l ' e s -pace qui-donne l i e u a l a p r a t i q u e de 1 ' e c r i t u r e . F i n a l e m e n t , dans l e d e r n i e r c h a p i t r e du roman i n t i t u l e \"Le M i r o i r b r i s e \" q u i renferme un denouement m y s t e r i e u x e t t r a g i q u e , l e p r e s e n t de 1 ' e c r i t u r e assume une t r a n s p a r e n c e v i s -a - v i s de ce q u i e s t r a c o n t e , du p r e s e n t n a r r a t i f (\"Je\" se p r o -mene a P a r i s ) de s o r t e que l a presence du s c r i p t e u r n ' e s t p l u s r e s s e n t i e comme e s s e n t i e l l e pour l e denouement. L a r e p r e s e n -t a t i o n du drame jusqu'au moment f i n a l ou A l f r e d d i t : \"Je perds mon sang\" e s t encore une t e n t a t i v e pour c r e e r 1 ' i l l u s i o n d'un espace r e e l . M ais l ' o n s a i t que j u s q u e - l a , i l y a t o u -j o u r s A l f r e d - s c r i p t e u r q u i t i e n t l a plume: i l a b i e n pu c o n t i n u e r son roman aprSs c e t i n c i d e n t , dans s a f o l i e . L a f i n de L a Mise a mort, t o u t e f o i s , n ' e s t pas de l u i : e l l e e s t un mystere. En e f f e t , l ' e x t r a i t imprime en i t a l i q u e s r a c o n t e comment on a d e c o u v e r t A l f r e d dans l a s a l l e de b a i n s , e t 145 l ' a r r i v e e du d o c t e u r accompagne\" de C h r i s t i a n , q u i a annonce\" e n s u i t e a F o u g e r e q u ' A l f r e d e s t d e v e n u f o u . On e s t a l o r s en t r a i n de r a c o n t e r A l f r e d : i l e s t d e v e n u l a 3eme p e r s o n n e . Ce p a s s a g e e n i t a l i q u e s r e s s e m b l e c u r i e u s e m e n t a c e r -t a i n e s c i t a t i o n s de t e x t e s l i t t S r a i r e s e x i s t a n t , e t s u r t o u t , a l ' e x t r a i t t i r e \" du roman q u ' A n t h o i n e C S l e b r e S c r i v a i t e t q u ' i l l i s a i t a s o n ami. On se p e r m e t t r a i t a l o r s de p o s e r comme h y p o t h e s e q u ' A n t h o i n e e s t c e l u i q u i a t e r m i n g L a M i s e a m o r t . I I a a s s i s t s a l a s c e n e ; i l y S t a i t i m p l i q u S . Rappe- v I o n s a u s s i qu'en t a n t q u ' a c t e u r du n i v e a u B du r e \" c i t , A n t h o i n e a l u i a u s s i , l e d r o i t de p a r t i c i p e r au r o l e de s c r i p t e u r . I I e s t d ' a i l l e u r s , \" S c r i v a i n r S a l i s t e \" . On ne p e u t t o u t e f o i s , 48 r i e n a f f i r m e r : l a f i n d o i t r e s t e r u n m y s t e r e , m a i s e l l e e s t a u s s i t r e s i r o n i q u e c a r e l l e a f f i r m e q u ' A l f r e d ne p e u t e t r e s e u l s c r i p t e u r de L a M i s e a m o r t . E t r e s c r i p t e u r , c ' e s t j o u e r u n r o l e q u i s o i t a c c e s s i b l e a u s s i a d ' a u t r e s c o n s c i e n c e s . E n un s e n s , c ' e s t s u r l e c o l l a g e p r a t i q u e \" t o u t au l o n g de ce r o -man que se t e r m i n e La' M i s e a m o rt, t e x t e compose\" p a r - p l u s i e u r s e t non u n s e u l e s p r i t c r S a t e u r . L e s c o n t e s a u s s i p o s s e d e n t un e s p a c e e t u n temps a eux qu'on S t u d i e r a p l u s l o i n . L ' S t u d e de l ' e s p a c e dans L a M i s e a m o r t ne se t e r m i n e pas i c i : e l l e t r o u v e r a de n o u v e l l e s S l a b o -r a t i o n s dans l e c h a p i t r e f i n a l de c e t t e t h e s e . A i n s i , a v e c l ' a i d e des c a t a l y s e s , on e s t p a r v e n u a ex-p l o r e r dans L a M i s e a m o r t l e s a s p e c t s du temps, de l ' e s p a c e e t des p e r s o n n a g e s t e l s q u ' i l s n o u s a p p a r a i s s e n t dans u n t e x t e . . . 146 qui se veut avant t o u t , e x p l o r a t i o n de 1 ' e c r i t u r e . Le temps et l'espace ne sont plus seulement des concepts philosophiques, i l s mettent en marche des s t r u c t u r e s q ui servent a rendre plus v i s i b l e 1'existence de La Mise a mort en tant que l i v r e , et a rehausser de nouveau 1'importance du langage en tant que systeme semiologique, syst£me fundamental a tout roman qui se veut r t a l i s t e . 147 NOTES Louis Aragon, La Mise a mort, ORC, v o l . 33» pp. 17-18. 2 Roland Barthes, \" I n t r o d u c t i o n a 1'analyse s t r u c -t u r a l e des r e * c i t s , \" Communications, 8, 1966, p. 10. PP< 3 13-15-Louis Aragon, La Mise a mort, ORC, v o l . 331 4 I b i d . , p. 17 . 5 I b i d . , P- 3 5 . 6 I b i d . , P. 3 7 . 7 I b i d . V p. 18. 8 I b i d . , P. 7 3 . 9 I b i d . , p. 7 3 . i o I b i d . , pp. 7 6 - 7 7 . 1 1 En e f f e t , i l f a u t toujours se rap p e l e r que l e s noyaux r t v e l e n t l a presence du s c r i p t e u r tout au long du texte 12 Louis Aragon, La Mise a mort, ORC, v o l . 3 3 , p. 178. 13 I b i d . , p. 183. 14 \"Notre\" l e c t u r e . 15 pp. 1 8 5 - 8 6 Louis • Aragon, La Mise a mort, ORC, v o l . 3 3 , 16 I b i d . , p. 2 0 3 . ^ Lecteur n o n ^ f i c t i f : Ce l e c t e u r , c'est tout autant l e te\"moin auquel s'adresse l e s c r i p t e u r au niveau de l a Narra-t i o n B que c e l u i q u i prend connaissance de La Mise a mort au niveau de l a N a r r a t i o n A et q u i nous r e p r t s e n t e . 148 1 R L o u i s Aragon, L a Mise a mort, ORG, v o l . 33, p. 83. 19 7 S' i n t e r c h a n g e d : En e f f e t , l e dynamisme e n t r e l e s n i v e a u x du r e c i t n ' e s t >pas seulement une c h a i n e o r i e n t e e d'en-gendrements s u c c e s s i f s ; i l y a a u s s i i n t e r a c t i o n e n t r e un n i v e a u - m i r o i r e t l e niveau-image q u ' i l r e n v o i e . 20 Les c i t a t i o n s r S v e l e n t q u ' i l s ' a g i t des Beaux Quar-t i e r s , roman de L o u i s Aragon, S c r i t en 193^. 21 * E x t r a i t - d e L a Tempete de W i l l i a m Shakespeare, A c t e IV, Sc. I . 22 23 24 28 103. 29 L o u i s Aragon, L a Mise a mort, ORC, v o l , 33, p. 158. I h i d . , p. 193-I b i d . , p. 277. 2 ^ L a Mise a mort, ORC, v o l . 34, p. 79. 2 6 I b i d . , p. 211. 2 ? E t u d i S s p l u s l o i n dans ce c h a p i t r e . P i e r r e G u i r a u d , L a Syntaxe du f r a n c a i s , Que s a i s - j 30 V o i r l e c h a p i t r e I I I de c e t t e t h e s e . P. G u i r a u d , op. c i t . , p. 112. S e l o n E. B e n v e n i s t e , \"De l a s u b j e c t i v i t y dans l e lan g a g e , \" Problemes de l i n g u i s t i q u e g e n e r a l e . 3 2 A c t a n t : \" l e s u j e t du f a i r e en t a n t que p o t e n t i a -l i t y du p r o c e s e s t dSsignyrcomme a c t a n t . \" ( A . J . Greimas, Du sens, P a r i s : 1970, p. 168). 33 R o l e s : \"au n i v e a u du d i s c o u r s , i l ( l e r o l e ) se m a n i f e s t e d'une p a r t , comme une q u a l i f i c a t i o n , comme un a t t r i b u t de l ' a c t e u r , e t d ' a u t r e p a r t , c e t t e q u a l i f i c a t i o n n ' e s t du p o i n t de vue sSmantique que l a d§nomination subsumant un champ de f o n c t i o n s . \" ( A . J . Greimas, op. c i t . , p. 256). 3^ A e t e u r s : \" l e r o l e e s t une e n t i t y f i g u r a t i v e animy mais anonyme e t s o c i a l e ; l ' a c t e u r en r e t o u r , e s t un i n d i v i d u i n t y g r a n t e t assumant un ou p l u s i e u r s r o l e s . \" ( A . J . Greimas, op. c i t . , p. 256). 1 4 9 3 5 D i s c o u r s : langage u t i l i s e \" p a r l'homme. 36 L o u i s Aragon, L a Mise a mort, ORC, v o l . 3 3 , p . 1 7 - 1 8 . 3 8 L a Mise a mort, ORC, v o l . 3 4 , p. 2 2 2 . L ' a m h i g u i t S \"Vous/Tu\" a StS s i g n a l S e dans n o t r e c h a p i t r e I I I . 3 9 L o u i s Aragon, \"La s u i t e , dans l e s i d S e s , \" P r e f a c e aux Beaux Q u a r t i e r s , ORC, v o l . 1 1 , pp. 2 3 - 2 4 . ^° I b i d . , p. 2 4 . 4 1 E m i l e B e n v e n i s t e , Problemes de l i n g u i s t i q u e gSnS-r a l e , p. 73- Dans ce meme c o n t e x t e , B e n v e n i s t e S c r i t , \" c ' e s t p a r l a langue que se m a n i f e s t e 1 ' e x p e r i e n c e humaine du temps.\" 4 2 4 3 4 4 4 5 4 6 4 7 4 8 I b i d , , p. 73-E x p r e s s i o n de B e n v e n i s t e s i g n a l a n t l e passe\". L a M i s e a mort, ORC, v o l . 34, p. 8 4 . I b i d . , pp. 93-94. I b i d . , p. 40. L a M i s e a mort, ORC, v o l . 33, pp. 115-116. L o u i s Aragon S c r i t dans Je n ' a i j a m a i s a p p r i s a S c r i r e ou l e s i n c i p i t : \" S i , pour moi, l e dSbut d ' S c r i r e e s t un mystere, p l u s grand e s t l e myst§re de f i n i r , ce s i l e n c e q u i s u i t l ' S c r i t u r e . \" (p. 145). CHAPITRE V L'importance des trois contes L*importance des trois contes dans La Mise a mort s'enonce en trois aspects qu'on proposera d'Studier: premie-rement, les trois contes participent au mentir-vrai''' et pour cela possedent un temps et un espace tout a f a i t particuliers; deuxiemement, i l s fonctionnent en tant que miroirs au texte et finalement, les images qu'ils renvoient contiennent une destruction de l a conception traditionnelle de l a f i c t i o n . Les contes possedent 1'essence du roman qui emane d'une fusion entre mensonge et realite\". Ils font partie des deux mondes et pour cela constituent un aspect important dans La Mise a mort. En effet, on prend connaissance de ces contes d'abord au niveau des souvenirs evoquSs (celui de l a Fiction p C) : pendant l a discussion entre Ingeborg et Alfred sur l'art du roman, Ingeborg ne voulant plus Scouter une improvisation que l u i f a i t Alfred, demande a l i r e quelque chose de pertinent au sujet discut£. Alfred l u i donne a l i r e le premier des 150 151 trois contes qu'il dit etre ceux d'Anthoine: Murmure. Alfred lui-meme r e l i t les deux autres intitules Le Carnaval et Oedipe. En meme temps prtsentes comme textes d'autrui (ceux d*Anthoine), les trois contes se retrouvent aussi au niveau de l a Fiction D Smanant de l a Fiction C, ou i l s deviennent des textes de collage. Ces contes dont parle Alfred ne nous sont pas signalts simplement comme appartenant au monde f i c t i f des personnages: aux memes moments ou les personnages prennent connaissance des contes, ceux-ci nous sont pre\"sente\"s aussi comme faisant partie du texte de La Mise a mort. De ce f a i t , les contes sont aussi du niveau- de l a Narration A, faisant partie de l'oeuvre composSe. La lecture d'Ingeborg et l a relecture d'Alfred coincident alors avec celle de Vous-lecteur. • La coincidence de deux moments de lec-ture, l'un situe\" dans le passS des souvenirs (niveau-de l a Fiction C) et 1'autre dans le present de l'Scriture (niveau de l a Narration A) crte aux trois contes un espace a l a fois f i c t i f et re*el: comme texte qui se prSsente au lecteur, les trois contes appellent a un meme niveau de - presence palpable qu'est le l i v r e La Mise a mort, l'histoire d'Ingeborg et de ses amants. C'est l a , s i l'on veut, un \"piege-au-re'alisme\" puisque s i cette fictionC'C se deroule dans 1'illusion d'un espace rSel, elle ne respectte pas l a vraisemblance ni 1'orga-nisation d'un t e l espace: le lecteur s'attend a trouver le monde des personnages semblable;; au sien et alors, plus grande 152 sera sa stupeur en lisant qu'Anthoine parle a Alfred et qu'il existe quand on le croit etre d*imagination, cr§§ dans 1'es-p r i t d'Alfred. Une te l l e reaction chez le lecteur est logique tant qu'il essaiera de traiter l a Fiction C comme \" l a \" f i c t i o n de La Mise a mort; mais on a dSja vu que cette f i c t i o n ne re-prSsente qu'une face de l'histoire dans le roman, qu'elle est subordonne\"e a des instances de l'e\"criture, et que s i elle se soumet a l a lecture, c'est parce qu'elle appartient d'abord a une realite\" (le livre) qui possede en elle toute l a magie d'un monde f i c t i f . II faudra alors que l a lecture s'assou-plisse pour se situer entre mensonge et ve\"rite\", deux contrai-res qui ne font qu'un: le mentir-vrai-^, En ce sens aussi, i l n'y a pas qu'un auteur possible des trois contes. Ceci porte a croire d'abord que les trois contes sont d'Anthoine, mais apr&s l a lecture d'Oedipe, Alfred explique qu'il a donne\" a Anthoine l a premiere phrase' du conte: \"C'est ainsi, je dois l'avouer, que je calquai fort exactement sur une phrase de Jean de Bueil ce qui a l l a i t etre l a premi&re phrase d'Oedipe: 'Ce fut le plus tot f a i t qu'on mit a concevoir.* \"34 Ce qui parait etre camouflage de l a part d'Alfred au dtbut, est en f a i t legitime du point de vue structural du r t c i t : Anthoine est 1'auteur des contes au niveau de l a Fic-tion C, mais puisque ces contes participent aussi du niveau de l a Fiction D qui renvoie a l a Narration A, 1'auteur des contes peut etre encore soit Aragon soit Alfred. , . - 1 5 3 En tant que textes externes Indus dans le roman, les trois contes sont census reproduits en entier, contrairement aux extraits des textes l i t t e r a i r e s cites et commentSs, et jouent un role primordial dans le deroulement de l a Fiction C. En effet> outre le jeu -d*intertextualite\" qu'ils instituent avec l a fiction-mere-^, les trois contes fonctionnent• aussi comme des mises-en-abyme a tout le roman de La Mise a mort. Une mise-en-abyme est une autre histoire incluse dans une his-toire plus grande: elle reflete 1'.histoire qui l'englobe tout en y apportant des transformations, parfois anticipees. En d'autres termes, le conte dans La Mise a mort est un miroir refietant le recit mais le refle t renvoyS sera non plus iden-tique, mais grossi, enrichi. Chaque conte contient en germes un acte dScisif qui va anticiper le dSroulement de l a Fiction C. Les trois contes se placent sous le signe du souvenir emanant d'une instance de l'ecriture: Murmure rSvele une pre-sence qui ecrit mais qui se camoufle derriere un \"Je\" couche, essayant de se souvenir apres une amnesie de trois semaines; Le Carnaval a comme citation de tete, le \"Je est un autre\" rimbaldien qui signale que 1'auteur du conte s'efface des le debut, qu'il sera represente par ce Pierre Houdry se- souvenant de sa jeunesse en ecoutant un concert a l a Salle Gaveau. Et, dans Oedipe, le recit est f a i t par une conscience omnisciente qui sait tout d'Oedipe, qui le suit dans ses recherches de l a victime qu'il a assassinee. Avec l a mise en jeu de plusieurs 154 \"Je\" dans les trois contes, c'est le dSveloppement du temps qui est explore, surtout dans Murmure qu'on analysera d'abord. II y a dans ce conte une exploration de divers temps faite par cet homme allonge\" sur son l i t , qui essaie de se sou-venir. Ses souvenirs se melent tels dans un rive; diffSrents temps et espaces se cotoient et s'entremelent: i l se voit jeune h£ros blond, amant de l a reine de Danemark en l'an 1772; l'assaillent aussi des bribes d'une conference a Vienne ou l'on discutait de brulantes questions sur le Pathet Lao. Se melent a ces souvenirs des pensees sur 1'epoque ou i l est, sur l'age et sur l a mort. Tout cela aurait pu passer pour repre-sentation de l'homme plonge dans ses souvenirs et ses pensees, mais 1 * intervention de celle qu'il appelle Murmure et l a dis-cussion entre eux sur l'ecriture de l'histoire de l a reine de Danemark et de son amant Johann Friedrich Struensee, remettent tout le conte au present de l'ecriture et ajoutent une nou-velle dimension temporelle au conte. II y a ainsi dans Murmure, quatre niveaux temporels qui s'emboitent: \"Je\" ecri-vant Murmure et qui a ecrit l'histoire de Struensee et de sa reine se souvient du \"Je\" allonge sur son l i t : le present de l'ecriture amene le present narratif. \"Je\" du present narra-t i f se souvient alors des moments heureux passes avec Murmure, cette \"Tu\" a qui i l s'adresse, ensuite du conte qu'il a ecrit, ayant pour espace le Danemark, et des evenements politiques a Vienne. Dans les souvenirs de cet homme defilent un passe pro-155 che (sa vie avec Murmure) et un passe* lointain (celui situe* en 1772 jusqu'a celui de Vienne). S'opere ensuite un retour du passe* lointain au passe* proche quand Murmure apparait pour entamer avec l u i une discussion sur Struensee. De ce passe* proche, on revient au present narratif ou \"Je\" allonge\" reprend conscience de son espace present: \"J'ouvre les yeux. La piece est pale.\" La presence implicite de celui qui Scrit Murmure est surtout marquSe par l a discussion entre l u i et Murmure. Les paroles de Murmure prSsentSes en typographie diffSrente sont remSmorSes \"par 1'auteur du conte tandis que les rSpliques de 1'auteur de l'histoire de Struensee et de sa reine, de typo-graphie semblable au reste du conte Murmure s'Snoncent au niveau de l'Scriture du conte. L'Scriture et l a parole se conjuguent alors dans une discussion qui semble etre le pro-longement de celle qui a eu l i e u dans \"Digression du roman comme miroir\"^ entre Ingeborg et Alfred. La reaction de Mur-mure a l'histoire de Struensee sera celle d'Ingeborg quand elle aura l u Murmure: ce conte contient alors l a rSponse qu'Alfred recherche apres que Foug&re le l u i aura rendu sans faire aucun commentaire. Murmure a ainsi anticipe* l a reaction d'Ingeborg-Fougere sans qu*Alfred s'en rende compte meme apres sa lecture de ce conte. En effet, on voit un Alfred se deman-dant sans cesse s i Murmure a engendre* des rSflexions chez Fougere avant que ce l l e - c i ne l u i rende le conte. Comme miroir 156 i n s t a l l s dans La Mise a mort, le premier conte Murmure • . reflete le dSveloppement du roman: i l en renvoie non seule-ment les Stapes passSes mais aussi les- futures. Tout comme Murmure, le deuxieme conte intitulS Le Carnaval renferme une anticipation: ce conte se termine avec l a dSception amoureuse de Pierre Houdry qui se voit devancS par un AmSricain pour 1'amour de cette jeune Betty rencontrSe dans le train qui le mene a son rSgiment cantonnS a Bichwiller en Allemagne. C'est cette dSception qu'Alfred aura a essuyer un peu plus tard apres l a lecture de Le Carnaval quand, sachant qu*Ingeborg a aussi pris connaissance de ce conte qu'il ne l u i a pas pretS, i l ressent 1'humiliation-d'etre ScartS d'un se-cret qu'on ne veut pas partager avec l u i . En effet, comment, se demande-t-il, Ingeborg s'est-elle procurS Le Carnaval? Ceci reste un mystere pour Alfred qui, n'ayant jamais su accep-ter 1'idSe que Fougere ne l'aime plus, ne saura pas non plus discerner l a premonition renfermSe dans ce deuxieme conte. L'emboitement du temps est rSduit dans Le Carnaval a trois niveaux: du prSsent de l'Scriture, on est transposS d'emblSe dans un prSsent narratif ou l'on rencontre \"Je\" du conte, Pierre Houdry, au concert. La, en Scoutant Richter jouer \"Le Carnaval\" de Schumann, Houdry se rappelle sa jeu-nesse quand i l f a i s a i t son service militaire en Allemagne, sa rencontre avec une Betty KnipperlS dont i l tombe amoureux. L*intrigue, pourtant mince, diffusSe en sept chapitres, se • - 1 5 7 d e r o u l e dans ce temps passe*. Pendant une pause, Houdry au c o n c e r t a p e r c o i t dans une l o g e v o i s i n e l e c o u p l e Aragon, l e m S d e c i n - a u x i l i a i r e dans l e c o n t e , e t s a femme E l s a . C'est a o ce p o i n t , e t on l e v e r r a p l u s l o i n , que l e c o n t e , comme l a F i c t i o n D au n i v e a u de l a q u e l l e i l s ' i n s t a l l e , a g i t comme m i r o i r a l a c r e a t i o n de L a Mise a mort: c ' e s t du monde f i c t i f qu'on a vue s u r l e monde r e e l . Quant a Oedipe, l e t r o i s i e m e c o n t e , i l a un a u t e u r q u i ne d i t pas \" J e \" mais r a c o n t e , comme presence o m n i s c i e n t e , l e s o r t d'un m e u r t r i e r q u i ne c o n n a i t pas l e v i s a g e de c e l u i q u ' i l a tue*. Sa quete de m o t i f s p e r s o n n e l s l'amene dans l a f a m i l l e d'une jeune e t u d i a n t e ; 1 ' a s p e c t dans ce con t e q u i r e f l a t e l e dSroulement de l a F i c t i o n G e s t , notamment, l a r e -cherche des m o t i f s du c r i m e : A l f r e d q u i avouera p l u s t a r d e t r e 1 ' a u t e u r de ce cont e s ' i n v e n t e des r a i s o n s pour- e x c u s e r 1 ' e l i m i n a t i o n d ' A n t h o i n e . Tout comme-pour Oedipe-Eddy, l e m e u r t r i e r entraine* p a r l a f o r c e des c i r c o n s t a n c e s j u s q u ' a ne p l u s s a v o i r ce q u ' i l f a i t , A l f r e d a u s s i s e r a v i c t i m e d'un j e u q u ' i l a u r a i n s t i t u t e t q u ' i l t e n t e r a en v a i n de r e j e t e r . V o i -l a , une f o i s e n c o r e , a n t i c i p e ' e 1 ' a g r e s s i o n d ' A l f r e d s u r An-t h o i n e e t l e r S s u l t a t b i z a r r e de c e t t e a g r e s s i o n . A l f r e d , t o u t e f o i s , ne s a u r a pas l i r e s on s o r t dans Oedipe e t r e t i e n d r a t o u j o u r s j a p r e s l a l e c t u r e de ce c o n t e , l a d e c i s i o n de t u e r A n t h o i n e , Oedipe r e t i e n t deux n i v e a u x t e m p o r e l s : l e p r e s e n t de 1 ' e c r i t u r e ou 1 ' a u t e u r du con t e ne t r a n s p a r a i t pas comme 158 \"Je\" mais dont l'activite\" sera signalSe par un des person-nages du conte, et le present narratif sur lequel se •de'roule le rScit, c'est-a-dire, le temps appartenant a Oedipe-Eddy et les personnes qu'il rencontre dans sa-poursuite de 1'.identity Q de sa victime. On verra plus ••loin comment cette co-existence des deux presents dans Oedipe contribuera a l'activite\" des-tructrice visant le culte traditionnel de l a creation litte-raire et qui se deVeloppera constamment du premier conte Murmure jusqu'au dernier Oedipe. En effet, les trois contes ne sont pas seulement des anticipations du dSveloppement de La Mise a mort, mais aussi des miroirs a 1'intSrieur du rScit qui renvoient des-reflets annoncant l a mort de l'histoire traditionnelle. Les contes ne retracent point l'histoire d'une vie mais des moments cru-ciaux d'une vie qui l u i donnent sa valeur: ainsi, un moment particulier s a t i r e en un temps long qu'explore l'activite\" d'Scrires \"Je\" allonge\" sur son l i t dans Murmure, ou- encore, Houdry au concert dans Le Carnaval vivent l'Sternite\" d'un moment. . Murmure debute \"in medias res\" des reflexions-de l'hom-me amnSsique. On ne dScouvre l a presence scripturale que plus tard. Les souvenirs se succedent et meme le melange- des temps respecte un certain dSsordre naturel de l a pensSe a l a ressem-blance d'un rive. L'histoire du conseiller danois est greffSe sur cet Scoulement de pensees comme s i \"Je\" s'imaginait etre 159 Struensee: un peu plus loin, on apprend qu'il s'agit l a d'une histoire Scrite, que Murmure critique. Ce premier conte semble alors refieter l a premiere etape de re pr e s entat i on dans La Mise a mort: comme au debut de ce roman ou une scene est d'abord representee, ensuite presentee par celui qui- 1'Scrit, i c i , aussi, i l y a representation visant a une tentative de realisme, ensuite l a denonciation de l a presence, cause de cette representation. Ce conte traduit une activite romanes-que qui repose sur une presence humaine br i l l a n t par son absence. L'ecrit repose toujours sur une activite scripturale: un premier pas vers le realisme, ce serait alors d'accepter aussi cette presence humaine qui forge une realite laquelle elle se prouve inherente, et non externe. Le deuxi§me conte, Le Carnaval, impose une philosophie de 1'auto-representation. II exclut, en un sens, l a presence de 1'auteur en le refietant a 1 1 interleur de l'ouvrage: le conte tente d'etre un ouvrage qui se tient tout seul. En effet, intitule Le Carnaval d'apres l a composition musicale de Schumann, le conte part d'une reflexion sur cette musique qui amene l a presentation de notre heros dans l a salle de concert. De cette salle s'ouvre alors l'espace du souvenir qui va entrainer Pierre dans une redecouverte de sa jeunesse qui ressemblait elle-meme a une comedie musicale par le monde fragile, de carton pate presque, ou elle evoluait: l'espace est celui d'une chambre fleurie garnie d'un piano et d'une 160 jeune f i l l e , du patinage sur un lac gele, de petites«filles rondes et betes, de vie militaire en rose, d'excursions dans un paysage dScoupS comme dans du carton. Ce monde quasi-fantastique appartient proprement au li v r e : c'est comme s i le conte cherche, en eliminant l a main qui 1'ecrit (\"Je est un autre\"), une certaine autonomie, mais son autoreprSsentation se faisant nScessairement devant un miroir le trahit en refietant l'un de ces auteurs possibles. En effet, Aragon acteur jouant le role du medecin-auxiliaire que Pierre Houdry voit a l a salle Gaveau en compagnie de sa femme Elsa est aussi acteur dans le role du Je-scripteur au niveau de l a Narration A. Mais contrairement a une f i c t i o n traditionnelle, c'est l a conscience d'uncpersonnage - celle de Houdry - qui permet 1'apparition de 1'auteur: ainsi, ce n'est plus 1'auteur qui commande le texte mais c'est ce dernier qui ouvre la>perspective d'une meilleure connaissance de 1'auteur. La destruction de l a f i c t i o n traditionnelle toute repre-sentative aboutit dans Oedipe a l a parodie du monde l i t t e r a i r e trop a l'affut d'interpretations psychologiques ou mythiques. L'emprunt a une discipline exterieure a l a litterature, ou meme l'emprunt a 1'heritage l i t t e r a i r e u t i l i s e ensuite non comme collage mais comme paraphrase philosophique subissent 1'insidieuse influence de l'ironie prevalant dans ce conte ou l'acte du meurtrier depasse l'acte gratuit gidien (puisque le meurtrier ne sait pas qui i l a tu£ en dehors d'etre ignorant • 161 du pourquoi et du comment), ou l e complexe d'Oedipe f r e u d i e n a i n s i que l e nom \"Oedipe\" sont tant b i e n que mal r a t t a c h t s sous forme d ' e t i q u e t t e s au pauvre htros qui puise, l u i , sa l e c t u r e de T i n t i n et d'autres bandes d e s s i n t e s , et ou f i n a l e -ment transpose en un temps et 'un l i e u modernes, gouvernes par l e langage de l a generation \"yeye\", l ' h i s t o i r e d'Oedipe qui epousa sa mere assume 1'importance d'un mythe moderne. C'est un mythe qui est a portee de tout l e monde: Oedipe-Eddy rebap-t i s e sa p e t i t e amie qui I ' i n t r o d u i t a son c e r c l e f a m i l i a l ou chaque membre se v o i t a u s s i • r e b a p t i s e avec un nom de l ' A n t i q u i -te. Oedipe-Eddy commence a u s s i a trouver t r o p b e l l e sa f u t u r e belle-m£re! Le r i d i c u l e deeoule justement de c e t t e mythifica^-t i o n de ce qui.Lne d o i t pas et r e mythifie: i l n'y a r i e n de moins e d i f i a n t , de s i peu digne d ' i n t e r e t que c e t t e 'famille Carp de Pen dejeunant de sardines a l ' h u i l e . Mais c e t t e i r o -n i e n'est nullement o b j e c t i v e car 1'auteur du conte ramene toujours l e present n a r r a t i f au present de 1 ' e c r i t u r e : \"Peut-etre l e temps que sechent ces t r o i s p a i r e s de bas, ce conte a i d e r a - t - i l un e s p r i t e n c l i n au reve a t r a v e r s e r sur l a pointe des pieds l e p e t i t bout d'epoque ou nous sommes, dont l a morale courante est que toute verite n'est pas neces-sairement bonne a d i r e >et q u ' i l en va du realisme comme des chapeaux: i l y en a de toutes l e s t a i l l e s et de toutes l e s formes,...\" 1 0 • Mais l e comble de tout ce conte g i t dans l e f a i t que l e s personnages sont conscients de ce quelqu'un qui e c r i t l e u r h i s t o i r e . Johnny, l e fr & r e de Philom§le denonce l a presence de 1'auteur: 162 \"A moins que 1'auteur, qui m*a pas mal l ' a i r d'un • tordu, prSfere poursuivre les choses un peu plus l o i n jusqu'au premier platane venu, pour faire weekend, et que tout rentre dans l'ordre, Oedipe cesse de nous courir a changer d'Stat c i v i l comme de numSro minSralogique, et quant a t o i , soeurette, cette bouille que tu vas faire, oh l a l a , l a tronche ouverte \"11 • • • Le conte d'ailleurs se-termine sur Oedipe incarnant un nouveau role tire\" du roman de Bemardin de Saint-Pierre. On voit alors dans Oedipe un effort d'antireprSsenta-tion puisque ce qui reprSsente l a f i c t i o n , c*est-a-dire, l'histoire d'Oedipe et-ce qui reprSsente l a narration, c'est-a-dire, les commentaires del'auteur, s'interpenetrent: 1*au-teur parle des personnages; les personnages de 1'auteur. Le prSsent de l'Scriture ne cherche pas seulement a engendrer le prSsent narratif: i l devient, l u i aussi, prSsent narratif. II n'y a plus d'intrigue possible a distinguer: l a f i c t i o n ne peut pas etre sSparSe de l a narration et l'histoire continuera a se dSrouler a travers leur rSciprocitS. L'orientation de ce conte se marque par des changements ultra-rapides dans le comportement des personnages qui semblent vouloir obSir aux impulsions de leurs pensSes frivoles:- les personnages alors ne peuvent etre 1'assise qu'il faut, ou une intrigue- consS-quente, chargSe et logique puisse se dSposer. De ce- f a i t , tout ce qui promet richesse mythique, psychologique ou philo-sophique se contorsionne en une grimace parodique qui dStruit le moindre ultime espoir de dSceler dans le conte, et dans tout le rScit, un caique chronique de l a rSalitS extSrieure. • - 1 6 3 Un personnage du roman n'est pas cense\" tou jours se comporter comme un personnage de l a vie r t e l l e . A i n s i , l e s t r o i s images des contes fonctionnent comme des e*lgments intertextuels dans La Mise a mort et en meme temps par l e processus ambivalent de destruction et de cons-truction- apportent au re\"cit une nouvelle dimension d'approche. Plus l e r S c i t se d i l a t e et se diffuse en apparent chaos, plus l e s contes, par une concentration propre a leur espace, per-mettent a l a lecture de s a i s i r rapidement l a comprehension de cette h i s t o i r e de l ' t c r i t u r e dans l e roman de La Mise 5. mort. 164 NOTES x Mentir-vrai: Louis Aragon S c r i t sur ce sujet, \"L'extraordinaire du roman, c'est que pour comprendre l e re*el o b j e c t i f , i l invente d'inventer. Ce qui est menti dans l e roman lib&re l ' S c r i v a i n , l u i permet de montrer l e re*el dans sa nudite*. (...) Ce qui est menti dans l e roman sert de substra-tum a l a vSriteV' (Preface aux Cloches de Bale, ORC, p. 1 5 ) . 2 Voir chapitre IV de cette these. 3 Voir note 1.-4 La Mise a mort, ORC, v o l . 34, p. 143 . 5 Ce jeu a Ste\" StudiS dans notre chapitre IV. 6 La Mise a mort, ORC, v o l . 33, p. 260. 7 11 s'agit du chapitre IV de La Mise a mort. 8 I c i meme, pp. 159 - l 6 0 . 9 I c i meme, pp. 160 - I 6 3 . 10 La Mise a mort, ORC, v o l . 34, p. 185. 11 Ibid., p. 1 9 1 . CONCLUSION I I c o n v i e n t de t e r m i n e r c e t t e etude de L a Mise a mort p a r un rapprochement f i n a l e n t r e l e r e c i t e t l e l a n g a g e . On a vu comment l e r e c i t , pair s a grammaire, peut a u s s i e t r e une grande p h r a s e : i l p a r t i c i p e a i n s i a l a l i n g u i s t i q u e . Comme l ' e n o n c i a t i o n d'une p h r a s e , l ' e c r i t u r e ' du r e c i t de L a Mise a mort comporte en s o i une t e n t a t i v e de communication. I I y a, en e f f e t , une c o i n c i d e n c e des n i v e a u x du r e c i t avec ceux du l a n g a g e : l a n a r r a t i o n c o r r e s p o n d au code p u i s q u ' e l l e e s t a u s s i un moyen u t i l i s e \" pour communiquer, quoique s u r l e p l a n p l u s l a r g e du r e c i t ; quant a l a f i c t i o n , e l l e e s t , comme l e message dans une communication l i n g u i s t i q u e , ' ce q u i e s t communique. A i n s i , code e t message e t a n t des \" s u p p o r t s de l a communication l i n g u i s t i q u e \" 1 , n a r r a t i o n e t f i c t i o n a g i s -s e n t , e l l e s , comme s u p p o r t s pour 1 ' e l a b o r a t i o n d'une communis c a t i o n n a r r a t i v e . 165 166 Roman Jakobson a deja mentionne le de*doublement fonc-tionnel du code et du message, qui donne quatre structures 2 doubles : (i) code renvoyant au code (e/c); (ii). code renvoyant au message (c/m) ; ( i i i ) message renvoyant au message (m/m)j (iv) message renvoyant au code (m/c). Ces quatre structures doubles du langage ressemblent-aux qua-tre sortes de permutation entre les niveaux du recit dans La Mise a mort. La correspondance entre les structures du langage et celles du rScit n'est nullement arbitraire, mais bien au contraire, fondee sur le fait-que le jeu de miroirs entre les niveaux du re\"cit repose sur un substratum d'elements linguistiques qui caractSrisent les renvois entre code et mes-sage eux-memes. Depuis 1'analyse des noyaux dans La Mise a mort, on a f a i t voir et revoir que l'Scriture renvoie a .'.elle-meme: elle est et en meme temps est en train de devenir. Comme'Narration A, 1'oeuvre composSe La Mise a mort se dSsigne en action sur le niveau de l a Narration B. Cette structure comme celle, linguistique, du code renvoyant au code possede une circula-r i t y que l u i procurent ces instances de nomination propre faites au cours de l a production de La Mise 5. mort; - ainsi l a mention des contes ou d'un chapitre(qu'on procede ensuite de commenter)constitue un de ces points precis qui identifient 167 le devenir du roman et qui, t e l le nom propre de Jakobson-^, dSsignent \"quiconque porte ce(s) nom(s)\". La nomination du conte Murmure dtsigne automatiquement le cadre textuel plus large qui l'englobe et qui est La Mise a mort. La structure du code renvoyant au message (c/m) est donnSe par 1'interaction entre l a Narration B \"et l a Fiction C dans le re\"cit. En effet, l a Narration B contient des pronoms personnels qui s'Slaborent et se dSfinissent par un renvoi a l a Fiction C. \"Je\", par exemple, dans notre phrase-re\"cit \"Je vous raconte une histoire\" Stablit un rapport avec \"une histoire\" et se dSfinit done par ce qui est message dans l a phrase . La nature ambigue du pronom personnel qui devient alors un symbole-index^ se rSvele dans cette structure du code renvoyant au message: en tant qu'index, \"Je\" dSsigne le scripteur de La Mise a mort; le rapport entre \"Je\" et ce qu'il dSsigne est alors existentiel. En tant que symbole, \"Je\" dSsigne Alfred ou Anthoine: le rapport est i c i conventionnel. C'est dans cette structure (c/m) qu'on se rend compte que ce qui est code dans l a structure (c/c) se prolonge en tant que message: l a f i c t i o n sert a Sclairer I'Scriture. L'histoire de Fougere et de ses amants est une mStaphore de ce que le scripteur entreprend: au moyen de cette histoire, i l cherche a trouver une voie dans son histoire a l u i qui consiste a Scrire un roman. Les personnages de l a Fiction C eux-memes sont acteurs dans les roles que leur procurent les pronoms 1 6 8 personnels? Fougere, par exemple, joue le role de lectrice sous l'actant-pronom \"Tu/Vous\". Les lettres qui l u i sont adressSes sont en meme temps des messages d'amour et- des va-riations sur l'acte d'§crire du scripteur. La structure circulaire du message renvoyant au message (m/m) repose, d'apres Jakobson, sur l a citation et les prece-des linguistiques qui l a dSsignent. Dans La Mise a mort, l a naissance de l a Fiction D a partir de l a Fiction C f a i t bien voir que comme premier message l a Fiction C ou evoluent les personnages f i c t i f s contient un deuxieme message qui est, principalement, l a discussion entre Ingeborg et Alfred sur l'art romanesque. De ce f a i t , l a Fiction D englobee par l a Fiction C devient une citation. Et curieusement, on retrouve, sur ce niveau-citation, l a citation de textes l i t t S r a i r e s et sur le, niveau de l a Fiction C, 1 ' u t i l i s a t i o n des procSdSs du discours direct, du discours indirect et du discours- indirect libre qui deVoilent l a Fiction C en tant que citation e l l e -meme d'une conscience plus grande qui rapporte les paroles des personnages, leurs pensees et leurs souvenirs. En effet, le scripteur (au niveau de l a Narration B) rapporte les- propos des personnages de l a Fiction C: le discours direct coincide i c i avec l a representation directe des scenes entre les person-nages de l a Fiction G; ou encore, i l donne le cadre des pro-pos SchangSs, c'est-a-dire, i l raconte au moyen de l a descrip-tion ce qui se passe entre les personnages: i l s'agit alors 169 de l'emploi du discours indirect. De plus, l e scripteur prSsente les penstes d'Anthoine de facon tres libre, ce qui confond bien souvent ces penstes d'un personnage avec celles du scripteur qui, au cours de son travail, se laisse aussi entrainer par le courant de ses reflexions provoqutes par ce qu'il Scrit. Cette confusion provient naturellement du procSdS. de discours indirect li b r e , procSdS qui, d'habitude, tend a superposer l a presence d'un auteur celle de son personnage. La Fiction C est alors citation de l a Narration B, ce qui f a i t que l a Fiction D devient plus exactement une ci t a -tion dans l a citation. C'est l a , comme le signale Jakobson , un aspect tres courant dans l a communication. La structure du message renvoyant au code (m/c)> qui est celle de l a Fiction D reflStant l a Narration A contient un effort pour expliquer dans le message ce qui appartient aussi au code''. Ne s ' a g i t - i l pas, en effet, dans l a Fiction D, d'une interpretation, au moyen de l' a r t romanesque d'autres oeuvres, de cet art romanesque applique a La Mise a mort l u i -meme? Quand Ingeborg et Alfred discutent de fagon intellec-tuelle, i l s remettent en question les problemes du personnage, du realisme et d'autres aspects pertinents au roman. Ce qui preoccupe principalement le scripteur, c'est comment raconter son histoire. Comme en linguistique ou i l existe le mode autonyme du discours, c'est-a-dire, ou le discours s'explique lui-meme, dans La Mise a mort, le recit expose et explique le 170 recit. Le message alors renvoie obligatoirement au code. Ce rapport entre le rScit et le langage nous permettra de postuler que s i l a pratique de l'ecriture chez Aragon ne descend pas jusqu'a l a creation romanesque a partir du mot, qui est celle d'un Raymond Roussel, elle pose comme fondement au texte aragonien l a notion du mentir-vrai. II s'agit d'a-bord d'Snoncer un mensonge, c'est-a-dire, de faire un rScit et ce sera a partir de ce mensonge qu'est le rScit qu'on acce-dera au \"vrai\". Cette notion souligne chez Aragon une nou-velle conception du RSalisme. On connalt l a f o i qu'Aragon vouait au SurrSalisme, et ensuite au RSalisme Socialiste qui se dSfinissait en gros comme une rSvolte contre l a bourgeoi-o sie . Dans ces deux tendances, divergences-; dans le sens que l'une rSclamait l a libertS au dStriment de l a raison et des valeurs traditionnelles et 1'autre s'ancrait a une solide valeur politique qu'est le peuple, on ressent dSja 1-'aspira-tion assoiffSe d*Aragon au Vrai. Mais a partir de La Mise a mort on sait aussi que le Vrai pour Aragon ne sera pas nSces-sairement le monde rSel, extSrieur au l i v r e : en f a i t , on assiste dans ce roman a l a destruction d'une representation directe du monde rSel. Le rSel cette fois part de l'Scriture; ce n'est plus l'Scriture qui trouve sa raison d'etre dans le rSel.^ La nouvelle conception du rSalisme qui s'y dSgage est done celle d'un \"rSalisme de l'Scriture\" ayant pour cadre le liv r e dont l'espace s'Srige en structures et s'Slabore en une 171 tentative de communication qui a comme base stmio.tique, le langage. Et s i \"1'espace-papier\" est notion longtemps recon-nue chez Aragon, i l sera tout a f a i t juste de rappeler qu'une tel l e notion est restSe principe abstrait jusqu'a sa demons-tration systtmatique dans La Mise a mort. De meme, l a notion du collage qui est depuis longtemps pratique confirmee chez Aragon revet dans La Mise a mort une allure nouvelle en boule-versant d'autres notions fondamentales au recit, par exemple: celles du personnage, du temps et de l'espace. Le roman d* Aragon n'a rien d*original en ce qu'il traite de problemes romanesques aussi vieux que le mondej 1 *interit ressort de l a presentation a l a fois l i t t t r a l e et symbolique de ces problemes dans un espace appeie non pas texte, ni essai, mais roman: en effet, les preoccupations du scripteur de La Mise a mort se trouvent aussi etre celles d'Anthoine CSlebre, Scrivain rSa-l i s t e de l'histoire de Fougere et de ses amants. Ces mimes preoccupations sont aussi celles de Louis Aragon, auteur de La Mise a mort. Ainsi l a version l i t t e r a l e des problemes roma-nesques de 1'auteur est donnee par l a presence de ces memes problemes chez le scripteur tandis que les affres ressenties par Anthoine ceiebre, ecrivain raconte dans le roman du scrip-teur, symbolisent celles de 1'auteur et de tout auteur, en general. L'instabilite du pronom \"Je\" donne alors au roman une allure a l a fois vraie et fausse, mais comme on l ' a deja vu, c'est justement cette ambigulte qui f a i t du roman d*Aragon • 172 un roman realiste au sens redefini du terme. Comme toute tentative critique, l a notre a essaye le plus possible de respecter non l a vSritS mais l a validity du cadre qu'elle s'est impost. Cette approche structuro-gramma-ticale appliquee a La Mise a mort a ouvert une possibility se prtsentant sous forme d'une phrase,qui a ensuite StS explorte au moyen de tout le r t c i t . On a vu que le dSvoilement de structures dans le roman d'Aragon dScouvre une certaine i n t i -mity avec le langage. Notre ytude a gardy ses distances vis-a-vis de l a psycho-critique ou encore d'une approche socio-logique 1^ pour ytudier dans le roman d'Aragon un sujet qui a tty proposy par et prtsentt dans le roman lui-meme. De ce / ;:• f a i t , on n'a nullement ypuisy tous les sujets de La Mise a mort. De chaque page qu'on tourne se dtgage le parfum de l a potsie d*Aragon qu'on a largement dtlaissy* par respect du cadre choisi; mais le message du texte reste toujours un i n f i -ni ouvert a 1'exploration et a l a dycouverte car La Mise a mort est, avant tout, un texte moderne dont l a valeur est yt e r n e l l e . 1 1 Le rapprochement f a i t entre le roman d'aujourd'hui et La Mise a mort datant de 1965 est suffisamment j u s t i f i t par l'ytroite correspondance entre le rycit et le langage et par l a dialectique institute entre l'gcrivain et son texte qui appelle l a prysence constante du lecteur. Ainsi, l a lecture de ce roman sera activity polyvalente: le lecteur dont l a 173 participation est solidement rSclamte devra avant tout Spouser le texte et etre pret a une activite\" aussi crSatrice- que celle de l'Scrivain. Le lecteur devra se partager constamment entre l a re\"alitt du l i v r e qu'il tient a l a main et celle qui se dtgage de ses pages tourne'es. RScepteur du don de l'Scrivain, i l doit aussi \"donner\" par son intSret et sa participation pour que l a communication institute entre 1'auteur et l u i au moyen du texte puisse etre pleinement g r a t i f i t e . La Mise a mort, creation au moyen de l'Scriture, anti-cipe dtja un Schec de lecture et cette anticipation n'est qu'une mise en garde contre une lecture trop facile.- L'Schec de communication entre le scripteur et son lecteur ne doit pas etre celui entre 1'auteur et son lecteur-futur. Si te l est le cas, alors l a vraie rtponse sera dans une relecture du roman qui, l u i , demeurera toujours mystere a sonder. 174 1 p. 176. 2 NOTES Roman Jakobson, Essais de linguistique genSrale, Ibid., p. 176. ^ Ibid., pp. 177 - 178: \"le nom (propre) dSsigne quiconque porte ce nom. L'appellatif 'chiot' dSsigne un jeune chien, '.batard\" dSsigne un chien de race melSe, 'lSvrier' un chien utilise\" dans les'courses, mais 'Fido' ne dSsigne ni plus ni moins qu'un chien qui s'appelle 'Fido'.\" ^ Ibid., p. 178: \"Tout code linguistique contient une classe spSciale d'unite's grammaticales qu'on peut appeler les embrayeurs: l a signification genSrale d'un embrayeur ne peut etre dSfinie en dehors d'une rSfe\"rence au message.\" Symbole-index: classe a laquelle appartiennent les embrayeurs, tels les pronoms personnels. Roman Jakobson, op. c i t . , p. 177: \"Nous citons les autres, nous citons nos propres paroles passSes et nous sommes meme enclins a presenter certaines de nos experiences les plus courantes sous forme d'autocitations...\" 7 Jakobson l'appelle \"le mode autonyme du discours\". (p. 179)« Ainsi, l a phrase \" 'Chiot' est un nom qui dtsigne un jeune chien\" est une explication du discours. Q Aragon Scrivait des romans\"communistes\" dtcrivant l a lutte et les misSres de l a masse, des ouvriers, mais tou-jours dans l a lignte des romanciers \"traditionnels\" qui cher-chaient a reprSsenter l a realite* par une copie textuelle. 9 Par ce qui semblerait invraisemblable au lecteur orients vers des textes traditionnels, Aragon a su rendre c l a i r dans La Mise a mort qu'une f i c t i o n cherchant a calquer le rSel est, en f a i t , subordonnSe a 1'ecriture. 1 0 La psycho-critique ou 1'approche sociologique auraient Slargi le champ d'etude par un plus grand nombre de textes, et donne' une vue d'ensemble de 1'activite\" du romancier et de l'homme chez Aragon. Notre credo, par contre, est que 175 chaque roman renferme un secret a devoiler qui nous permettra d'apprendre tout autant que ce que puisse o f f r i r une-serie d*oeuvres. 1 1 Car, quelle que s o i t ^ l a date chronologique ou l'on situe un roman, ce l u i - c i , pour etre valahle, doit etre s u f f i -samment souple pour epouser autant de formes qui surgissent de l a constante Evolution dans l ' a r t romanesque. La Mise a mort, on l ' a vu, a largement surmonte\" cette Spreuve. 176 BIBLIOGRAPHIE I L'oeuvre S t u d i e e : Aragon, L o u i s . L a Mi s e a mort. 1 9 6 5 ; ORC*, v o l . 3 3 - 3 ^ . P a r i s : L a f f o n t , 1 9 7 0 . I I Oeuvres de L o u i s Aragon: ( i ) P o g s i e e c r i t e aux e n v i r o n s de 1 9 6 5 : Le Fou d ' E l s a . P a r i s : G a l l i m a r d , I 9 6 3 . Le Voyage de H o l l a n d e . P a r i s : Seghers, 1 9 6 4 . I I ne m'est P a r i s que d ' E l s a . P a r i s : L a f f o n t , 1 9 6 4 . E l g g i e a P a o l o Neruda. 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